Entre refus et maintien des concerts d’Izïa, la chanteuse qui évoque un lynchage du président fait l’objet d’une enquête

Par Anais Duroy
10 juillet 2023 20:22 Mis à jour: 11 juillet 2023 20:22

Tandis que les Francofolies maintiennent leur programmation d’Izïa en concert le 12 juillet à La Rochelle, la mairie de Marcq-en-Baroeul (Nord) a préféré annuler sa venue prévue le lendemain. La chanteuse est l’objet d’une polémique après avoir tenus sur scène des propos jugés « scandaleux » et « d’une grande violence » contre le président Macron.

La chanteuse, 32 ans, devait se produire dans cette commune aisée de l’agglomération lilloise avant les feux d’artifice de la Fête nationale « pour un concert public, gratuit et familial », souligne la ville, dirigée par un maire LR, Bernard Gérard, dans un communiqué.

Mais la mairie a décidé de résilier « unilatéralement » son contrat avec elle, après ses déclarations sur scène le 6 juillet à Beaulieu-sur-mer (Alpes-Maritimes). »La venue de cette artiste pour un concert gratuit et familial serait en contradiction avec les valeurs de rassemblement et d’unité qui prévalent lors de notre fête nationale ».

« Ils indignent l’ensemble des Marcquois comme tous ceux qui sont attachés aux valeurs de la République », ajoute la municipalité. Contacté par l’AFP, Believe, label d’Izïa, n’a pas réagi dans l’immédiat.

Enquête visant la chanteuse

Le parquet de Nice a annoncé samedi l’ouverture d’une enquête visant la chanteuse pour « provocation publique à commettre un crime ou un délit », après ses propos lors du festival « Les nuits guitare », qui ont suscité un déluge de commentaires.

Évoquant le chef de l’État, l’artiste avait imaginé comment il pourrait être lynché publiquement par les spectateurs.

« Je le connais, quelle coquine celui-là. Il s’est dit là, ce qui serait bien, je pense que ce que le peuple veut, ce dont le peuple a envie, c’est qu’on m’accroche à 20 m du sol telle une piñata humaine géante, et qu’on soit tous ici présents munis d’énormes battes avec des clous au bout comme dans Clockwork Orange« , en référence au film Orange mécanique de Stanley Kubrick.

Et la chanteuse de poursuivre, sur fond musical, d’après une vidéo postée sur le site du magazine culturel InOut Côte d’Azur : « Et là, on le ferait descendre, mais avec toute la grâce et la gentillesse que les gens du Sud ont, là juste au-dessus de vous. Et on aurait tous notre batte avec nos petits clous, et dans un feu de bengale de joie, de chair vive et de sang, on le foutrait à terre, mais gentiment tu vois… ».

Sur RTL, la journaliste Alba Ventura condamne l’artiste en faisant la distinction entre engagement, critique du gouvernement, et véritable appel au meurtre. « La liberté de s’engager d’un artiste est chose courante » et « le père de la chanteuse, Jacques Higelin, était d’ailleurs un chanteur engagé ». « Il arrive que les artistes critiquent, font part de leurs opinions », mais ici la chanteuse n’était pas dans ce registre, elle est allée beaucoup plus loin. « Appeler au meurtre, au crime, à la haine comme elle le fait, c’est scandaleux. »

« Je suis bien désolée que cela ait été mal interprété, décontextualisé. À aucun moment évidemment, je n’ai voulu inciter à la violence ou à la haine », a réagi Izïa dans un entretien à Ouest France publié lundi soir.

« C’est une histoire, un liant improvisé et surréaliste entre deux titres qui parle de tout et de rien et qu’il ne faut surtout pas prendre au premier degré », a-t-elle ajouté.

La députée Renaissance du Nord, Violette Spillebout, a pointé du doigt dimanche sur Twitter un « appel au meurtre » dans un contexte de violence contre les élus.

D’autres ont défendu la chanteuse, comme la députée écologiste Sandrine Rousseau sur Twitter : « C’est drôle que, là, personne ne veuille séparer la femme de l’artiste. » Le rappeur Médine, objet lui aussi d’une polémique en 2018 l’ayant conduit à annuler deux concerts au Bataclan, a estimé sur le réseau social que « la censure et le lynchage qu’Izïa vit, c’est ce que le rap vit depuis toujours ».

Izïa doit se produire mercredi aux Francofolies de La Rochelle, un concert « bien évidemment » maintenu, a indiqué lundi la direction des Francofolies à France Bleu la Rochelle, sans vouloir se prononcer sur les propos polémiques de la chanteuse.

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