Assouplissement des exigences sur les prairies, simplifications administratives et réduction des visites de contrôle, tolérance en cas d’épisode climatique extrême… Bruxelles a présenté jeudi de nouvelles propositions pour alléger « la pression » sur les agriculteurs et répondre à leur mouvement de colère.
Ces mesures, susceptibles d’être adoptées dès mars, seront examinées lundi par les ministres de l’Agriculture des Vingt-Sept, alors que les manifestations continuent à travers l’Europe pour dénoncer le fonctionnement de la Politique agricole commune (PAC).
Dans le détail, la Commission européenne propose de modifier les obligations de maintien des surfaces consacrées aux prairies permanentes, afin de modérer les pertes de revenus que cela entraîne pour d’anciens éleveurs reconvertis dans d’autres cultures.
D’autres obligations environnementales imposées par la nouvelle PAC, appliquée depuis début 2023, pourraient être revues. Ainsi l’élargissement des pratiques autorisées dans le cadre de l’obligation de couverture des sols « sera examiné ».
Une tolérance serait accordée en cas « de force majeure et de circonstances exceptionnelles », par exemple d’épisodes climatiques (sécheresse, inondations…) empêchant un agriculteur de respecter les exigences de la PAC, afin qu’il n’encoure pas de pénalités.
À propos des inspections
Surtout, l’exécutif européen propose de « simplifier la méthodologie pour certains contrôles », en vue de « réduire de jusqu’à 50% le nombre de visites dans les exploitations effectuées par les administrations nationales ».
L’idée est de « rationaliser et clarifier l’évaluation du suivi des surfaces » grâce à « l’analyse automatisée des images » du programme satellitaire européen Copernicus, afin de « réduire les inspections dans les exploitations » et d’« aider les agriculteurs à éviter les erreurs ».
« Cette mesure répond directement aux demandes des États », précise la Commission. Début février, le ministre français de l’Agriculture, Marc Fesneau, avait réclamé des avancées sur cette question des contrôles.
« Ce premier paquet de simplification, très attendu, va dans la bonne direction. Le processus doit désormais apporter rapidement aux agriculteurs des dispositions tangibles », a noté sur X le Copa-Cogeca, organisation des syndicats agricoles majoritaires.
Des concessions jugées insuffisantes
Bruxelles avait déjà proposé fin janvier une suspension partielle et temporaire des obligations de jachères et l’encadrement plus strict des importations agricoles ukrainiennes accusées de plomber les marchés européens. Mais le secteur agricole trouvait ces concessions largement insuffisantes. Le sujet des importations ukrainiennes reste sensible en Pologne, où le blocage de la frontière par des agriculteurs provoque ces derniers jours une violente crise entre Varsovie et Kiev.
Les Vingt-Sept, eux, réclamaient d’ambitieuses mesures de « simplification » des procédures.
« Le message des agriculteurs est clair : ils veulent travailler dans leurs champs, pas être coincés derrière des dossiers », a commenté le commissaire européen à l’Agriculture, Janusz Wojciechowski.
« La Commission reste pleinement déterminée à apporter des solutions pour alléger la pression (…) et aider nos agriculteurs à garantir la sécurité alimentaire », a abondé la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, elle-même aiguillonnée par les élus conservateurs de son propre camp. Pour autant, Bruxelles rappelle « le rôle essentiel des États dans le maintien d’une charge administrative limitée et proportionnée ».
Modification en vue de la PAC
À moyen terme, la Commission envisage de modifier les réglementations de la nouvelle PAC – entérinées en 2021 par les États et eurodéputés – pour exempter les petites exploitations de moins de 10 hectares des contrôles liés au respect des conditions environnementales.
« Cela simplifierait considérablement le travail des petits agriculteurs, qui représentent 65% des bénéficiaires de la PAC, sans rogner les ambitions environnementales puisque ces petites exploitations ne couvrent que 9,6% des surfaces bénéficiant d’aides européennes », note-t-elle.
Plusieurs conditions environnementales — nécessaires pour toucher les paiements de la PAC — pourraient aussi être révisées « pour réduire encore la charge » sur les agriculteurs : jachères, rotation des cultures…
Enfin, Bruxelles promet de présenter « prochainement » des mesures « visant à améliorer la position des agriculteurs dans la chaîne agro-alimentaire et à les protéger des pratiques commerciales déloyales », notamment sur la « transparence du marché » ou le contrôle des règles sur les produits importés.
Et la Commission lancera en mars « une enquête en ligne adressée directement aux agriculteurs » pour « identifier leurs principales sources de préoccupation » et les obstacles administratifs. Les résultats seront analysés et publiés « à l’automne ».
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