Un important responsable chinois du domaine des transplantations d’organes a fait un aveu lourd de sens lors d’une récente entrevue avec une publication officielle. Il a affirmé que les autorités prélèvent depuis des années les organes des prisonniers exécutés sans avoir obtenu leur consentement.
Les chercheurs sur les prélèvements forcés en Chine considéraient déjà cela comme une réalité, mais l’aveu d’un responsable médical a grandement surpris. La question du consentement est essentielle en ce qui a trait à l’éthique médicale. Dans les cas de prélèvements et de transplantations d’organes, le consentement est souvent perçu comme la ligne séparant une pratique acceptable et un crime contre l’humanité.
Les commentaires du responsable ont été publiés dans le Global Times, une filiale de l’organe officiel du Parti communiste chinois, le Quotidien du peuple. Yang Chunhua, directeur de l’Unité des soins intensifs du Premier hôpital affilié à l’Université Sun Yat-sen dans la province du Guangdong, a fait l’aveu alors qu’il tentait d’avancer une idée au sujet des réformes que les autorités veulent introduire actuellement dans le système de transplantation en Chine.
«Auparavant, les autorités utilisaient, sans leur consentement, les organes des criminels exécutés alors que leur permission était requise ces dernières années», a écrit le quotidien citant Yang Chunhua. Les prélèvements d’organes sur les prisonniers vont toutefois continuer pour l’instant, puisqu’il n’y a pas suffisamment de donneurs volontaires en Chine pour répondre aux besoins.
Bien que ce n’était pas l’intention de M. Yang, il a aussi donné des munitions aux critiques du système de transplantation chinois en admettant que leurs révélations sur les abus du système encourageaient certains efforts de réforme.
«La Chine a été accusée de violer les droits de la personne avec les organes des criminels», a affirmé M. Yang dans l’entrevue avec le Global Times. «Les médecins chinois n’ont même pas la chance de publier leurs articles sur les transplantations d’organes dans les revues internationales.»
Il n’est pas clair pourquoi M. Yang a fait cet aveu, qui se greffe maintenant à une série d’aveux du même genre ayant débuté il y a plusieurs années. «La position officielle du Parti communiste chinois pendant plusieurs années était que tous les organes provenaient de donneurs consentants, et ce, même quand il n’y avait pas de système de don», écrit dans un courriel David Matas, un avocat canadien coauteur du rapport sur les prélèvements d’organes forcés sur les pratiquants de Falun Gong. «Les critiques de ceux qui disaient le contraire, que les organes venaient des prisonniers, étaient véhémentes et indignées.»
Avant 2006, le Parti communiste chinois et la classe médicale chinoise insistaient sur le fait que tous les dons d’organes en Chine étaient volontaires.
Après que des preuves ont fait surface en 2006 quant aux prélèvements d’organes à grande échelle sur des prisonniers de conscience, principalement des pratiquants de Falun Gong – une discipline spirituelle persécutée en Chine – les autorités ont commencé à faire des aveux au compte-gouttes. En 2008, l’ex-sous-ministre de la Santé, Huang Jiefu, a admis à la revue médicale The Lancet que la majorité des transplantations d’organes en Chine provenait des prisonniers exécutés.
La question du consentement est une autre affaire. La communauté médicale internationale estime que le consentement des prisonniers dans le couloir de la mort a peu de poids, puisque les prisonniers peuvent être victimes de coercition. Néanmoins, la Chine a continué d’affirmer que les prisonniers étaient consentants, et ce, jusqu’à l’aveu de M. Yang qui spécifie que le consentement a été obtenu «ces dernières années». David Matas écrit : «Voir le Parti communiste chinois admettre la vérité, lorsque cette vérité le place dans une mauvaise situation, est un événement surprenant.»
«L’aveu que nous constatons aujourd’hui ne signifie assurément pas que les autorités viennent tout juste de découvrir aujourd’hui qu’il n’y avait pas de consentement auparavant. C’est l’aveu qu’elles ont toujours su qu’il n’y avait pas de consentement. C’est l’aveu d’une complicité colossale dans des crimes contre l’humanité.»
Selon Arne Schwarz, un chercheur indépendant établi en Suisse ayant remporté un prix pour ses recherches sur les abus dans le système de transplantation chinois, M. Yang a «admis que les autorités chinoises ont commis un crime abominable même selon leurs propres standards douteux».
L’aveu est problématique pour les partisans internationaux de ceux perçus comme étant des réformateurs dans la classe médicale chinoise, selon MM. Matas et Schwarz. La Transplantation Society, entre autres, soutient ouvertement le travail de Huang Jiefu, le chef actuel du Comité chinois sur les transplantations, une nouvelle organisation ayant pour tâche de réformer le système de transplantation qui s’appuie sur les organes de prisonniers (en majorité des prisonniers de conscience, selon plusieurs).
En disant que le consentement a seulement été obtenu «ces dernières années», Yang Chunhua affirme aussi que Huang Jiefu lui-même a donc prélevé des organes sur des prisonniers non consentants, selon M. Schwarz.
«Huang Jiefu a été personnellement impliqué dans les prélèvements d’organes sur des prisonniers non consentants et dans le commerce d’organes avec des étrangers, puisqu’il était le chirurgien principal pour les transplantations de foie et le président du Collège médical Sun Yat-sen» en 2000, affirme M. Schwarz.
Selon un article de janvier 2000 du South China Morning Post, un médecin du Premier hôpital affilié à l’Université Sun Yat-sen avait déclaré à un journaliste qu’une «transplantation de foie pouvait être arrangée facilement et que le consentement n’était pas un problème. Il n’y a pas de disposition dans la loi chinoise pour que les prisonniers offrent leur consentement pour donner leurs organes».
À cette époque, le directeur de l’hôpital était Huang Jiefu.
Dans une entrevue avec l’agence officielle Xinhua en 2010, M. Huang a dit : «C’était le Premier hôpital affilié Sun Yat-sen qui m’a fait grandir, ce sont mes expériences à cet hôpital qui ont fait de moi l’homme que je suis aujourd’hui.»
«Cet homme – impliqué personnellement dans tous ces crimes, avec aussi plus des 500 transplantations de foie qu’il a réalisées – a reçu des prix de la Transplantation Society et de l’Université de Sydney», déplore M. Schwarz. La Transplantation Society n’a pas répondu à une question envoyée par courriel au sujet du prix.
L’Université de Sydney a accordé en 2008 le statut de professeur honoraire à Huang Jiefu et à nouveau en 2011, en dépit des objections des experts locaux et internationaux. L’université s’est portée à la défense de M. Huang en avril dernier, affirmant qu’il était «un opposant des prélèvements d’organes sur des prisonniers exécutés depuis 2005».
L’Université de Sydney et Dr Francis L. Delmonico, le président de la Transplantation Society, n’ont pas répondu à de nombreuses requêtes pour commenter si leur position sur les réalisations de Huang Jiefu et son rôle dans le système de transplantation chinois avait changé à la suite des révélations de Yang Chunhua.
«Ces prix et cette coopération devraient être révoqués», estime M. Schwarz. «Autrement, ils vont endommager la crédibilité éthique de la médecine de transplantation partout dans le monde.»
Version originale : Chinese Medical Official Admits That Organs Were Extracted Without Consent
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