Son parti n’a « violé aucune règle » et elle « répondra à toutes les questions » du tribunal. Marine Le Pen a voulu afficher lundi sa « sérénité » à l’ouverture de son procès et celui de 24 autres personnes et du Rassemblement national, soupçonnés d’avoir détourné des fonds du Parlement européen pour payer des salariés du parti.
« Je répondrai à l’intégralité des questions que le tribunal voudra bien me poser », a assuré Marine Le Pen à la barre du tribunal correctionnel de Paris. À la lecture des infractions reprochées, on la voit se raidir, dans son strict tailleur noir.
L’audience a débuté à 13h45, la présidente Bénédicte de Perthuis commençant par appeler les prévenus un par un à la barre pour lister les infractions qui leurs sont reprochées et vérifier leur identités et adresses – Marine Le Pen comme l’ex-numéro 2 du parti Bruno Gollnisch qui « reçoit encore des menaces » dit-il, demandent à pouvoir exceptionnellement ne pas le donner en public.
Un procès de deux mois
Avant de pénétrer dans la salle du tribunal, qui va accueillir pendant deux mois ce procès aux lourds enjeux politiques pour la cheffe de file de la droite nationaliste française, celle-ci s’est dite tout à fait « sereine ». « Nous n’avons violé aucune règle », a-t-elle lancé à la presse.
« Nous avons énormément d’arguments à développer pour défendre ce qui m’apparaît être la liberté parlementaire qui est en cause dans cette affaire », a ajouté la présidente du groupe RN à l’Assemblée, avant de s’asseoir au premier rang entourée de Nicolas Crochet, expert-comptable également jugé, et de Catherine Griset, une très proche, aussi prévenue au procès.
Vont comparaître neuf anciens eurodéputés du Front national (rebaptisé RN), dont Marine Le Pen, Louis Aliot, aujourd’hui vice-président du RN, l’ex-numéro 2 du parti Bruno Gollnisch, ou encore le député et porte-parole du RN Julien Odoul.
À leurs côtés, 12 personnes ayant été leurs assistants parlementaires et quatre collaborateurs du parti seront aussi jugés dans ce procès prévu trois demi-journées par semaine jusqu’au 27 novembre.
Le tribunal a formellement ordonné au début de l’audience la disjonction des cas Jean-Marie Le Pen, 96 ans, et l’ex-eurodéputé Jean-François Jalkh, leur état de santé ne leur permettant ni « d’être présent » ni de « préparer leur défense ».
Marine Le Pen a fait savoir qu’elle comptait se rendre autant que possible face aux juges, mais ne sera pas présente mardi, attendue à l’Assemblée nationale pour la déclaration de politique générale du nouveau Premier ministre Michel Barnier.
L’affaire a débuté en 2015 par un signalement du président du Parlement européen Martin Schulz et concerne de très nombreux contrats d’attachés parlementaires sur une période de plus de dix ans (2004-2016).
Pour l’accusation, ces « assistants », bien en peine de décrire leurs tâches, n’en avaient que le titre. Certains n’avaient jamais même rencontré leur employeur officiel ou mis les pieds au Parlement et ne travaillaient, toujours selon l’accusation, que pour le parti – ce qui est interdit dans la réglementation européenne.
Il s’agit notamment du garde du corps historique du fondateur du FN Jean-Marie Le Pen, Thierry Légier, de sa secrétaire, de la cheffe de cabinet de Marine Le Pen, Catherine Griset, ou encore du graphiste du parti.
Marine Le Pen risque une peine d’inéligibilité de dix ans
Les prévenus, jugés notamment pour détournement de fonds publics ou complicité de ce délit, encourent un maximum de dix ans d’emprisonnement et un million d’euros d’amende et surtout une peine d’inéligibilité de dix ans susceptible d’entraver les ambitions présidentielles de Marine Le Pen pour 2027.
« Mais il n’y a pas de raison qu’elle soit déclarée inéligible puisque François Bayrou, poursuivi pour les mêmes faits, président de parti politique lui aussi, a été relaxé. Donc ce qui vaut pour l’un devrait valoir pour l’autre », veut croire le député RN Sébastien Chenu.
La plupart des prévenus contestent en bloc, évoquant une « mutualisation » du travail des assistants parlementaires. Le RN dénonce depuis des années un « acharnement », voire une procédure « politique ».
« Cette affaire n’aurait déjà jamais dû venir devant la justice (…). Oui, nos assistants ont travaillé (…), ils ont travaillé avec le Rassemblement national et c’était parfaitement leur droit », a commenté au micro de BFM M. Gollnisch.
« Nous n’avons rien à nous reprocher dans cette affaire », déclarait dans le Parisien mi-septembre Marine Le Pen, 56 ans, disant tenir à expliquer à la barre que les assistants parlementaires ne sont « pas des salariés du Parlement européen » et ont « évidemment vocation, pour un certain nombre d’entre eux, à faire de la politique ».
Le Parlement européen, partie civile, a évalué son préjudice financier à trois millions d’euros. Il ne réclamera que deux millions, un million ayant déjà été remboursé (ce qui n’est pas un aveu de culpabilité, a assuré le RN).
Le parquet de Paris a évoqué en 2023 « un véritable système mis en place pour faire supporter, par le Parlement européen, une partie des charges de fonctionnement du FN via la prise en charge des salaires d’un nombre croissant de ses employés ».
Ce « système », validé par Jean-Marie Le Pen puis sa fille, selon l’accusation, se serait accéléré avec l’entrée au Parlement en 2014 de 23 eurodéputés FN (contre trois auparavant).
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