Qu’est-ce qui influence les taxes foncières que nous payons ? Comment sont évaluées les propriétés, puisque c’est l’évaluation foncière qui sert de base d’imposition ? Sylvain Gouin, directeur du service des finances de la Ville de Laval, nous donne un petit cours 101 sur ce régime fiscal, qui est l’un des plus anciens modes d’imposition, pour nous permettre de mieux comprendre comment il fonctionne.
Évaluation municipale
« L’évaluation municipale, c’est d’abord et avant tout une base de comparaison. On a un ensemble de dépenses à financer par la Ville, qui doit être taxé auprès des contribuables. La base qu’on utilise, c’est l’évaluation foncière pour répartir la facture le plus équitablement possible entre tous ses contribuables », explique M. Gouin.
L’évaluation est basée tout d’abord sur les caractéristiques d’une propriété : superficie du terrain, âge apparent du bâtiment, caractéristiques physiques et dimensions de l’édifice. À chaque rôle, l’évaluateur regarde ce qui a été changé à la propriété : ce qui augmente sa valeur (ajout d’un garage, agrandissement, etc.) ou ce qui la diminue (démolition d’un garage par exemple).
Tous les trois ans, un nouveau rôle de l’évaluation foncière est constitué, de manière à mettre à jour l’évaluation des propriétés. Plusieurs grandes villes du Québec, comme Montréal et Laval, ont leur propre évaluateur, alors que les plus petites municipalités font faire l’évaluation par une entreprise externe.
Ça ne veut pas dire que l’évaluateur va venir visiter votre propriété tous les trois ans, puisque c’est rare que des travaux majeurs sont réalisés si régulièrement, et que cela coûterait trop cher. L’évaluateur a l’obligation de venir la visiter au moins une fois sur un cycle de neuf ans. Par contre, il va visiter systématiquement toutes celles qui ont demandé un permis de construction.
Trois méthodes
Il existe trois méthodes pour évaluer une propriété, et l’évaluateur peut en utiliser une seule, à son choix, ou plusieurs d’entre elles : la méthode de comparaison, celle du coût et celle du revenu. Pour la maison résidentielle, l’évaluateur va généralement utiliser la méthode de comparaison, en observant les ventes. Dans les grandes villes, en particulier, il peut cibler des secteurs de comparaison où les propriétés ont été construites à la même époque et ont des caractéristiques similaires.
Si deux maisons se ressemblent et sont construites sur des terrains identiques, même si elles ont le même âge, l’une peut valoir plus cher parce qu’elle a été entièrement rénovée. Ce que vous pouvez voir et pour lequel vous êtes prêt à payer quand vous visitez une propriété va influencer son évaluation : par exemple, un beau comptoir en granit ou en marbre dans la maison A par rapport au comptoir de stratifié dans la maison B.
« La méthode du coût, on va l’utiliser surtout pour des remplacements de bâtiment, on va aussi beaucoup l’utiliser pour de la construction neuve. La méthode du revenu servira davantage pour des immeubles commerciaux, à bureaux », continue le directeur du service des finances de Laval.
Travaux et augmentation de l’évaluation
M. Gouin prévient : « Ce n’est pas parce que vous avez fait des travaux pour 30 000 $ que ça ajoute 30 000 $ de valeur à votre propriété, parce qu’il est normal d’entretenir un actif. Quand vous refaites la toiture de votre propriété, ça ne lui donne pas plus de valeur. Ce sont des travaux qu’il faut refaire. »
Par exemple, si vous changez le bardeau d’asphalte de la toiture pour une toiture en cuivre qu’on retrouve sur des maisons de deux millions de dollars et plus, dans un quartier où il n’y a que des unifamiliales de 300 000 $, ça n’ajoute qu’un peu de valeur à votre propriété, puisque la nouvelle toiture est faite pour durer. L’augmentation de l’évaluation ne sera pas, dans ce cas, de 100 % du montant des travaux effectués.
Le taux de taxes, c’est une résultante entre le montant total de dépenses que je veux répartir et la richesse foncière uniformisée globale de la Ville. On divise l’un par l’autre et ça donne le taux de taxes.
– Sylvain Gouin
Les dépenses de la Ville
Les dépenses d’une ville qui sont réparties entre les contribuables par le biais des taxes foncières regroupent tout le panier de services et d’infrastructures « en qualité, en nombre et en diversité », précise Sylvain Gouin. En général, les villes vont assainir les eaux usées, mais certaines petites villes ne le font pas ; dans ce cas, le niveau de taxation est moindre, mais les résidents ont moins de services et doivent généralement avoir leur propre puits artésien.
Les Villes dépensent également pour le déneigement, la collecte des déchets et des matières recyclables et, de plus en plus souvent, celle des matières organiques, la sécurité publique, le transport en commun, le logement social, etc. Chaque service supplémentaire augmente les dépenses de la Ville.
Le volet loisirs et culture est aussi habituellement un autre secteur de dépense important pour une Ville. Si une décision est prise d’ouvrir une nouvelle bibliothèque, il faut d’abord la construire et y mettre des livres, puis embaucher des bibliothécaires, payer le chauffage et tous les autres frais. « On se retrouve avec un ensemble de dépenses qui augmente et qu’on n’avait pas l’année précédente », résume M. Gouin.
Les grandes villes décident également d’investir dans certains secteurs. Par exemple, Laval va développer ou revitaliser les secteurs du métro Cartier et du métro Montmorency, Sainte-Rose, Val-Martin.
« Ce sont des secteurs où, à moyen terme, sur un horizon de cinq ans, dix ans, on verra peut-être les valeurs s’apprécier de façon plus rapide que dans d’autres secteurs de la ville, du fait qu’on compte y faire des investissements majeurs », explique le directeur des finances de la Ville de Laval. « Si la Ville a investi plus particulièrement dans un secteur pour renouveler ses infrastructures et les bonifier, en comparaison, la valeur [des propriétés] va augmenter un peu plus que dans d’autres secteurs de la ville, et ils [ces résidents] vont payer un peu plus cher de taxes, mais quelque part vous voyez qu’il y a un bel équilibre. »
Taux de taxes et charge fiscale
« Le taux de taxes, c’est une résultante entre le montant total de dépenses que je veux répartir et la richesse foncière uniformisée globale de la Ville. On divise l’un par l’autre et ça donne le taux de taxes », précise M. Gouin, avant d’indiquer que le taux de taxes diminue chaque année à Laval. Pourquoi ? Parce que la richesse foncière augmente chaque année et la valeur globale des propriétés est plus forte que la croissance des dépenses de la Ville. Pourtant, ce que paient les contribuables est en augmentation.
Par exemple, de 2004 à 2016, la valeur foncière uniformisée de la Ville de Laval a presque triplé, passant de quelque 20 milliards à 55 milliards de dollars. Pour cette même période, la croissance des taxes a augmenté de moins de 20 % au résidentiel.
Exemple : une ville théorique
Inventons une ville théorique de quatre bâtiments seulement, valant chacun 25 $. Chacun représente 25 % de la valeur de la ville, qui est de 100 $. Dans cet exemple, les dépenses de la Ville vont être réparties de la même façon entre chacune des quatre propriétés sous forme de taxes ; donc si les dépenses sont de 100 $, chaque propriétaire va payer 25 $.
Lors du nouveau rôle foncier, 3 ans plus tard, si l’évaluateur dit que chacun de ces bâtiments a doublé de valeur, passant de 25 $ à 50 $, le total de la richesse foncière de la Ville est maintenant de 200 $. Les dépenses de la Ville, quant à elles, n’ont pas doublé ; elles sont passées de 100 $ à 108 $. Chaque propriétaire va, dans ce cas, payer maintenant 27 $ de taxes au lieu de 25 $.
Un autre scénario en revenant à quatre bâtiments qui valaient 25 $ chacun : lors du rôle suivant, trois de ces propriétés valent toujours 25 $, mais la quatrième a été agrandie – trois étages et un garage ont été ajoutés, etc. – elle vaut maintenant 125 $. La nouvelle richesse foncière uniformisée de la Ville est de 200 $. Si les dépenses de la Ville sont toujours de 100 $, les trois premiers bâtiments vont maintenant payer 1/8 de la facture au lieu de 1/4, soit 12,50 $, alors que la propriété qui a pris beaucoup de valeur va devoir payer les 5/8 des dépenses de la Ville, soit 62,50 $.
Date de référence au marché
L’évaluateur tient compte des conditions du marché immobilier telles qu’elles existaient 18 mois avant l’entrée en vigueur du rôle d’évaluation, laquelle a toujours lieu un 1er janvier. À titre d’exemple, si le rôle d’évaluation foncière de votre municipalité est entré en vigueur le 1er janvier 2014, l’ensemble des valeurs inscrites a été établi en fonction des conditions du marché immobilier au 1er juillet 2012.
Source : L’évaluation foncière de votre propriété (document du gouvernement du Québec), 2014
Infographie
10 milliards de $ : montant prélevé annuellement au Québec par le biais des taxes foncières
1,5 milliard de $ : taxes scolaires prélevées par les commissions scolaires au Québec chaque année
Source : L’évaluation foncière de votre propriété (document du gouvernement du Québec), 2014
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