Des dizaines de milliers de partisans de Moqtada Sadr tiennent la traditionnelle prière du vendredi dans la Zone verte ultrasécurisée à Bagdad, nouvelle démonstration de force de l’influent politicien en passe d’obtenir de ses rivaux des législatives anticipées, sous certaines conditions.
Depuis fin juillet, des milliers de manifestants sadristes campent dans l’enceinte du Parlement dans cette Zone verte, nom du luxueux quartier bouclé en plein cœur de la capitale, abritant également institutions étatiques et ambassades.
Le sit-in a débuté pour protester contre une candidature au poste de Premier ministre présentée par les adversaires de M. Sadr, les puissantes factions chiites pro-Iran du Cadre de Coordination.
Réclame la dissolution du Parlement et des élections législatives anticipées
Capitalisant sur sa capacité à mobiliser les foules, le leader chiite Moqtada Sadr a accentué la pression sur ses rivaux, réclamant la dissolution du Parlement et des élections législatives anticipées, moins d’un an après le dernier scrutin d’octobre 2021 qu’il avait remporté haut la main.
Ses adversaires au sein du Cadre de coordination, alliance de puissantes factions chiites pro-Iran, lui ont rapidement répondu, se disant ouverts à des élections anticipées mais réclamant à demi-mot la fin du sit-in au Parlement.
Vendredi, trois semaines après une mobilisation ayant attiré des centaines de milliers de personnes à Bagdad, des dizaines de milliers de partisans de M. Sadr ont afflué vers une vaste esplanade de la Zone verte pour participer à la traditionnelle prière musulmane de la mi-journée.
Se protégeant du soleil avec des parasols par une chaleur de 46 degrés Celsius et brandissant des drapeaux irakiens et des portraits de Sadr, les hommes -et quelques femmes– se sont installés sur leur tapis de prière.
« Une prière d’un million d’hommes »
« Oui, oui à la réforme », « non, non à la corruption », ont scandé les fidèles durant le sermon.
« La prière du jour sera une prière d’un million d’hommes », espère Qassem Abou Moustafa, fonctionnaire de 40 ans: « c’est une épine (dans le pied) de l’ennemi, pour réclamer élections et réformes ».
Près de sculptures de sabres sur l’esplanade, cheikh Ali al-Atabi, 38 ans, veut aider M. Sadr à réaliser ses objectifs. « Quand il veut utiliser le peuple pour une cause, il appelle à une prière bénie du vendredi et unifie les rangs des musulmans (…). »
Dix mois après les législatives, l’Irak attend toujours la désignation d’un nouveau Premier ministre et d’un président de la République, sur fond de querelles politiciennes.
Le scrutin d’octobre 2021 avait été remporté par le Courant sadriste, qui représentait le premier bloc avec ses 73 députés, au sein d’un Parlement fragmenté où aucun camp n’a réussi à construire une majorité claire parmi les 329 élus.
La tâche de former un gouvernement
N’étant pas parvenu à rassembler cette majorité pour nommer un Premier ministre, M. Sadr a fait démissionner ses députés en juin, abandonnant à ses adversaires la tâche de former un gouvernement.
Mercredi, lors d’une allocution télévisée, il a réclamé des législatives anticipées.
« Je suis certain que la majorité de la population est exaspérée par la classe dirigeante dans son intégralité, y compris certains (politiciens) appartenant à mon Courant », a reconnu Moqtada Sadr, dont la puissante milice avait combattu les forces américaines après l’invasion de 2003.
Qu’importe si des fidèles à Moqtada Sadr occupent également les plus hauts échelons dans les ministères. Ses partisans le voient comme une figure de l’opposition et un héraut de la lutte contre la corruption.
Une dissolution du Parlement doit être actée par un vote à la majorité absolue et peut être demandée par un tiers des députés, ou par le Premier ministre avec accord du président de la République.
Les adversaires de M. Sadr –qui entretient des relations en dents de scie avec l’Iran chiite– lui ont répondu tard jeudi soir.
« Le Cadre de coordination affirme son soutien à toute voie constitutionnelle pour résoudre les crises politiques et agir dans l’intérêt du peuple, y compris des élections anticipées », a indiqué un communiqué de cette alliance.
Mais toute élection doit se tenir « après avoir atteint un consensus national sur la question et dans un environnement sûr », a-t-elle souligné.
Cette alliance regroupe notamment les anciens paramilitaires du Hachd al-Chaabi, intégrés aux forces régulières ainsi que le parti de l’ex-Premier ministre Nouri al-Maliki.
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