Pendant plusieurs années, deux employés de la Banque de France ont réussi à dérober des liasses de billets usagés destinés à être détruits. La Banque de France a fait appel aux autorités qui ont arrêté les deux complices qui ont tout avoué. En tout, ils auraient détourné ainsi entre 3,4 et 7,4 millions d’euros.
Pendant des années, René Marlas et Jean-Pierre Gaude sont parvenus à tromper la surveillance de la broyeuse de la papeterie de Vic-le-Comte, dans le Puy-de-Dôme. Suite au signalement de comportements suspects en 2014 par une employée de l’imprimerie de Chamalières, les deux employés ont tout d’abord fait l’objet d’une enquête interne. Arrêtés puis condamnés en février dernier, les deux voleurs sont passés aux aveux et ont expliqué l’organisation avec laquelle ils ont pu tromper les sept caméras de vidéosurveillance et les contrôleurs présents dans la salle forte du site, classée zone de haute sécurité.
Jean-Pierre Gaude, CAP de tapissier-décorateur en poche, est entré à la Banque de France en 1983 comme agent de service. René Marlas, ancien sapeur-pompier, entre dans la maison en 1989. Ils touchent respectivement 2500 et 3000 euros, des salaires plus élevés que la moyenne pour la région… mais cela ne suffisait pas.
Sur le site de Vic-le-Comte, la Banque fabrique ses coupures, mais se débarrasse aussi du papier fiduciaire usagé : chaque année, ce sont 400 palettes, chacune contenant entre 30 et 45 sacs de billets, qui y sont expédiées pour être détruites. Dans un vaste hangar très sécurisé, un chariot élévateur achemine les sacs de billets dans un broyeur. Il reste parfois des déchets, et un jour, René Marlas surprend Jean-Pierre Gaude en train de déposer un paquet de billets de 20 euros dans la cage à déchet. « Je t’ai vu, il va falloir partager », lui adresse-t-il. Leur association débute.
Au fil du temps, les deux complices affinent leur stratégie : pendant que l’un détourne l’attention des contrôleurs, l’autre planque des liasses de billets en les enfouissant dans des films d’emballage mélangés aux déchets. Dans une salle adjacente à la « Serre », ils partagent leurs butin et l’exfiltrent du site.
Un jour, un agent des contrôles signale le comportement suspect du binôme à ses supérieurs durant les séances de nettoyage, mais les deux complices ne seront pas plus inquiétés. Le manque de personnel disponible sur place amène la hiérarchie à dépêcher de nouveaux employés sur le site.
Le 7 juillet 2014, une employée de l’imprimerie de Chamalières observe qu’un sac manque sur une palette. Surprise, elle retrouve ce sac à l’intérieur d’une cage grillagée destinée à stocker les emballages plastiques. Dans le sac, 10 paquets de 1000 billets de 100 euros destinés à être détruits. René Marlas lui prend le sac des mains, le jette dans la fosse. Mais ce qu’elle n’a pas vu, c’est qu’un second sac manquait et que celui-ci était déjà sur le point d’être exfiltré.
Elle évoque le problème à ses supérieurs, Marlas explique avoir fait une « connerie par mégarde ». En réalité, la Banque a déjà diligenté une discrète enquête interne pour faire la lumière sur les agissements du binôme.
Le visionnage des vidéos de surveillance révèlera que sur les douze derniers mois, la paire de complices aura détourné l’équivalent de quatre sacs, soit entre 2,8 et 4,1 millions d’euros. Le 28 août, ils sont arrêtés puis avouent. Dans le jardin de Jean-Pierre Gaude, les enquêteurs découvrent un bagage bourré de liasses de billets de 100 euros. Un « trésor » dont le montant s’élève à 500 000 euros.
Une autre perquisition menée chez la proche d’une amie de René Marlas mettra à jour la somme d’1,3 million d’euros, dissimulés dans une boîte. Les deux complices ont dépensé leur argent : René Marlas a investi entre autre dans une cuisine, une piscine, des voyages aux tropiques, une réserve de bouteilles, des coffres-forts, alors que Jean-Pierre Gaude a payé une BMW à son fils.
Les enquêteurs découvrent aussi un comportement suspect envers leur banque. L’examen des relevés bancaires indique que les retraits d’argent liquide aux guichets s’espacent, puis s’arrêtent, alors que les dépôts d’espèces grimpent en flèche. « Ces éléments permettent d’objectiver que les couples Gaude et Marlas avaient subitement disposé de liquidités pour payer les dépenses de la vie courante et pour être portées au crédit de leurs comptes », expliquent-ils.
De nouveaux visionnages démontrent de nouvelles « anomalies » lors de cinq opérations de destruction de billets. Impossible de consulter plus d’archives au-delà de 2012, celles-ci ayant été supprimées en vertu de la loi. Cependant, la valeur totale du butin dérobé s’élèverait désormais entre 3,4 et 7,4 millions d’euros. D’après une source proche de l’enquête, « on ne saura jamais quand ils ont commencé et combien ils ont détourné exactement ».
Ils ont été condamnés en février à cinq ans d’emprisonnement, dont trente mois avec sursis, et leurs biens ont été confisqués. Ils sont comparus à nouveau en octobre devant la cour d’appel de Riom. L’avocat des accusés a plaidé en dénonçant les défaillances de sécurité du site. «Il m’apparaît relativement facile de voler […] Il suffit que l’on sorte avec son plastique sous le bras», a confirmé la présidente du tribunal. La chambre des appels correctionnels, qui devait rendre son arrêt ce mercredi 13 décembre, a décidé de proroger son délibéré au 17 janvier 2018.
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