Édito – Toutes les gauches européennes la haïssent comme en son temps Madame Thatcher. Angela Merkel est pour toutes les extrêmes-gauches – et même un peu plus loin – un totem à abattre parce qu’à la tête de la première économie européenne, et parce qu’inflexible sur la question de rigueur budgétaire. Ses positions sur la dette grecque lui ont valu d’être caricaturée en soldat nazi et en bien d’autres choses, conspuée comme une manifestation de l’inhumanité des États face à la souffrance des peuples. En France, notre bruyant « parti de gauche » se construit sur l’opposition au « diktat » allemand, avec des allusions à peine cachées à la puissance du IIIe Reich.
Pour attaquer la décision de Madame Merkel d’ouvrir grand les portes de l’Allemagne aux réfugiés syriens, Jean-Luc Mélenchon était donc un peu en panne. Décision « opportuniste », a tenté le patron du parti en évoquant le déficit démographique allemand. Ce n’est pas ce que semblent penser les adversaires politiques d’Angela Merkel, et jusqu’à certains dans son propre parti comme l’ancien ministre de l’Intérieur Hans-Peter Friedrich, qui estiment que la chancelière a ouvert une période d’immense incertitude pour l’Allemagne, porteuse d’autant de risques que celle de la fin de la RDA. Réponse de la bergère dans un entretien au Rheinische Post : « Le droit fondamental d’asile pour les victimes de persécution politique n’a pas de limites ». L’Allemagne y réservera 6 milliards d’euros dans ses deux prochains budgets.
Angela Merkel est, en deux semaines, devenue une sainte aux yeux de tous les réfugiés – grand moteur économique de l’Europe, l’Allemagne devient in-dis-cu-ta-ble-ment son moteur politique en agissant avant tous les autres, et prend une ampleur diplomatique sans précédent. La vision d’une Merkel angélique et idéaliste est incomplète si on compte que dans le même temps qu’elle répond à cette situation d’urgence, elle appelle à une collaboration renforcée avec la Russie pour résoudre le conflit syrien à la source, met tout son poids pour obtenir la création d’une armée continentale européenne en faisant lever le veto de la Grande-Bretagne, et maintient avec la même fermeté son refus de l’immigration économique.
En juillet dernier, la chancelière avait été qualifiée d’inhumaine lorsqu’elle avait répondu – devant caméras – à une fillette libanaise en pleurs qu’elle ne pourrait rester en Allemagne si la demande de sa famille avait été rejetée – parce que son pays n’était pas en guerre. Devant caméras, un président français aurait probablement assuré qu’il allait « s’occuper personnellement de la situation ». La force de madame Merkel est peut-être son pragmatisme et son ancrage dans le respect d’un principe de justice, indépendamment du prix de celui-ci. Cela peut, comme lorsqu’elle a très ouvertement critiqué la Chine pour son non-respect des droits de l’homme, coûter des parts à l’export ; cela peut, comme lorsqu’elle a été inflexible lors des négociations sur la dette souveraine, coûter des points d’image et, quand il faut accueillir des réfugiés, des points de croissance. Mais cela finit toujours par être récompensé.
Chaque pays n’aurait-il que les dirigeants qu’il mérite ? Les lourdes leçons de l’histoire ont fait des Allemands un peuple fort, qui a survécu au communisme, a su se rassembler et passer toutes les difficultés post-RDA, et garde, plus de 60 ans après, la cicatrice profonde d’avoir porté le pouvoir nazi. L’accueil et l’aide aux réfugiés a spontanément et massivement commencé sur le terrain par les Allemands eux-mêmes ; la chancelière – les représentants – a suivi par une décision politique. Il y a longtemps déjà, les Chinois avaient désigné l’Allemagne par deux caractères signifiant « le pays de la vertu » – nous en trouvons de plus en plus d’exemples.
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