Le moteur provient d’une grosse fraiseuse, la toile des ailes sert normalement à faire des sacs, les roues sous le cockpit sont empruntées à un tuk tuk : un vendeur de pop-corn pakistanais affirme avoir fabriqué un avion low-cost, pour l’instant cloué au sol.
La nouvelle, sortie dans la presse le 1er avril dernier, semblait relever du canular. Après l’homme qui faisait rouler les voitures à l’eau, et le colosse qui était plus fort qu’un tracteur, le Pakistan s’était trouvé un nouveau Géo Trouvetou, autodidacte, capable de faire voler un engin à l’aérodynamique et à la propulsion rudimentaires.
L’histoire de Muhammad Fayyaz s’apparente pourtant à un conte de fées, mais sans fin heureuse à ce stade. Son père meurt alors qu’il est au collège, le forçant à abandonner l’école et à multiplier les petits boulots pour nourrir sa mère, ses quatre sœurs et son frère, raconte à l’AFP ce moustachu de 32 ans, au regard confiant. Faute d’avoir achevé son éducation, il doit abandonner son rêve d’entrer dans l’armée de l’air pakistanaise.
Des années plus tard, Muhammad Fayyaz décide pourtant de tout mettre en oeuvre pour assembler son propre avion, dans l’espoir d’être remarqué par les militaires. La nuit, il est alors agent de sécurité. De jour, il se mue en vendeur de pop-corn. Quand il ne dort pas, il travaille le reste du temps sur son projet. « Je voulais gagner autant d’argent que possible », se souvient-il, tout en désignant sa création, un petit aéronef bleu au nez blanc, à l’apparence aussi fragile que rustique.
Une émission d’enquête sur les crashs aériens, diffusée sur la chaîne National geographic, lui enseigne « les mécanismes requis par le vol d’un avion », narre-t-il. Le plan de l’aéronef, qu’il dit avoir modifié, est glané sur internet dans un cybercafé de la ville voisine de Pakpattan, près de son village de Tabur. La construction prendra plus de deux ans. Mohammad Fayyaz raconte avoir vendu un lopin de terre appartenant à sa famille, et contracté un crédit de 50.000 roupies (300 euros) pour y parvenir.
« Je n’arrêtais pas de lui dire de s’arrêter et de se concentrer sur sa famille et son travail, qu’il devenait fou pour rien. Mais il ne m’a pas écoutée », se souvient sa mère, Mumtaz Bibi, qui ne cache pas sa « fierté » aujourd’hui. Car après plusieurs essais infructueux, Mohammad Fayyaz affirme avoir réussi un premier vol en février, qui l’a vu décoller sur une route que ses amis avaient préalablement fermée à la circulation.
L’engin, qui a atteint 120 km/h avant de décoller, « est resté suspendu à 70 cm du sol pendant deux à trois kilomètres avant d’atterrir », affirme Ameer Hussain, un témoin, qui affirme avoir roulé à moto à côté de l’avion. L’AFP n’a toutefois pu voir aucune vidéo de l’événement et n’a pu en obtenir aucune confirmation officielle. Après ce premier succès, Mohammad Fayyaz a voulu dévoiler sa création aux habitants de son village.
Le baptême public devait se tenir, le 23 mars dernier, jour de l’Indépendance pakistanaise. Des centaines de personnes observaient le passionné, drapeau national à la main, se diriger vers son avion. Mais tout a déraillé. Avant même que Mohammad Fayyad ne démarre le moteur, au grondement rappelant celui d’une tondeuse à gazon, la police l’a arrêté et a confisqué son avion.
« Je me suis senti comme la pire personne du Pakistan, comme une sorte de voleur, regrette-t-il. J’ai été enfermé avec des criminels. » La justice l’a finalement libéré contre 3.000 roupies (environ 19 euros) d’amende. Faute d’autorisation de vol, son avion constituait « une menace pour la sécurité », observe un policier présent. L’engin lui a toutefois été rendu « en geste de bonne volonté », note-t-il. « S’il obtient une licence, il sera libre de voler avec. »
Dans son malheur, Muhammad Fayyaz a toutefois gagné une grande couverture médiatique et une forte reconnaissance sur les réseaux sociaux. Un internaute l’a qualifié sur Twitter de « héros », de « source d’inspiration ». Un autre l’a comparé au milliardaire américain « Elon Musk ». L’ingénieux vendeur de pop-corn, qui espère toujours rejoindre l’armée de l’air, a alors reçu la visite de deux de ses représentants.
Si aucune offre de recrutement ne lui a été faite, le commandant d’une base aérienne voisine lui a délivré un « certificat d’honneur ». Sa « passion » et sa « dextérité » y sont soulignées. Tout comme sa capacité à « construire un mini-avion basique ».
D.C avec AFP
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