Exigences du haut niveau ou « maltraitance » ? Quinze mois de prison avec sursis ont été requis vendredi contre un responsable du pôle France de gymnastique de Marseille pour harcèlement moral, après les plaintes de jeunes sportives illustrant les questionnements autour d’un sport secoué par plusieurs scandales.
« Les méthodes mises en œuvre pour accompagner les athlètes de haut niveau dans un dépassement de soi doivent connaître les limites de la loi », a lancé la procureure Véronique Fabron dans son réquisitoire, demandant qu’une interdiction d’exercer son métier « dont elle a laissé la durée à l’appréciation du tribunal », soit également prononcée à l’encontre de Vincent Pateau, visé par les plaintes de cinq jeunes filles, toutes mineures au moment des faits.
« C’est très bien que ces méthodes d’entraînement fassent leur entrée dans le prétoire. C’est un morceau d’omerta qui s’est levé devant le tribunal », a estimé la magistrate, au tribunal correctionnel de Marseille. Brimades, remarques sur le poids, moqueries, propos grossiers ou blessants : dans leurs plaintes, les cinq jeunes sportives ont décrit ce qu’elles vivaient comme une « atmosphère de terreur », « selon les mots prononcés vendredi à la barre par Coline » au pôle France de Marseille, une structure de haut niveau où les jeunes gymnastes entraient souvent avec le rêve de disputer les jeux olympiques.
Une « atmosphère de terreur »
« Le plus dur, c’est les mots qui me restent, t’ « es une faible, t’es une moins-que-rien ». Ils m’ont fait perdre l’estime de moi », a déclaré Coline, aujourd’hui âgée de 17 ans. Décrivant sa « boule au ventre » avant d’aller à l’entraînement, la faim endurée pendant les stages, elle assure pourtant « aimer la rigueur de la gym » et avoir retrouvé le plaisir dans une autre structure de haut niveau, à Dijon. Juste derrière elle, sur le banc des prévenus, Vincent Pateau, 44 ans, polo bleu marine, cheveux courts et barbe de trois jours. Directeur technique du pôle France de Marseille, il encourt deux ans d’emprisonnement et 30.000 euros d’amende.
« La dureté de ce sport à ce niveau-là »
Tout en reconnaissant des « erreurs », de la « maladresse » parfois, il nie les propos que lui prête Coline, met en avant « la dureté de ce sport à ce niveau-là » et se défend pied à pied face à la présidente Julie Delorme.
Les pesées, deux fois par semaine, et les remarques fréquentes sur le poids de certaines jeunes filles ? Les pesées sont moins fréquentes et plus discrètes, assure-t-il. « Ce n’est pas bien de peser les gymnastes, mais ça, on ne le changera pas : on est dans un sport artistique, elles se présentaient en justaucorps devant parfois 30.000 personnes », poursuit-il, évoquant aussi la nécessité de surveiller le poids pour prévenir les blessures. Les insultes, les propos grossiers, les cris ? « À aucun moment je n’ai insulté une gymnaste en face-à-face », assure Vincent Pateau, mettant sa vulgarité sur le compte du « langage du quotidien ».
Difficile de faire la part des choses entre les « exigences et la maltraitance »
Quelques parents avaient fini par s’inquiéter de ces méthodes. « On était conscient que c’était un sport particulièrement exigeant et éprouvant, c’est pour ça que c’est difficile de faire la part des choses entre les exigences et la maltraitance », résume la mère d’une autre plaignante. » Les enfants sont en souffrance pour des raisons qui ne sont pas seulement dues à M. Pateau », leur a répondu dans sa plaidoirie son avocat, Jérôme Veyrat-Girard. « Beaucoup d’enfants ont des rêves, ils sont très brillants, mais quand on voit le niveau d’exigence, il leur manque un petit quelque chose qui fait qu’on ne peut pas devenir championne olympique », a-t-il poursuivi, demandant la relaxe de son client.
Le jugement a été mis en délibéré au 4 mai.
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