Le Parlement australien a finalement adopté jeudi la loi destinée à obliger les géants de la tech à payer en échange de leurs contenus d’actualité et qui, depuis des mois, suscite l’attention de gouvernements du monde entier.
Première législation de ce type, elle a été adoptée sans difficulté après que le gouvernement a accepté de faire des compromis sur les points auxquels étaient farouchement opposés les mastodontes qui dominent internet.
Quelques jours avant ce vote, Facebook et Google avaient cependant déjà fini par passer des accords avec différents médias australiens.
Référence sur le reste de la planète
La manière dont les deux parties ont réussi à transiger devrait, à l’avenir, faire référence sur le reste de la planète, au moment où les groupes numériques sont dans le collimateur de gouvernements qui veulent les contraindre à payer les contenus médiatiques qu’ils diffusent sur leurs plateformes.
La loi va garantir aux groupes de presse, en grandes difficultés financières, « une rémunération équitable en échange du contenu qu’elles génèrent, contribuant ainsi à soutenir le journalisme d’intérêt public en Australie », a affirmé le gouvernement.
Google a déjà négocié des accords portant sur des millions de dollars avec les deux principaux groupes de presse australiens: News Corp. de Rupert Murdoch et Nine Entertainment.
De son côté, Facebook, encore plus réticent, était allé jusqu’à bloquer temporairement les contenus d’actualité pour manifester sa désapprobation. Il a fini en début de semaine par signer un premier accord avec le puissant groupe Seven West et d’autres négociations seraient en cours.
Des accords avec les médias locaux
Tant que ces accords avec les médias locaux seront en vigueur, l’intervention d’un arbitre indépendant australien, susceptible de leur infliger de lourdes amendes, ne sera pas imposée aux géants du numérique.
Les médias australiens percevront ainsi des millions de dollars de Google et Facebook. De leur côté, les géants du numérique ont ainsi la garantie de ne pas payer des sommes plus élevées que celles sur lesquelles ils se seront entendus avec les médias.
Ces accords ouvrent une brèche sur la question de la rémunération du contenu provenant de médias par ces deux géants, qui comptent parmi les entreprises les plus rentables du monde en agrégeant le contenu provenant d’autres sources.
Domination des géants de la tech
Facebook et Google ont chacun promis d’investir environ un milliard de dollars dans les contenus d’actualité sur les trois prochaines années.
Google a aussi promis de payer les éditeurs de presse afin d’utiliser leurs contenus dans un nouvel outil baptisé Google News Showcase, tout comme Facebook pour ceux qui apparaitront dans « News », un produit devant être déployé dans les prochains mois en Australie.
Cette loi est considérée comme la première dans l’âpre bataille que se livrent les géants de la tech et les autorités régulatrices nationales.
Ces groupes numériques, qui ne sont soumis à presque aucune règlementation, ont commencé à être pointés du doigt par un organisme australien chargé de la défense des consommateurs qui s’est penché sur la domination de Google et de Facebook dans le secteur de la publicité en ligne.
Sur 100 dollars de publicité dépensés par les entreprises australiennes, 49 vont à Google et 24 à Facebook, selon l’autorité australienne de la concurrence.
Une large partie des recettes publicitaires tombant dans les poches de ces géants du numérique, le secteur des médias a été contraint de supprimer des milliers d’emplois en Australie au cours de la dernière décennie.
De leur côté, les détracteurs de cette loi estiment qu’elle vise à sanctionner les entreprises innovantes et à prélever de l’argent pour les médias traditionnels, proches du pouvoir politique.
Certains ont également pointé les liens étroits entre le groupe News Corp de Rupert Murdoch et le gouvernement conservateur australien.
S’exprimant au sujet de la première mouture de la loi, Nick Clegg, le responsable des affaires publiques de Facebook, a estimé jeudi que « Facebook aurait été forcé de payer potentiellement des sommes illimitées à des conglomérats de médias multinationaux ».
Pas de garantie pour financer les médias
Mais la loi australienne finalement adoptée ne garantit pas que l’argent récolté suffira à financer le journalisme et à sauver des médias australiens.
Aujourd’hui, « les revenus de la publicité vont à Google et Facebook, et nous n’avons pas de modèle pour financer les médias d’information à l’avenir », a ainsi écrit dans un récent blog John Quiggin, économiste à l’Université du Queensland The Conversation.
« Nous pourrions avoir besoin d’un financement public direct, peut-être financé par une taxe sur la publicité. En attendant, obliger Google et Facebook à payer pour les liens n’est pas une solution particulièrement satisfaisante, mais c’est la meilleure que nous ayons », selon lui.
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