Viktoria Tsouranova s’immerge dans le bassin creusé dans l’épaisse couche de glace qui recouvre le fleuve, esquisse quelques brasses et lance un grand sourire au photographe venu immortaliser la prouesse pour son compte Instagram.
Avec les membres de son club de la banlieue de Moscou, cette blogueuse appartient à une nouvelle génération de « morses », ces Russes endurcis amateurs de bains dans les rivières et les lacs gelés pendant l’hiver, dans de l’eau où la température ne dépasse pas les 4° Celsius. Depuis des décennies, cette pratique a été associée à une image virile d’homme fort et le plus souvent d’âge mûr.
Mais désormais de jeunes Russes, à l’image de Viktoria Tsouranova, s’emparent de cette tradition pour en faire une activité branchée aux sensations fortes, en plein air, et présentée comme bonne pour la santé, bien que les médecins soient partagés sur ce point. « Un mode de vie sportif, c’est tendance », assure Nikolaï, autre membre du club « Morses de la capitale », en buvant du thé d’églantier avec du miel. Il vient de se plonger dans un bassin en forme de L creusé dans la glace de la rivière Moskova, par des températures relativement douces de -2° Celsius.
Viktoria Tsouranova, une blogueuse spécialisée dans le fitness, met en ligne une photo et une vidéo de sa séance de natation glaciale pour les plus de 100.000 abonnés de son compte Instagram. « Je suis intéressée par ce qui est extrême, par le fait de tester des choses par moi-même. Chaque fois, j’ai peur », confie-t-elle, en tremblant légèrement dans son manteau de fourrure enfilée après la plongée.
Elle assure ne jamais tomber malade en hiver grâce à cette pratique. Et « c’est aussi un super moyen d’empêcher l’apparition de graisse et de cellulite », affirme-t-elle. Plus nuancée, la Fédération russe de natation d’hiver, basée à Tioumen, en Sibérie, souligne que nager dans l’eau glaciale est bénéfique pour les articulations et la peau. Mais elle prévient aussi que les personnes ayant un cœur faible ou des problèmes de respiration ne doivent pas s’y risquer.
Selon une étude réalisée par des scientifiques de Tioumen en 2015, après dix ans de pratique, cela devient même dangereux pour la santé. Cette activité, pratiquée dans les pays nordiques et en Chine, est particulièrement populaire en Russie où l’eau glaciale est considérée comme un moyen d’endurcir le corps. Des millions de croyants orthodoxes russes se plongent aussi dans l’eau glaciale chaque année à l’occasion de l’Epiphanie, célébrée le 19 janvier.
Le club des « Morses de la Capitale » dispose d’équipements spartiates – une cabane aux murs verts abritant de petits vestiaires chauffés par des poêles, ce qui n’empêche pas ses membres de participer à des compétitions internationales, où des nageurs s’affrontent dans des lignes d’eau glaciale. Star du club moscovite, Osman Delibach, 26 ans, a gagné plusieurs médailles pour avoir nagé des distances atteignant un kilomètre par des températures extérieures négatives.
Elle a par ailleurs enregistré récemment une vidéo où elle reste assise pendant une heure… dans une mare gelée de son jardin. Une association russe a reconnu cette prouesse comme le record du plus long séjour dans l’eau glaciale pour une femme. Osman Delibach, qui forme les soldats à se familiariser à des températures extrêmes, se promène dans la neige en peignoir, les jambes nues: « L’eau, c’est mon élément, surtout l’eau glaciale », affirme-t-elle.
Son entraîneuse, la fondatrice du club Natalia Seraïa, distribue les certificats à un groupe de nouveaux « morses » réunis dans la cabane. « Rien ne renforcera votre immunité plus que l’eau glaciale », assure-t-elle. « C’est un chemin menant à une bonne santé et à de longues années de vie active. »
Dans l’immédiat, ses élèves retiennent surtout les bienfaits psychologiques de cette expérience. Après son premier bain, Tatiana Batalova évoque le sentiment d’une « purification ». « C’est comme si on relançait sa machine en partant de zéro », dit-elle. Natalie Seraïa, elle, assure se sentir pousser « des ailes » lorsqu’elle sort de l’eau: « On a chaud, on est joyeux… on pourrait appeler cela de l’euphorie ».
D.C avec AFP
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