Malgré la montée des condamnations internationales, le Venezuela du président Nicolas Maduro conserve assez d’appuis pour éviter ou freiner des sanctions de l’ONU, de l’Organisation des États Américains (OEA) ou de l’Union européenne, soulignent les analystes.
Par affinité idéologique, pour des raisons stratégiques ou économiques, de nombreux pays se refusent encore à rompre avec un gouvernement tenu pour responsable d’une crise qui a fait 125 morts en quatre mois.
Réunis mardi au Pérou, onze pays d’Amérique latine et le Canada ont condamné une « rupture de l’ordre démocratique » au Venezuela après l’élection le 30 juillet d’une assemblée constituante qui se substitue au parlement contrôlé par l’opposition.
Mais cette réunion ad hoc à Lima met en évidence la paralysie de l’OEA, organisation de 34 pays des Amériques qui, faute de consensus, n’a pas pu prendre d’initiative face à la crise vénézuélienne.
Cuba, la Bolivie et le Nicaragua restent des alliés inconditionnels du Venezuela, dont ils partagent l’idéologie et le discours « anti-impérialiste » contre les États-Unis.
« Ce sont eux qui serrent les rangs » avec Caracas, a expliqué à l’AFP Anna Ayusa, experte de l’Amérique latine au think tank CIDOB basé à Barcelone.
D’autres « ont du mal à rompre avec l’héritage de Hugo Chavez (le précédesseur de Maduro) qui les subventionne via Petrocaribe », une alliance du Venezuela avec une quinzaine de pays des Caraïbes auxquels il livre du pétrole à prix réduit, a ajouté Paul Hare, ancien ambassadeur britannique à Cuba et professeur à l’Université de Boston.
Chine et Russie
Caracas bénéficie aussi de l’appui de la Chine et de la Russie, qui peuvent mettre leur veto à des sanctions du Conseil de sécurité de l’ONU. Tous deux ont « des intérêts financiers ou stratégiques au Venezuela », développés surtout sous Hugo Chavez (1998-2013), rappelle Michael Shifter, président du Dialogue interaméricain, un groupe de réflexion à Washington.
« La Chine veut conserver un accès aux réserves pétrolières du Venezuela », explique-t-il.
« Le soutien décisif est celui de la Chine », ajoute Anna Ayuso. « Elle a investi plus de 60 milliards de dollars et accordé des prêts à Caracas en échange de pétrole et de concessions minières. C’est Maduro qui garantit ses investissements ».
La Russie n’a pas seulement investi plus de 20 milliards de dollars dans un pays que son président Vladimir Poutine qualifie de « partenaire stratégique clé ». Elle est devenue aussi un fournisseur d’équipement militaire depuis que Washington a décidé en 2006 un embargo sur les ventes d’armes à Caracas.
Le ministère russe des Affaires étrangères a sévèrement critiqué lundi l’opposition, qui « non seulement n’a pas répondu à l’appel à participer à l’élection (de l’assemblée constituante), mais a tenté de la perturber en provoquant des affrontements sporadiques qui ont mené à des pertes en vies humaines ».
L’Iran aussi, allié de Caracas au sein de l’OPEP pour soutenir un prix élevé du pétrole, a apporté son soutien à l’élection de l’assemblée constituante la semaine dernière et dénoncé « les sanctions unilatérales imposées par les États-Unis contre le Venezuela ». Mais les liens sont moins étroits aujourd’hui qu’entre Hugo Chavez et l’ex-président ultraconservateur populiste Mahmoud Ahmadinejad.
L’Union européenne a décidé de ne pas reconnaître l’assemblée constituante mais elle tarde à répondre aux appels de l’Espagne pour imposer des sanctions individuelles contre les responsables de la crise.
« Ceux qui sont le plus opposés sont le Portugal et la Grèce », croit savoir Carlos Malamud, de l’institut de recherche ElCano à Madrid.
Mais les deux pays le démentent.
Quelque 500.000 Portugais vivent au Venezuela. Le ministre des Affaires étrangères Augusto Santos Silva a souligné que Lisbonne prendrait toujours en compte leurs intérêts avant d’arrêter une décision. « Il ne faut pas sauter les étapes », a-t-il déclaré le semaine dernière.
À Athènes, où le parti Syriza au pouvoir avait des sympathies pour Hugo Chavez, un diplomate grec a souligné que « le sujet des sanctions n’a pas été officiellement proposé » à Bruxelles.
La fermeté de ces appuis internationaux dépendra de l’évolution de la situation au Venezuela, estiment les analystes.
« Il est parfaitement concevable que la constituante engendre plus de chaos et de répression, et le gouvernement de Maduro pourrait perdre encore plus d’amis », a déclaré M. Shifter.
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