Législatives : le temps des coalitions et le spectre d’une majorité introuvable

Par Germain de Lupiac
8 juillet 2024 07:17 Mis à jour: 8 juillet 2024 21:06

Arrivé en tête au premier tour des élections législatives, le Rassemblement national (RN) a dû faire face au second tour à un « front républicain » avec des désistements en cascade pour éviter des triangulaires qui auraient été à son avantage.

Selon les résultats définitifs des législatives publiés par le ministère de l’Intérieur, la coalition de gauche du Nouveau Front populaire (NFP) arrive en tête avec 187 sièges, devant Ensemble (159) et le Rassemblement national avec ses alliés (142 sièges).

La France se cherche maintenant une majorité parlementaire, car ni le NFP, ni le camp présidentiel, ni le RN ne peuvent atteindre les 289 députés nécessaires à la majorité absolue. Commence maintenant une phase de tractations intenses au sein de l’Assemblée pour trouver une nouvelle majorité.

L’heure des tractations pour une majorité relative

Après la remise de la démission de Gabriel Attal, la nomination du Premier ministre pourrait prendre du temps, dans l’attente d’un accord hypothétique entre plusieurs forces politiques sur un candidat pour Matignon et sur un programme.

Selon Stéphane Séjourné, le chef de l’État « attendra la structuration de la nouvelle Assemblée nationale pour prendre les décisions nécessaires ». Sans une partie de la gauche, les macronistes ne pourront pas gouverner. Mais sans une partie des macronistes, le NFP n’y parviendra pas non plus. Problème : le camp présidentiel a clairement fait savoir qu’il ne s’allierait pas avec La France insoumise, une hypothèse également balayée par le mouvement de Jean-Luc Mélenchon.

Lorgner du côté des Républicains (LR), qui ont très bien résisté avec une soixantaine d’élus malgré le ralliement de leur chef Eric Ciotti au RN, pourrait également s’avérer peine perdue : Laurent Wauquiez, de retour sur la scène nationale avec son élection en Haute-Loire, a prévenu qu’il « n’y aura ni coalition ni compromission » de la part de LR. Le moment pour Édouard Philippe du parti de centre-droit Horizons de proposer une coalition centrale avec le centre-droit et le centre-gauche autour de son parti et en prenant ses libertés du parti présidentiel.

Pour le politologue Martial Foucault (Cevipof), « cette alliance contre le RN aboutit à une forme de paradoxe institutionnel. Les électeurs se sont mobilisés, ont répondu à cet appel mais pour produire une France ingouvernable à ce stade ».

Le temps des concessions à gauche

À gauche, les dirigeants du Nouveau Front populaire vont devoir à nouveau surmonter leurs divergences, au cœur d’une alliance aussi large qu’hétérogène allant de Jean-Luc Mélenchon à Raphaël Glucksmann, de l’antifa fiché S Raphaël Arnault à l’ancien président François Hollande.

Le groupe d’extrême gauche des Insoumis reste le principal groupe à gauche, avec environ 75 députés contre une soixantaine aux socialistes en forte progression, une trentaine aux écologistes et une dizaine aux communistes.

Emmanuel Macron doit « ou bien s’en aller, ou nommer un Premier ministre » issu du Nouveau Front populaire, a lancé Jean-Luc Mélenchon à l’annonce des résultats. M. Glucksmann, lui, s’est montré plus modéré : « Il va falloir parler, il va falloir discuter, il va falloir dialoguer » face à cette Assemblée « divisée », a expliqué le président de Place publique, proche du Parti socialiste.

La France est-elle gouvernable ?

Il faudra attendre la fin des tractations qui peuvent prendre plusieurs jours pour savoir si la France va pouvoir être gouvernable et quelle majorité relative va en émerger.

En cas d’absence de majorité relative, le président Emmanuel Macron pourrait choisir de former un gouvernement technique, avec des profils sans étiquette politique pour faire passer des réformes a minima et éviter le blocage du pays. Un gouvernement qui sera de toute façon impopulaire et sous la menace d’une nouvelle dissolution dans un an.

Le patron du RN Jordan Bardella a estimé que la France allait « vers l’incertitude et l’instabilité » en raison de la « paralysie » à venir des institutions. Ce point de vue a été repris par d’autres responsables de son parti,  le vice-président Sébastien Chenu estimant que « le système [allait] se bloquer », car « les trois blocs » ont « très peu de différences » en termes de sièges. « Emmanuel Macron va gérer maintenant la situation qu’il a imposée aux Français [..] Je ne sais pas comment il va faire », commentait Marine Le Pen.

Selon l’ancien ministre de la Défense Hervé Morin, il serait assez baroque d’avoir une majorité relative à gauche à l’Assemblée et au gouvernement, alors que le pays a voté à droite. En effet, si la coalition du NFP est arrivée en tête en nombre de députés, elle est pourtant loin derrière le RN en termes d’électeurs, le RN et ses alliés réunissant 9,3 millions contre 5,1 pour le NFP.

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