Les éleveurs de bovins ont reproché mardi au gouvernement de s’être montré « ambigu » en poussant pour une baisse du coût de l’alimentation des Français au risque de détériorer les revenus des agriculteurs.
La colère qui s’exprime ces derniers jours sur les barrages routiers est « malheureusement assez logique », a estimé Patrick Bénézit, le président de la Fédération nationale bovine (FNB), association spécialisée du syndicat majoritaire FNSEA.
Un « double discours au niveau de l’État »
Alors que les éleveurs de vaches à viande figurent parmi les plus faibles revenus agricoles, il juge notamment que le gouvernement manque d’allant à faire appliquer les lois dites Egalim qui devaient assurer que les agriculteurs ne soient payés en deçà de leurs coûts de production. Il estime même que le ministre de l’Économie Bruno Le Maire « encourage les distributeurs à contourner » ces lois dans l’espoir de faire baisser les prix dans les rayons. « Parce que le discours que nous avons depuis plusieurs mois de la part de Bercy, c’est un discours qui vise à autoriser la grande distribution à faire une pression maximale sur les fournisseurs et donc à autoriser les fournisseurs à faire une pression maximale sur les producteurs », selon cet éleveur du Cantal, aussi deuxième vice-président de la FNSEA.
Les agriculteurs craignent une nouvelle fois de faire les frais des négociations commerciales qui se jouent actuellement entre les enseignes de supermarchés et leurs fournisseurs de l’industrie. Tirer les tarifs vers le bas, font-ils valoir, c’est prendre le risque de dégrader, en bout de chaîne, le revenu des agriculteurs.
La question de la marge à chaque étape du maillon de la chaîne du producteur au distributeur final, revient à nouveau sur le devant de la scène. Pour Philippe Moati interrogé par BFMTV, professeur d’économie à l’université Paris Diderot et directeur de recherche au Credoc, on ne peut pas incriminer seulement la grande distribution et il faut tenir compte des disparités importantes selon les produits. » Là où le concurrence est très forte et où ils (les distributeurs ndlr) sont obligés de mettre des prix très bas – notamment sur les produits de grandes marques, très visibles dans les prospectus et que l’on trouve à l’identique d’un magasin à l’autre – les marges sont extrêmement faibles. Donc, forcément, ils se récupèrent davantage sur les produits plus difficiles à comparer d’une enseigne à une autre – notamment les produits frais, les fruits et légumes, la viande, etc. » Une solution pour maximiser le revenu des agriculteurs consiste à réduire les intermédiaires et à fonctionner en circuits courts. Ainsi comme le rapporte la Dépêche, l’enseigne Toujust, une coopérative qui associe une centaine de fournisseurs à son capital, s’implante à Alès dans le Gard le 1er mars avec le but de vendre jusqu’à 10 % moins cher que la grande distribution.
Plus tôt dans la journée, lors d’un rendez-vous organisé par l’Association des journalistes économiques et financiers, le président de la FNSEA Arnaud Rousseau avait aussi évoqué un « double discours au niveau de l’État ». « On ne peut pas avoir un ministre de l’Économie qui nous dit “Il n’y aura pas de pression sur les matières premières agricoles” et qui explique toute la journée qu’il faut juguler l’inflation alimentaire », a-t-il estimé.
La FNB a par ailleurs évoqué une « déception extrêmement forte » : Bruno Le Maire, ministre de l’Agriculture de 2009 à 2012, avait annoncé une mesure de défiscalisation pour les éleveurs de bovins en octobre, au grand salon auvergnat de l’élevage. L’organisation dénonce un « effet d’annonce » et juge cette mesure « inapplicable en l’état ». « Venir faire des annonces dans les salons sans suivi d’effet, c’est le type de comportement qui est désastreux » auprès des agriculteurs, a tancé M. Bénézit.
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