MOYEN-ORIENT

Les nouveaux dirigeants syriens traquent les partisans d’Assad, des centaines de civils auraient été tués

L'Observatoire syrien des droits de l'homme a fait état de quelque 745 civils tués ces derniers jours, alors que le nouveau gouvernement syrien s'impose dans le nord-ouest du pays
mars 10, 2025 15:55, Last Updated: mars 10, 2025 20:03
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Les communautés alaouites de Syrie se préparent à essuyer les représailles des nouveaux dirigeants de facto du pays, alors que des rapports indiquent que les forces du nouveau gouvernement ont tué des centaines de civils lors d’une répression croissante dans le nord-ouest de la Syrie, qui a commencé au début de la semaine.

Le nombre exact de victimes ne peut être vérifié de manière indépendante et pourrait encore augmenter à mesure que les forces du nouveau gouvernement syrien cherchent à affirmer leur contrôle sur la région côtière du nord-ouest du pays.

L’Observatoire syrien des droits de l’homme, basé au Royaume-Uni, qui a suivi le pays tout au long de sa guerre civile depuis 2011, a évalué que plus de 1000 personnes ont été tuées dans les combats cette semaine, dont 745 civils. L’observatoire a estimé que 125 combattants alignés sur le nouveau gouvernement ont également été tués, ainsi que 148 combattants en faveur de l’ancien dirigeant syrien Bachar al-Assad, qui a été chassé du pouvoir en décembre 2024.

Des centaines de civils, principalement des femmes, des enfants et des personnes âgées, ont également trouvé refuge dans une base militaire russe à Hmeimim. La Russie a soutenu Assad tout au long de la guerre civile syrienne et a maintenu une présence militaire dans le pays malgré le renversement d’Assad.

Des responsables du nouveau gouvernement syrien ont reconnu avoir commis des violations au cours des opérations menées dans le nord-ouest de la Syrie, qu’ils ont imputées à des groupes non organisés de civils et de combattants qui cherchaient à soutenir les forces gouvernementales dans les combats ou à commettre des actes de représailles au milieu de l’agitation.

Le gouvernement intérimaire syrien a commencé à imposer de nouveaux couvre-feux dans certaines parties des villes de Lattaquié et de Tartous le 7 mars.

Lutte sectaire pour le pouvoir après la chute du régime d’Assad

Bien qu’Assad ait quitté le pouvoir en décembre, de nombreuses factions continuent de se disputer les rênes de la Syrie.

L’actuel gouvernement de facto de Damas a été formé par des membres de Hayat Tahrir al-Cham (HTC), une faction islamiste sunnite désignée comme organisation terroriste étrangère par le gouvernement américain. Le HTC est issu d’al-Nusra, la branche syrienne d’al-Qaïda.

Le gouvernement américain, sous plusieurs administrations, a favorisé l’éviction d’Assad. Bien qu’il continue d’inscrire le HTC sur la liste des groupes terroristes, le gouvernement du président Joe Biden a montré sa volonté d’attendre et de voir comment le groupe qui a chassé Assad du pouvoir mènerait sa barque.

« Il ne faut pas se leurrer, certains des groupes rebelles qui ont renversé Assad ont aussi un sombre passé terroriste et de violations des droits de l’homme », a déclaré Joe Biden dans un discours prononcé le 8 décembre 2024, peu après avoir appris qu’Assad avait fui le pays. « Nous avons pris note des déclarations des chefs de ces groupes rebelles ces derniers jours. Ils disent ce qu’il faut, mais à mesure qu’ils assumeront de plus grandes responsabilités, nous évaluerons non seulement leurs paroles, mais aussi leurs actes. »

Dans les semaines qui ont suivi l’éviction d’Assad, l’administration Biden a retiré la prime de 10 millions de dollars offerte pour le chef du HTC, Ahmad al-Sharaa, et a envoyé un émissaire pour discuter avec le nouveau chef de guerre.

M. Sharaa s’est depuis positionné comme président de la Syrie par intérim, et de nombreux dirigeants du HTC ont occupé d’autres postes au sein du gouvernement intérimaire.

L’ampleur des violences signalées dans le nord-ouest de la Syrie depuis le 6 mars – qui incluent des rapports faisant état de l’exécution de plusieurs dizaines d’hommes alaouites dans un village – soulève de nouvelles questions quant à la capacité de l’autorité islamiste au pouvoir à gouverner les différentes factions syriennes.

Des combattants du nouveau gouvernement syrien chargent un lance-roquettes à Baniyas, en Syrie, le 7 mars 2025. (Ali Haj Suleiman/Getty Images)

Assad appartient à la minorité ethnoreligieuse alaouite de Syrie et de nombreux membres de la communauté alaouite l’ont soutenu dans sa lutte pour conserver le pouvoir.

Certaines régions du nord-ouest de la Syrie, dont les villes de Lattaquié et de Tartous, restent des foyers alaouites.

Assad parti, des milices alaouites comme la Brigade du bouclier côtier se sont formées pour isoler leurs communautés et repousser les forces du nouveau gouvernement formé par le HTC.

Les forces du nouveau gouvernement intérimaire syrien ont rapporté que des éléments pro-Assad avaient tendu une embuscade à plusieurs unités de ses forces de sécurité, déclenchant ainsi de nouvelles violences cette semaine. Dans le même temps, le Conseil islamique alaouite a imputé les violences au gouvernement, affirmant que ses forces étaient entrées dans les zones alaouites sous prétexte de chasser les partisans d’Assad, mais qu’elles étaient en réalité là pour tuer et terroriser les Syriens ordinaires.

Dans une déclaration réagissant aux récentes violences sectaires, M. Sharaa a promis que ses forces continueraient à poursuivre les éléments pro-Assad à travers le pays.

« Nous les traduirons devant un tribunal équitable », a ajouté M. Sharaa.

M. Sharaa a également déclaré que son gouvernement exercerait seul le contrôle des armes dans cette Syrie déchirée par la guerre.

« Nous continuerons à restreindre les armes à l’État, et aucune arme en vrac ne restera en Syrie », a-t-il assuré.

Le mois dernier, le gouvernement intérimaire formé par le HTC a également appelé des groupes tels que les Forces démocratiques syriennes (FDS), soutenues par les États-Unis, à rendre leurs armes sous peine d’être exclus des dialogues nationaux visant à élaborer une nouvelle constitution syrienne et à façonner la gouvernance post-Assad.

Les représentants de l’administration autonome dirigée par les Kurdes dans le nord-est de la Syrie et les FDS ont tous deux indiqué qu’ils avaient effectivement été exclus de la première série de dialogues nationaux organisés par le gouvernement formé par le HTC à Damas le 25 février.

Réactions internationales

La récente flambée de violence dans le nord-ouest de la Syrie a suscité l’inquiétude des États voisins et de la communauté internationale au sens large.

« Bien que la situation reste fluide et que nous soyons encore en train de déterminer les faits précis, il est clair que toutes les parties doivent immédiatement faire preuve de retenue et respecter pleinement la protection des civils conformément au droit international », a déclaré dans un communiqué daté du 7 mars Geir Pedersen, l’envoyé spécial des Nations unies pour la Syrie.

Le président turc Recep Tayyip Erdogan (à d.) et le président intérimaire de la Syrie Ahmed al-Sharaa tiennent une conférence de presse conjointe à Ankara, le 4 février 2025. (Ozan Kose/AFP via Getty Images)

Oncu Keceli, porte-parole du ministère turc des Affaires étrangères, a exprimé le soutien de la Turquie aux nouveaux dirigeants syriens et a condamné les attaques contre les forces de sécurité.

« À ce stade critique, la tension à l’intérieur et autour de Lattaquié, ainsi que le ciblage des forces de sécurité, pourraient saper les efforts visant à mener la Syrie vers l’avenir dans l’unité et la solidarité », a déclaré M. Keceli dans un communiqué qu’il a partagé sur la plateforme de médias sociaux X le 7 mars.

L’Arabie saoudite a également condamné les « crimes commis par des groupes hors-la-loi » en Syrie et les attaques qu’ils ont lancées contre les forces de sécurité.

Le gouvernement israélien, en revanche, a publié une déclaration condamnant les nouveaux dirigeants syriens de Damas et soulignant les récentes violences comme un signe évident qu’il est impossible de leur faire confiance quant à la protection de tous les Syriens.

« Les djihadistes de Damas ont raconté au monde l’histoire d’une ‘nouvelle Syrie’ ouverte aux minorités. En réalité, les milices djihadistes se livrent à des massacres incessants contre les civils », a déclaré le ministère israélien des Affaires étrangères dans un message publié le 7 mars sur X.

Avec Reuters et l’Associated Press

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