L’Union européenne a affiché vendredi son unité face à Pékin, se montrant prête à poursuivre son enquête sur les subventions chinoises aux voitures électriques malgré la menace de représailles agitées la veille par le géant asiatique.
« Je suis confiant », a lancé le commissaire européen à l’Économie, Paolo Gentiloni, interrogé sur les risques de voir la première économie mondiale punir les entreprises européennes. « Nous devons traiter ce problème avec sérieux. Il n’y a pas de raison spécifique pour des représailles, mais des représailles sont toujours possibles dans ce genre d’affaires », a-t-il déclaré lors d’une réunion des ministres de l’Économie et des Finances des Vingt-Sept, à Saint-Jacques-de-Compostelle (nord-ouest de l’Espagne).
La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a annoncé mercredi l’ouverture d’une enquête sur les subventions publiques chinoises aux automobiles électriques, afin de défendre l’industrie européenne face à des prix jugés « artificiellement bas ».
Si, au terme de son enquête, la Commission constate des infractions aux règles commerciales, elle pourrait infliger des droits de douane punitifs aux véhicules chinois, au risque de déclencher une guerre commerciale avec Pékin. Cette mesure « prise au nom d’une ‘‘concurrence loyale’’ » est « ouvertement du protectionnisme » et elle « aura un impact négatif sur les relations économiques et commerciales entre la Chine et l’Union européenne », a répliqué jeudi le ministère du chinois du Commerce.
Le commerce avec la Chine représente moins de 2,5% du produit intérieur brut (PIB) de la zone euro, a relativisé vendredi Paolo Gentiloni, tout en reconnaissant que la situation était « très diverse » selon les États membres.
La France poussait ces derniers mois pour une Europe qui s’affirme davantage face aux soupçons de mesures protectionnistes de la Chine. L’Allemagne, dont le marché chinois est incontournable pour son industrie automobile, est traditionnellement plus réservée. Mais, en l’occurrence, elle assume aussi le risque de froisser Pékin. « S’il y a des doutes sur l’équité, il faut les examiner. Le commerce mondial est basé sur des règles et (elles) s’appliquent naturellement aussi aux véhicules électriques », a souligné vendredi le ministre allemand des Finances, Christian Lindner. La Chine représente le premier marché mondial pour les grandes marques de voitures allemandes comme Volkswagen, Audi, Mercedes ou BMW. Elle est aussi le premier débouché pour les géants français du luxe LVMH, Kering et Hermès.
« L’UE est une superpuissance commerciale mondiale »
Mais, avec ses près de 450 millions d’habitants, l’Europe s’affiche sûre d’elle-même. « Je pense que l’UE est une superpuissance commerciale mondiale », a lancé la ministre espagnole de l’Économie, Nadia Calvino, dont le pays assure depuis juillet la présidence tournante du Conseil de l’UE. « Nous avons tout intérêt à disposer d’un cadre commercial fondé sur des règles qui évite toutes les mesures susceptibles d’affaiblir ou de mettre en péril l’égalité des conditions de concurrence entre les entreprises du monde entier », a-t-elle déclaré.
« Nous voulons simplement que tout le monde respecte les mêmes règles. C’est tout. Ce n’est pas contre la Chine qui est un partenaire économique important pour l’Europe », a souligné le ministre français Bruno Le Maire. Avec cette enquête, l’UE veut simplement « défendre les intérêts de ses entreprises », a-t-il dit.
Des experts estiment à environ 20% l’avantage en termes de coûts des véhicules chinois par rapport à la concurrence européenne. Mais là où Bruxelles soupçonne des pratiques illégales, Pékin estime simplement cueillir le fruit de ses investissements.
La Chine mise depuis longtemps sur les motorisations électriques dans l’automobile et a pris une longueur d’avance sur l’Europe notamment dans les technologies de batteries. Ses constructeurs s’appuient sur leur immense marché intérieur pour se développer désormais à l’étranger, grâce aux fortes économies d’échelle dont ils bénéficient. Des dizaines de marques locales innovantes ont vu le jour ces dernières années en Chine (BYD, Geely, XPeng, Nio, Leapmotor) et elles rivalisent avec des constructeurs étrangers qui peinent à s’adapter.
Encore inconnues du grand public en Europe, les marques chinoises étaient cette année présentes en nombre au salon automobile de Munich en Allemagne début septembre. « Il s’agit d’un avantage concurrentiel acquis grâce à un travail acharné » et « le résultat d’une innovation technologique ininterrompue », a estimé jeudi le ministère chinois du Commerce.
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