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Nouvelle « journée morte » des barreaux contre une réforme de la justice « au rabais »

décembre 12, 2018 20:26, Last Updated: décembre 12, 2018 20:26
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« La justice n’est pas une start-up », « des juges, pas des robots » : des avocats se sont à nouveau mobilisés mercredi contre une réforme de la justice « au rabais », quelques heures après le vote de la loi controversée à l’Assemblée nationale. 

Blocage de tribunaux, grève des audiences ou « du zèle » et un peu partout en France des rassemblements devant les préfectures : la fronde des robes noires, mais aussi des magistrats et des personnels de greffe, a pris plusieurs visages pour cette nouvelle « journée morte » à l’appel d’une dizaine d’organisations et réunissant dans beaucoup de grandes villes plusieurs centaines de personnes.

Dans les cortèges, des voix se sont élevées contre une réforme adoptée « en pleine nuit » par les députés et à une courte majorité, par 88 voix contre 83. Le texte passera « au forceps » devant la commission mixte paritaire, a prédit le bâtonnier de Lyon, Me Farid Hamel.

Le texte porté par la garde des Sceaux Nicole Belloubet prône une révolution numérique et la « simplification des procédures » civile et pénale.

Il crée également une nouvelle échelle des peines, dans l’optique de désengorger des prisons surpeuplées. Les professionnels de la justice vent debout depuis des mois estiment eux que sous couvert de moderniser l’institution, la réforme est dictée par des contraintes budgétaires et va éloigner les plus vulnérables de leurs juges.

Disposition la plus décriée : la fusion des tribunaux d’instance, juridictions de proximité par excellence, avec les tribunaux de grande instance (TGI). Cette fusion et la spécialisation des tribunaux sur le ressort d’un ou deux départements « préfigurent une désertification judiciaire et la fermeture de sites, au préjudice des justiciables », estiment l’Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire) et l’UNSA-Services judiciaires.

« Aucun tribunal ne fermera, aucun », a répété mercredi la garde des Sceaux. Elle a réfuté avoir mené sa réforme « au pas de charge » et « sans concertation », et a au contraire salué « des avancées extrêmement positives », dont la création d’un parquet national antiterroriste, et un budget en hausse de « 25% en cinq ans ». 

« Mon seul objectif, c’est le justiciable. (…) Il ne faut pas agiter des peurs qui sont vaines et qui ne correspondent pas à ce qui est écrit dans le texte », a insisté Mme Belloubet lors des questions au gouvernement à l’Assemblée.

« Ce texte a une vocation : ménager des solutions budgétaires pour une justice qui est déjà une des plus pauvres d’Europe », lui a répondu l’avocat pénaliste Martin Pradel, présent au rassemblement parisien.

Le bâtonnier de Lyon a vilipendé « une loi fourre-tout faite pour dissuader le justiciable de saisir le juge ». Selon lui, la réforme va faire baisser de « 30% » le flot des affaires à juger.

« Justice méprisée, citoyens désarmés », « Macron, la justice n’est pas une start-up » ou « Belloubet sinistre la justice » pouvait-on lire sur des pancartes à Marseille, Grenoble ou Lyon. Dans la préfecture du Rhône, les manifestants ont scandé : « La justice qui marche au pas, on n’en veut pas » ou encore « on veut des juges, pas des robots ».

L’annonce surprise de Mme Belloubet d’une réforme par ordonnance du texte fondateur de la justice des mineurs et le passage des greffes de prud’hommes sous l’autorité du greffe du TGI, se sont récemment ajoutés à de plus vieilles doléances.

Avocats et magistrats critiquent en particulier une réforme pénale qui renforce encore les pouvoirs du procureur, au détriment du juge et des droits de la défense et, au civil, la révision des pensions alimentaires par les directeurs des caisses d’allocations familiales (CAF) et non plus par des juges.

« La révolte est là, pas besoin de porter un gilet jaune, les robes noires aussi sont en colère », a lancé au porte-voix Me Bernard Beral, le bâtonnier de Montpellier, où des manifestants ont porté un cercueil barré du message « Justice en danger » jusqu’aux grilles de la préfecture.

À Marseille, des robes noires ont jeté à terre leur Code pénal ou Code civil avant d’y mettre le feu. À Bordeaux, des avocats portaient des masques blancs incarnant « la déshumanisation de la justice ».  

Des délégations ont été reçues en préfecture dans cette ville, comme à Toulouse, Rouen et Dijon.

D. S avec AFP

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