Qui est le moins cher ?

6 juillet 2015 10:42 Mis à jour: 6 juillet 2015 10:47

 

Vous avez l’impression que le prix de la vie augmente toujours ? Qu’il est toujours plus difficile de remplir son chariot de course ? Ce n’est pas le cas. En 2014, dans les enseignes de grande distribution, les prix ont en moyenne baissé d’1 %, avec une chute plus significative encore sur les produits de grandes marques. La première raison à ce phénomène est, paraît-il, la « chute des cours mondiaux des matières premières », ce qui ne veut pas dire que les carottes ont poussé plus vite l’année dernière mais que les spéculateurs qui manipulent la valeur boursière des produits alimentaires se sont temporairement trouvé un autre terrain de jeu. La seconde raison, on la trouve dans tous les espaces publicitaires qui saturent notre quotidien, à travers l’affirmation répétée de chaque grande chaîne de distribution : « C’est nous les moins chers ». On dispose maintenant d’applications smartphone pour se convaincre qu’il faut aller chez untel acheter sa pâte à tartiner, chez tel autre pour les couches bébé, à moins qu’un troisième ne vous séduise en affichant du poisson frais à prix imbattable.

Le noble argument pour toutes ces grandes enseignes, c’est d’être « au service du consommateur » en lui offrant le meilleur prix. Au fil des années, l’alimentation occupe une place toujours plus faible dans le budget des ménages et, à table, c’est tous les jours dimanche. Le prix de ce trop grand confort alimentaire dont nous bénéficions, du bifteck quotidien, du saumon au kilo, de tous les « produits à 1 euro » c’est d’une part une agriculture intensive pour créer à bas coût de ces matières que nous consommons – la ferme des mille vaches et les produits OGM en sont des exemples – et d’autre part la négociation au couteau des prix par les grandes enseignes.

Au couteau, peut-être même à la kalachnikov : la position dominante des centrales d’achat des groupes de distribution est devenue telle que, malgré la loi Chatel de 2008 qui leur rend la vie facile en permettant de facto d’acheter des produits en dessous de leur prix de production, la justice vient de trancher une nouvelle fois en faveur des producteurs : le groupe Leclerc devra rembourser 61,3 millions d’euros à ses fournisseurs pour « pratiques commerciales abusives ». La cour d’appel de Paris considère que les prix obtenus en 2009 et 2010 par le groupe traduisent un « déséquilibre significatif » entre les forces en présence dans la négociation commerciale. En clair, les négociateurs de Leclerc ont imposé les prix plutôt que de les négocier, probablement enthousiasmés par le champ de possibilités que leur ouvrait la toute neuve loi Chatel – et parce que les producteurs n’avaient pas la possibilité de dire non.

Pour Michel-Édouard Leclerc qui souhaite se pourvoir en cassation, cette décision remet en cause le principe de libre-négociation commerciale. Cependant, le terme « négociation » implique que chaque partie peut influer significativement sur le résultat, ce qui n’est depuis longtemps plus le cas dans le secteur agro-alimentaire. Leclerc, mais aussi Auchan, Système U, Carrefour, Intermarché qui ont également dû payer récemment des amendes pour leur pratique de « clé de bras », ou sont sous le coup de procédures comparables, devraient s’en convaincre : la « nuit de l’élevage en détresse » du 2 juillet, les grandes surfaces régulièrement attaquées par des agriculteurs désespérés montrent trop qu’il faut – de même qu’on a défini dans le domaine de l’emprunt ce qu’est un taux d’usure – arriver dans le domaine de l’alimentation à fixer une marge minimale pour les producteurs.

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