Le temps presse pour les secouristes qui tentent toujours mercredi de retrouver des survivants en Turquie et en Syrie, deux jours après le terrible séisme dont le bilan ne cesse de s’alourdir, dépassant désormais les 9500 morts.
Dans un froid glacial, les sauveteurs mènent une course contre la montre pour tenter de porter secours aux rescapés du tremblement de terre d’une magnitude de 7,8, survenu lundi à l’aube et qui a secoué le Sud-Est de la Turquie et le Nord de la Syrie voisine.
Le mauvais temps complique la tâche des secours et le ministre turc de l’Intérieur a averti mardi que les prochaines 48 heures seraient « cruciales » pour retrouver des survivants.
Sauver des vies
La route qui mène à la ville turque d’Antakya (l’ancienne Antioche), dans la province de Hatay particulièrement touchée, est encombrée de camions d’aide, d’engins de chantiers et d’ambulances qui slaloment entre les voitures des particuliers qui fuient.
La ville est à terre, noyée dans un épais nuage de poussière due aux engins de déblaiement qui fouillent les décombres. À perte de vue, ce ne sont qu’immeubles effondrés ou partiellement écroulés. Même ceux qui tiennent encore sont profondément lézardés et personne n’ose y rester. « Antakya est finie », répètent les habitants.
De part et d’autre de la frontière turco-syrienne, on s’active pour tenter de sauver des vies. À Jandairis, côté syrien, un nouveau-né a été sorti vivant des décombres. Cette petite fille était encore reliée par le cordon ombilical à sa mère, morte comme tous les autres membres de la famille.
« Nous avons entendu un bruit alors qu’on creusait (…) nous avons déblayé et avons trouvé cette petite, Dieu soit loué », a raconté mardi à l’AFP un proche de la famille, Khalil Sawadi. Le bébé a été conduit à l’hôpital et son état est stable, selon un médecin interrogé par l’AFP.
Des centaines de personnes piégées sous les décombres
L’aide internationale a commencé à arriver mardi en Turquie où un deuil national a été décrété pour sept jours. Le décompte officiel des morts s’y établit pour le moment à 6957. Il s’agit d’ores et déjà du pire bilan que la Turquie ait connu depuis 1999, lorsque 17.000 personnes avaient péri, dont un millier à Istanbul.
En Syrie, 2547 morts ont été recensés à ce stade. Le bilan devrait « grimper considérablement car des centaines de personnes restent piégées sous les décombres », selon les Casques blancs (volontaires de la protection civile) dans les zones rebelles.
À Gaziantep, ville turque proche de l’épicentre, une habitante a déjà perdu l’espoir de retrouver vivante sa tante enfouie sous les décombres. « C’est trop tard. Maintenant nous attendons nos morts », confie-t-elle.
Pour Irmak, 15 ans, c’est trop tard. Son père, Mesut Hancer, serre sans rien dire la main de son enfant morte qui émerge, inerte, des décombres d’un bâtiment de Kahramanmaras. Aucune aide, aucun secours n’étaient parvenus mardi dans cette ville turque de plus d’un million d’habitants, dévastée et ensevelie sous la neige.
« Où est l’État ? Où est-il ? Ca fait deux jours et on n’a vu personne. Les enfants sont morts de froid » s’insurge Ali, qui y attend aussi des renforts, espérant encore revoir son frère et son neveu, piégés dans les ruines de leur immeuble.
« Nous avons tout perdu en un instant »
À Sawran, dans le Nord de la Syrie, Mahmoud Brimo tombe à genoux devant un tas de ruines, les restes de sa maison. Non loin, un dôme gris témoigne qu’une mosquée s’élevait là. « Des années de guerre ne nous avaient pas dévastés comme cela », se lamente-t-il, avant d’ajouter : « Nous avons tout perdu en un instant. Nous sommes totalement détruits ».
Par peur de rentrer chez eux, des survivants ont trouvé refuge à l’aéroport turc de Gaziantep. « Maintenant, nos vies sont tellement marquées par l’incertitude. Comment vais-je m’occuper de ces enfants ? », s’interroge Zahide Sutcu qui a fui son appartement avec ses deux jeunes enfants.
Vingt-trois millions de personnes sont « potentiellement exposées, dont environ cinq millions de personnes vulnérables », a mis en garde l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Mobilisation et promesses d’aide de 45 pays
Les premières équipes de secouristes étrangers sont arrivées mardi. Selon le président turc Recep Tayyip Erdogan, qui a déclaré l’état d’urgence pour trois mois dans les dix provinces touchées par le séisme, 45 pays ont proposé leur aide.
L’Union européenne a mobilisé pour la Turquie 1185 secouristes et 79 chiens de recherches auprès de 19 États membres dont la France, l’Allemagne ou la Grèce. Pour la Syrie, l’UE est en contact avec ses partenaires humanitaires sur place et finance des opérations d’aide.
Le président américain Joe Biden a promis à M. Erdogan « toute l’aide nécessaire, quelle qu’elle soit ». Deux équipes de secouristes devaient arriver mercredi matin en Turquie.
La Chine a annoncé mardi l’envoi d’une aide de 5,9 millions de dollars ainsi que des secouristes spécialisés en milieu urbain, des équipes médicales et du matériel d’urgence.
Même l’Ukraine, malgré l’invasion russe, a annoncé l’envoi en Turquie de 87 secouristes.
Les Émirats arabes unis ont promis 100 millions de dollars d’aide et l’Arabie saoudite, qui n’entretient pas de liens avec le régime de Damas depuis 2012, a annoncé la mise en place d’un pont aérien pour venir en aide aux populations affectées dans les deux pays.
En Syrie, l’appel lancé par les autorités de Damas a cependant surtout été entendu par son allié russe. Selon l’armée, plus de 300 militaires russes sont déjà sur les lieux pour aider les secours.
Washington a indiqué mardi travailler avec des ONG locales en Syrie, insistant que ses « fonds iront bien sûr au peuple syrien, pas au régime » de Damas.
Le séisme a touché le point de passage de Bab al-Hawa, le seul pour la quasi-totalité de l’aide humanitaire aux zones rebelles en Syrie acheminée depuis la Turquie, selon l’ONU.
Le Croissant-Rouge syrien, qui opère dans les zones gouvernementales, a appelé l’UE à lever les sanctions contre Damas.
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