Un taux du Livret A au-delà de 4% en août ? Ou bien un maintien à 3% ? Sur ce sujet qui mêle les enjeux politiques et économiques, la bataille d’influence a déjà commencé, certains acteurs financiers freinant des quatre fers pour limiter une nouvelle hausse favorable aux épargnants.
Le taux du Livret A, produit d’épargne détenu par environ 55 millions de Français, est calculé deux fois par an, en février et en août, et peut l’être deux autres fois, en mai et en novembre, en cas de circonstances exceptionnelles.
Comment est fixé le taux ?
Son niveau est décidé en prenant en compte d’une part la hausse des prix et d’autre part les taux interbancaires, auxquels les banques s’échangent de l’argent à court terme, des derniers mois. Ainsi, à l’été prochain, le taux pourrait passer à 4,3%, voire 4,5%, selon Philippe Crevel, directeur du Cercle de l’épargne.
Le gouverneur de la Banque de France et le ministre de l’Économie ont toutefois la possibilité de déroger à la règle de calcul. C’« est d’ailleurs ce qui s’était passé en février 2022, lorsque la Banque de France avait proposé d’arrondir à 1%, au lieu de 0,8%, puis en février 2023, mais dans l’autre sens cette fois, lorsque l’institution avait proposé 3% au lieu de 3,3%. Le taux du Livret de développement durable et solidaire (LDDS) est, pour sa part, indexé sur celui du Livret A et a, pour l’épargnant, des caractéristiques identiques.
Pourquoi limiter la hausse ?
Le prochain taux ne sera annoncé qu’à la mi-juillet, mais la bataille d’influence a déjà commencé. Selon des informations de presse, certaines banques feraient déjà pression pour limiter la hausse. Et il y a dix jours, le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), qui a pour rôle de gérer une partie de l’argent du Livret A, avec les réseaux bancaires, a plaidé pour le statu quo, avec un Livret A qui reste à 3%.
Près de 60% du Livret A est rémunéré par la CDC qui utilise cet argent pour prêter aux bailleurs sociaux. « Une hausse du taux du livret A, de 3% à 4,3%, coûterait 2,1 milliards d’euros de surcharge annuelle d’intérêts aux bailleurs sociaux », estime dans une note Éric Dor, directeur des Études économiques à l’école de commerce IESEG. « Toutefois, les loyers reçus par les bailleurs sociaux augmentent aussi par indexation sur l’inflation, qui est la cause de la hausse du taux du livret A » et « les effets pourraient s’équilibrer », ajoute-t-il.
L’impact se chiffre en centaines de millions
Du côté des banques, qui rémunèrent environ 40% des encours, l’impact se chiffre en centaines de millions. Pour BPCE, qui comprend le réseau Caisse d’épargne, distributeur historique du Livret A avant sa généralisation en 2009, les hausses de taux ont ainsi pesé à hauteur de 380 millions d’euros sur le produit net bancaire, équivalent du chiffre d’affaires pour le secteur, au premier trimestre.
Toutefois, Éric Dor rappelle que le Livret A et le LDDS ne sont qu’« une petite partie » du bilan des banques et qu’elles ont la capacité « d’absorber globalement une nouvelle hausse des taux sans trop compromettre leurs résultats ». Quant à l’argument selon lequel les hausses encouragent à épargner au détriment de la consommation et de la croissance, « c’est vrai, mais c’est précisément ce que souhaite la Banque centrale européenne » qui veut limiter l’inflation, ajoute-t-il.
Qu’en pensent les autorités ?
Questionné sur le prochain relèvement, le ministre de l’Économie Bruno Le Maire a déclaré mercredi sur France Info que sa « première responsabilité, c’est de protéger l’épargne des Français », suggérant un souhait de voir ce taux augmenter.
De son côté, François Villeroy de Galhau, le gouverneur de la Banque de France, a souligné vendredi au micro de Radio Classique qu’il ferait une recommandation « en tenant compte « de l’intérêt des épargnants et des emprunteurs ».
Pour Philippe Crevel, le taux devrait bien augmenter, « mais certainement moins que ce que la simple application de la formule permettrait ». Il table sur « un taux autour de 3,5% ».
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