Ils ont l’oreille de millions d’Américains et surtout du premier d’entre eux qui n’hésite pas à les retweeter: les commentateurs conservateurs sont presque devenus des conseillers politiques pour Donald Trump, n’hésitant pas à soutenir son action ou à la critiquer ouvertement.
Selon certains analystes politiques, la déclaration « d’urgence nationale » annoncée vendredi par M. Trump est une tentative de sauver la face devant la colère de ces commentateurs, outrés qu’il n’ait pas réussi à obtenir du Congrès le financement de son mur anti-immigration à la frontière avec le Mexique.
« Le président n’a pas supporté d’être qualifié de looser par les commentateurs comme Laura Ingraham et Sean Hannity », deux animateurs vedettes de Fox News, la chaîne préférée des conservateurs, a affirmé dans un éditorial le New York Times. Donald Trump « veut s’assurer que Sean Hannity et Ann Coulter et d’autres sur Fox News vont être contents et se calmer, même si certains ne le seront pas », a expliqué sur CNN David Gergen, qui a conseillé quatre chefs d’Etats américains.
« Mais au fond, c’est une politique pour la base, qu’il a besoin de renforcer », a-t-il ajouté. S’il s’inspire des idées de ces polémistes, « ils ne décident pas de la politique », a assuré vendredi le président américain. Mais pour le journaliste de CNN Chris Cuomo, leur influence est réelle. « Hannity et Coulter et tous les autres sont dans sa tête, tout le temps, et gratuitement », a-t-il dit, mettant en garde contre Sean Hannity devenu « la personne la plus puissante dans les médias parce que ce qu’il dit, le président le fait ».
Matt Gaetz, un parlementaire républicain de Floride et fervent partisan de M. Trump, a toutefois assuré que « c’est bien qu’un président entende les opinions de gens différents » et ne soit pas « piégé dans le cocon » de la Maison Blanche.
M. Hannity, âgé de 57 ans et New-Yorkais comme M. Trump, s’est façonné l’image du héraut de l’Amérique conservatrice, celle des grands oubliés des médias généralistes, et défend bec et ongles, sans aucune distance, l’action du président. L’animateur a pris parti dès le début 2016 pour l’ancien promoteur immobilier, qui est aussi son ami. Les deux hommes se parlent souvent au téléphone et Sean Hannity a participé en novembre 2018 à un meeting du président pour louer son action à la Maison Blanche. « Sean Hannity est un partisan génial de ce que je fais », a affirmé vendredi le président, ajoutant: « Pas de moi, parce que si je changeais d’opinion il ne serait pas avec moi. »
Outre Laura Ingraham, célèbre éditorialiste ultra-conservatrice âgée de 55 ans, Donald Trump apprécie « Fox and Friends » et n’hésite pas à commenter sur Twitter les sujets diffusés dans l’émission matinale, ou même à intervenir par téléphone.
Sur Fox News, Donald Trump regarde également Lou Dobbs, pionnier de la chaîne CNN dont il a démissionné en 2009 après des commentaires populistes controversés, et la « Juge Jeanine » Pirro, ex-procureur de New York qui fustige chaque samedi soir les progressistes et les démocrates, surnommés « demon rats ».
A la radio, Rush Limbaugh est sans conteste l’animateur le plus influent de la sphère conservatrice, qualifié autrefois avec sarcasme de « chef du parti républicain » par les démocrates. Selon une estimation non officielle du magazine spécialisé Talkers, 14 millions de personnes écouteraient son émission quotidienne via des centaines de radios locales, chaque semaine. M. Limbaugh est « génial » et « incroyable » car « il parle pendant trois heures et a un audimat exceptionnel » a salué vendredi Donald Trump.
Mais le président peut aussi distribuer des mauvais points, ce qui pourrait avoir de l’influence sur le public de ces émissions. La très conservatrice et influente polémiste Ann Coulter, qui avait qualifié le président de « mauviette » pour avoir plié face au Congrès et mis fin au « shutdown » en janvier, en a fait l’expérience vendredi.
« Elle a dépassé les bornes », a commenté Donald Trump, ajoutant qu’il ne la connaissait « pratiquement pas » et qu’il n’avait « pas parlé avec elle depuis plus d’un an ».« Je l’aime bien pour une raison », a-t-il toutefois lancé, rappelant qu’en 2015 « quand on lui avait demandé au tout début qui allait gagner, elle avait répondu Donald Trump ».
D.C avec AFP
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