En vertu d’une nouvelle législation dont les contours précis devraient prendre forme au cours des prochains mois, remettre en cause la théorie sur l’origine anthropique du réchauffement climatique, ou de l’existence même d’une crise climatique, pourrait bientôt être passible de censure aussi bien dans les médias que sur les réseaux sociaux.
C’est un projet de loi qui suscite l’inquiétude sur l’avenir de la liberté de la presse et, plus globalement, de la liberté d’expression en France. En collaboration avec l’association Quota Climat et l’institut Rousseau, un groupe de députés issus de la majorité présidentielle et de la Nupes ont annoncé le 19 juillet leur volonté de rédiger une proposition de loi visant à réprimer dans les médias et sur les réseaux sociaux les opinions dites climatosceptiques, un terme qui désigne les propos exprimant un doute voire remettant en cause la responsabilité de l’homme dans le réchauffement climatique, mais aussi son ampleur.
« Il y a encore trop de climatoscepticisme dans les médias »
Polémique, ce projet a été présenté dans la Salle des fêtes de l’Assemblée nationale devant un public de 200 personnes avec des déclarations qui ont donné le ton : « Il y a encore trop de climatoscepticisme dans les médias », a ainsi martelé Eva Morel, coprésidente de Quota Climat et attachée parlementaire de Sandrine Le Feur (Renaissance). Présent à l’évènement, Reporterre pointe du doigt dans un article des médias comme Le Figaro qui « continuent à ouvrir leurs colonnes à des textes remettant en cause l’analyse du Giec sur le réchauffement climatique ».
Mais la presse n’est pas seule à se retrouver dans le collimateur, les réseaux sociaux sont aussi au cœur des critiques et des velléités de régulation : « Le consensus scientifique sur le climat est en train d’exploser sur Twitter : ce réseau est pris d’assaut par les climatosceptiques, parfois par des comptes robotisés », s’est alarmé Laurent Cordonier, directeur de la Fondation Descartes. Aujourd’hui, plus d’un Français sur trois (39%) doute de la théorie selon laquelle les activités humaines seraient à l’origine du dérèglement climatique, selon l’édition 2022 de l’étude « Fractures Françaises » (Ipsos-Sopra Steria). Un chiffre qui motive l’Institut Rousseau et Quota Climat à appeler d’« urgence à informer davantage et mieux » et, pour ce faire, à légiférer en vue de contrôler l’information.
Sous la houlette de Stéphane Delautrette (Parti socialiste), une coalition de députés, qui se décrit comme « transpartisane » bien qu’elle ne compte pas parmi ses membres des représentants des Républicains ou du Rassemblement national, va donc entamer des auditions à partir du 27 septembre pour qu’un texte législatif « relatif au traitement médiatique des enjeux environnementaux » soit déposé d’ici à la fin du mois de décembre.
Pleins pouvoirs à l’Arcom
Selon un document publié par l’Institut Rousseau et Quota Climat, cette proposition de loi pourrait étendre encore un peu plus le pouvoir de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), alias le gendarme de l’audiovisuel et du numérique né de la fusion entre le CSA et Hadopi en 2022, aussi bien sur les médias que les réseaux sociaux.
Côté presse, sa mission consisterait à garantir « un traitement adapté en qualité et quantité lors des campagnes électorales » et à lutter contre « la diffusion de fausses informations concernant les questions écologiques », notamment « la désinformation sur la contradiction ou la minimisation de l’existence de la crise écologique et de son origine anthropique ».
S’agissant des réseaux sociaux, la loi donnerait mandat à l’Arcom pour mener peu ou prou la même mission dans la continuité de l’adoption par l’Union européenne du « Digital Services Act » (DSA) le 4 octobre 2022, un nouveau règlement très controversé sur les services numériques qui entend contraindre les plateformes en ligne à lutter contre la « haine » et la « désinformation ».
Un volet essentiel aux yeux de Quota Climat et de l’institut Rousseau, conscients du fait que l’utilisation d’Internet comme premier moyen d’accès à l’information domine chez les moins de 35 ans. « Un rapport publié par les associations Avaaz, Greenpeace et Les Amis de la Terre en avril 2022 montre que les actions des plateformes de service dans la lutte contre la désinformation sur la crise écologique restent insuffisantes », font-ils également valoir.
Pour rappel, l’entrée en vigueur prochaine du DSA à l’échelle européenne impliquera, pour le cas de la France, une extension des pouvoirs de l’Arcom, chargé de faire appliquer ce nouveau règlement en étroite collaboration avec la Commission européenne. Comme l’indiquait Benoît Loutrel, membre du collège de l’Arcom et président du groupe de travail « Supervision des plateformes en ligne », dans un entretien à Siècle Digital en janvier 2023 : « Notre capacité d’action sera partagée et démultipliée ».
La proposition de loi imaginée par le think tank et l’association écologiste comprend également un article rendant obligatoire les « contrats climats », un dispositif visant à réduire la publicité des biens et services jugés défavorables pour l’environnement, la création d’un Observatoire de la couverture médiatique de la crise écologique ou encore un cadre définissant la mission du service public de l’audiovisuel concernant l’information relative au changement climatique.
« Tout est envisageable pour y parvenir »
Dans une interview accordée le 27 juillet à Marianne, le député PS Stéphane Delautrette précise que les auditions qui démarreront en septembre ne déboucheront pas nécessairement sur une proposition de loi. Aux réticences exprimées par le média sur les futures contraintes qui pourraient être imposées aux journalistes, il assure que ces temps de réflexion impliqueront des acteurs du monde médiatique « comme les journalistes Anne-Sophie Novel et Nabil Wakim (Le Monde), ou encore Virginie Fichet, directrice adjointe de la rédaction chez France Télévisions en charge des dossiers climat ». Des profils plutôt « climato-convaincus ».
« Ce gendarme des médias (l’Arcom, ndlr) ne s’oppose-t-il pas à une mesure qui contraindrait la liberté de choix des journalistes ? », interroge Marianne. « Non, car cela n’entre pas forcément en contradiction avec la liberté de la presse », répond l’homme de gauche, avant d’ajouter, paradoxalement : « Bien sûr, il se peut que ça aboutisse à donner des contraintes. Peut-être qu’il y aurait des sanctions, rien n’est décidé et cela dépendra des discussions. L’objectif que l’on poursuit est de faire en sorte qu’il y ait un meilleur traitement médiatique des enjeux environnementaux et de durabilité. Si certains n’ont pas eu cette démarche volontaire, il faut les pousser. »
Insistant sur la volonté commune du groupe de travail de faire en sorte que les informations diffusées soient « basées sur des faits scientifiques », le socialiste prévient d’ores et déjà : « Tout est envisageable pour y parvenir, mais on ne connaît pas encore les leviers […] Je ne peux donc pas dire s’il y aurait des sanctions : rien n’est écarté. J’insiste sur le fait que tous les champs sont ouverts. »
Pas de consensus scientifique
Pour rappel, il n’existe aucun consensus scientifique sur l’origine anthropique du changement climatique. Selon une enquête d’opinion menée en 2015 par l’Agence d’évaluation environnementale des Pays-Bas auprès de 1.800 scientifiques spécialistes du climat à l’international, seuls 43% des sondés estiment que les activités humaines sont responsables de ce phénomène.
Dans le même ordre, une enquête conduite en 2012 chez les 1.854 membres qui constituent l’American Meteorological Society a révélé que le taux de professionnels de la météorologie qui jugent que le changement climatique imputable à l’homme est dangereux s’établit à 39.5%.
Souvent présenté comme garant d’un consensus en la matière, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), qui prétend représenter plus de 2.500 scientifiques, compte en réalité en son sein très peu de membres qui ont écrit ou revu des études scientifiques portant sur l’origine anthropique du réchauffement climatique. Comme le souligne le média américain The Daily Wire, le nombre d’auteurs listé par l’organisme dans son cinquième rapport d’évaluation sur cette question spécifique est de seulement 41.
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