Cette semaine, Emmanuel Macron va tenter de naviguer dans la tourmente politique et économique de la Nouvelle-Calédonie. Avec d’une part, l’impasse politique et institutionnelle issue du référendum sur l’autodétermination de 2021 et, d’autre part, les sérieuses difficultés économiques de l’archipel, la laissant en proie aux ambitions expansionnistes de la Chine.
Les tensions politiques et économiques qui inquiètent les Néo-Calédoniens, combinées à l’influence grandissante de la Chine, créent une complexité dans laquelle le président Macron devra naviguer lors de sa visite dans l’archipel divisé sur la question de l’indépendance. Des réponses sont attendues de la part du président sur trois fronts : politique, économique et géopolitique.
Le dernier référendum boycotté par les indépendantistes
Trois référendums successifs, prévus dans l’accord de Nouméa de 1998 sur la question de l’autodétermination, ont rejeté l’indépendance du territoire français du Pacifique. Le dernier référendum de 2021, boycotté et contesté par les indépendantistes du FLNKS, a conduit à une crise politique.
Aujourd’hui, les indépendantistes, tout en acceptant d’ouvrir le dialogue, lient la question institutionnelle à la reconnaissance des impacts négatifs de la colonisation sur la population kanak et attendent des réparations et la résolution des problèmes liés à l’identité kanak et au contentieux colonial.
« Nous attendons beaucoup de la venue du président pour enfin aborder la question de l’identité kanak et les problématiques du contentieux colonial et des réparations », a détaillé à l’AFP Roch Wamytan, un des responsables de l’Union calédonienne.
En face, les loyalistes, comme Virginie Ruffenach et Gil Brial, attendent notamment l’ouverture de discussions trilatérales à Paris et une réforme institutionnelle significative.
« L’État doit jouer sa partie et proposer aux Calédoniens une ligne d’avenir et dire quel rôle la Nouvelle-Calédonie joue pour la France », a souligné auprès de l’AFP Virginie Ruffenach, la vice-présidente du Rassemblement-Les Républicains.
Gil Brial, deuxième vice-président de la province Sud et porte-parole de l’intergroupe Les Loyalistes au Congrès de la Nouvelle-Calédonie, plaide de son côté pour une sortie de l’accord de Nouméa, estimant qu’« une réforme constitutionnelle simplement pour ouvrir le corps électoral, ce n’est pas suffisant ».
La parole présidentielle scrutée sur le front économique
En juin dernier, Louis Mapou, le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie (un des responsables du Palika, parti membre du FLNKS), s’est inquiété du modèle économique « à bout de souffle » de la Nouvelle-Calédonie, dans un contexte de finances publiques extrêmement contraintes, de fortes inégalités et de progression de la pauvreté.
Avec un taux d’endettement dépassant les 200%, le territoire est « sur la voie d’une cessation de paiements », a insisté récemment auprès de l’AFP Yannick Slamet, le membre du gouvernement en charge du budget, le 3 juillet.
« L’enjeu, dans cette vision de la Nouvelle-Calédonie française dans le Pacifique, est de savoir comment l’État nous accompagne dans une relance économique pour rendre la Nouvelle-Calédonie plus attirante et pour sortir de la noyade dans laquelle on est aujourd’hui », a abondé le loyaliste Gil Brial.
La convoitise de la Chine
L’impasse institutionnelle de l’archipel et ses difficultés économiques offrent à la Chine, principal acheteur du nickel calédonien, l’opportunité d’étendre son emprise économique sur l’archipel.
Dans son rapport intitulé Les opérations d’influence chinoises, l’IRSEM met en évidence la stratégie de soft-power de la Chine, qui consiste à influencer l’économie et la politique de la Nouvelle-Calédonie par des moyens discrets et efficaces, tels que le financement de partis politiques, de think-tanks, de décideurs publics, de chercheurs et de leaders d’opinion.
À la veille du troisième référendum sur l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie, son ancien député Philippe Gomès mettait déjà en garde contre « l’ogre chinois » en alertant : « demain la Chine sera présente pour proposer ses services mais à la sortie on sait que ces services, ça a un prix ».
Une « puissance d’équilibre » entre la Chine et les États-Unis
La visite du chef de l’État, qui se rendra également au Vanuatu et en Papouasie-Nouvelle-Guinée voisines, prendra donc une dimension géopolitique, dans une vaste zone dite « indopacifique » allant des côtes est-africaines aux côtes ouest-américaines, où Emmanuel Macron entend faire de la France une « puissance d’équilibre » entre la Chine et les États-Unis.
En équilibre sur le fil de la politique intérieure et de l’influence extérieure, l’enjeu majeur de la visite du chef d’État sera d’apporter des réponses convaincantes qui soient en mesure de contrer l’influence croissante de la Chine et de créer une vision d’avenir pour la Nouvelle-Calédonie.
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