Le musée national estonien situé à Tartu en Estonie présente l’histoire, la vie quotidienne et les traditions des Estoniens, des peuples finno-ougriens et d’autres minorités composant la population. L’agence française DGT (Dorell. Ghotmeh. Tane/Architectes), installée à Paris l’a conçu. Le projet a été sélectionné à l’issue d’une compétition internationale.
La réponse à un concours d’architecture
Le concours a été lancé avec l’objectif de sauvegarder les traces du passé, tout en marquant une direction vers une période nouvelle, un avenir moins sombre. Pour répondre à cette attente, le trio composé de Dan Dorell, Lina Ghotmeh et Tsuyoshi Tane a délibérément choisi de transgresser certaines directives du concours. Plutôt que d’installer le projet à l’emplacement proposé, ils l’ont situé dans le prolongement de la piste d’aviation laissée à l’abandon sur le site.
Résultat, le sol de la piste se transforme progressivement, adoptant une légère déclivité jusqu’à former la toiture du bâtiment. Par ce geste qui caractérise leur concept, les architectes ont inscrit le musée dans la trace d’une histoire douloureuse tout en symbolisant l’envol du pays après plusieurs siècles d’occupation.
Le mythe de Vanaïsa, la rencontre de l’aube et du crépuscule
Sur un terrain militaire en friche, le nouveau musée doit créer l’événement et raconter une histoire, celle d’une identité nationale. L’agence DGT a choisi de parler du mythe de Vanaïsa, histoire majeure en Estonie, qui célèbre à l’arrivée du printemps, celui de la rencontre de l’aube et du crépuscule. Le musée relate cette légende : deux bâtiments émergent du sol et symbolisent l’aube et le crépuscule.
Un espace central est libéré devenant l’atrium, à la fois espace de rencontre, de distribution et d’événements exceptionnels. Cet espace, dont l’échelle assoit le statut de l’équipement, est positionné de manière à réutiliser une construction existante en brique patinée, qui apporte une séquence inattendue dans ce lieu d’art. Il abritera des logements pour artistes en résidence.
Ce bâtiment, d’une surface de 34 000 m² et d’un kilomètre de long représente un défi environnemental. Il est défini par ses auteurs comme un « champ de mémoire ».
Renaître d’une histoire douloureuse
Envahie tour à tour par le Danemark, la Suède, la Russie, l’Allemagne, l’URSS, le troisième Reich puis de nouveau l’URSS, l’Estonie a connu une histoire mouvementée jusqu’en 1991, où elle a recouvré son indépendance. Après son intégration en 2004 à l’Union européenne, l’une des premières décisions du pays a été de construire un nouveau musée national à Tartu, capitale culturelle et universitaire du pays. L’ancien musée, qui avait vu le jour en 1909, était en ruine.
L’identité nationale a si souvent été ignorée, bafouée, mais après un siècle de réflexion, l’Estonie va lui dédier un gigantesque musée national. Des artistes, des peintres, des écrivains ont commencé à affirmer leur conscience nationale.
En prolongeant les traces de cette histoire dramatique, le musée national se transforme en un régénérateur urbain, le sol se transforme en toiture avec une légère pente qui symbolise l’envol du pays après plusieurs siècles d’occupation. Cette toiture qui décolle progressivement du sol, pour se prolonger vers un espace infini, invite le visiteur à pénétrer dans le paysage et dans le cœur du musée.
Un tour en bateau ou du patin à glace sur le lac
Du côté de la piste, le musée offre un lieu ouvert pour les chorales, les expositions, les performances. Il s’agit d’une grande place publique célébrant une histoire aussi riche que tourmentée. Le musée national d’Estonie n’est plus seulement un bâtiment mais une expérience à vivre dans un parc historique. Une ballade permettra de découvrir les ruines, des installations à l’air libre ou bien de faire un tour en bateau ou du patin à glace sur le lac. Le bâtiment se fond dans ce paysage typique de la nature estonienne. Il abrite des espaces d’exposition permanents et temporaires, des salles de concerts, de théâtre, de cinéma ainsi qu’un auditorium, un centre de recherche, une salle d’éducation, des laboratoires pour les conservateurs, un restaurant et un café.
Dans la partie dédiée aux archives, sont entreposés pas moins de 150 000 objets ethnographiques qui seront en partie visibles par le grand public.
Lieu d’histoire de conservation, mais aussi centre vivant de recherche et de création, lieu de vie, d’étude, de détente et de rencontre, c’est la maison des Estoniens. Bien au-delà de ses propres fonctions, elle a été conçue pour créer un point attractif, susceptible, par effet d’entraînement, de régénérer son environnement.
Un dialogue constant entre extérieur et intérieur
Attaché à la piste d’aviation devenue l’extension du musée, le bâtiment s’approprie une surface de plus d’un kilomètre de long et s’installe délicatement dans le paysage avec lequel il se confond, se laissant même traverser par lui. Un dialogue permanent avec la nature s’établit grâce à des percées vers l’extérieur et des vues cadrées sur le lac.
Dans toutes les directions, le musée se prolonge à l’extérieur. Ainsi, l’immense toit constitue une vaste place publique pouvant accueillir diverses manifestations artistiques, tandis qu’un parcours de balade traverse le musée dans sa largeur. L’édifice de grande dimension se fond dans le paysage. Il transforme positivement son contexte dans un dialogue constant entre intérieur et extérieur, vides et pleins.
La sérigraphie des vitrages extérieurs reproduit un motif traditionnel estonien. En hiver, elle s’apparente à des cristaux de glace habillant la façade. En été, le bâtiment reflète la verdure qui l’entoure. L’enveloppe est composée d’une double peau : une façade extérieure vitrée et une paroi intérieure en béton peu ouverte, l’objectif étant de limiter les échanges thermiques. Partout, des solutions architecturales innovantes ont été mises en œuvre pour rechercher la quasi-passivité énergétique. L’ensemble du musée a d’ailleurs obtenu le label bâtiment basse consommation (BBC).
Infos pratiques
Maître d’ouvrage : ministère de la Culture de l’Estonie, musée national Estonien et l’Union des Architectes Estoniens
Maîtrise d’œuvre : Rémy Marciano, architecte français.
Surface : 28 600 m²
Coût des travaux : 38,5 M€ HT, concours international de 2006.
Ce projet a reçu le Grand Prix AFEX (Architectes Français à l’Export) 2016 en étant choisi à l’unanimité du jury parmi une sélection d’une trentaine de bâtiments livrés à l’étranger par des architectes français.
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