Le festival du film de Berlin, qui débute jeudi, fait la part belle cette année aux réalisatrices et sélectionne pour la toute première fois un film produit par le géant américain Netflix.
Vitrine du cinéma en Europe avec les festivals de Cannes et de Venise, la Berlinale va proposer pour sa 69ème édition du 7 au 17 février 23 films en sélection officielle, dont 17 en compétition pour l’Ours d’or, décerné par un jury présidé par l’actrice française Juliette Binoche. Une page de l’histoire du festival va se tourner: il s’agit de la dernière édition dirigée par l’Allemand Dieter Kosslick, 70 ans, qui passera ensuite le relais, après 18 ans à la barre.
Un duo plus jeune, composé de Carlo Chatrian, actuel directeur du Festival du film de Locarno, et Mariette Rissenbeek, réalisatrice néerlandaise, lui succédera. Les réalisatrices seront représentées à un niveau inédit au sein de la compétition: 7 des 17 films en compétition, soit 41% des œuvres, ont été réalisés par des femmes. Avec respectivement 14% et 5% en 2018, Cannes et Venise font pâle figure.
« Les débats de l’année dernière nous ont ouvert les yeux et quand les yeux sont ouverts, vous prenez des décisions différentes », explique à l’AFP M. Kosslick à propos des mouvements #MeToo contre le harcèlement et #TimesUp visant la discrimination sexuelle dans le secteur du divertissement. Mais, assure le directeur, « on ne l’aurait pas fait si les films avaient été mauvais ». L’Ours d’or a d’ailleurs été décerné ces deux dernières années à des femmes, la Roumaine Adina Pintilie (« Touch Me Not ») et la Hongroise Ildiko Enyedi (« On Body and Soul »).
Pour la responsable du groupe de pression « Women and Hollywood », Melissa Silverstein, cette importante part de réalisatrices tombe d’autant mieux qu’aucune femme ne figure parmi les nominés aux Oscars du meilleur film ou réalisateur. Dans ce contexte, les festivals sont, selon elle, essentiels pour assurer la diversité du secteur: Un festival « permet de se faire remarquer, qu’on en parle dans les journaux du monde entier. Les gens verront votre film et les acheteurs et autres programmateurs le verront ».
Sera ainsi signé durant la Berlinale un engagement de parité, non contraignant, que Cannes, Venise et d’autres grands festivals ont déjà paraphé. La Danoise Lone Scherfig ouvrira la compétition avec la première mondiale de « The Kindness of Strangers », un drame qui se déroule à New York. La Française Agnès Varda, 90 ans, présentera un nouveau documentaire autobiographique hors compétition.
Les superstars indiennes Ranveer Singh et Alia Bhatt fouleront le tapis rouge pour la première de « Gully Boy » de Zoya Akhtar, une des rares réalisatrices à gros budget à Bollywood. Couronné à Venise en 2018 avec « Roma » mais toujours boudé par Cannes, Netflix sera pour la première fois en lice à Berlin avec « Elisa and Marcela » de l’Espagnole Isabel Coixet. Le festival berlinois voit des possibilités de coopération avec la plateforme payante de streaming.
« Il est important que les grands festivals de premier plan continuent de se battre pour le cinéma », fait valoir M. Kosslick. « Il s’agit maintenant de trouver des moyens de coexistence, comme l’ont fait le cinéma et la télévision », poursuit-il. « Mais nous devons trouver des moyens de protéger les productions pour qu’elles puissent d’abord être diffusées dans les salles de cinéma et ensuite seulement être diffusées en streaming ».
Parmi les films en compétition, « Grâce à Dieu », réalisé par le Français François Ozon est particulièrement attendu: il aborde les abus sexuels présumés commis par un prêtre français, que le cardinal Philippe Barbarin, jugé pour cette affaire, est soupçonné d’avoir couverts. Avant son départ, M. Kosslick a aussi lancé une invitation aux dirigeants du parti d’extrême droite Alternative pour l’Allemagne (AfD) à assister le 10 février à la projection du documentaire de Roberta Grossmann, « Les archives secrètes du ghetto de Varsovie ».
D.C avec AFP
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