L’armée israélienne a intensifié mardi son offensive contre l’organisation terroriste Hamas dans le sud de la bande de Gaza où des témoins ont fait état d’intenses bombardements faisant craindre un « scénario encore plus infernal », selon l’ONU, pour les civils pris au piège.
Engagée depuis le 27 octobre dans une offensive terrestre dans le nord du territoire palestinien assiégé, l’armée a étendu ses opérations au sol à l’ensemble de la bande de Gaza, près de deux mois après le début de la guerre déclenchée par l’attaque sanglante du Hamas contre Israël.
Depuis la reprise des combats le 1er décembre après sept jours de trêve, l’armée pilonne le sud du territoire, faisant de très nombreux morts et blessés dans cette région où des centaines de milliers de civils sont venus se réfugier depuis le début de la guerre, entassés dans des abris de fortune.
Ils sont désormais piégés dans un périmètre de plus en plus réduit à proximité de la frontière fermée avec l’Égypte, sans nulle part où aller, contraints de fuir sur quelques kilomètres pour tenter d’échapper aux bombes.
Le Hamas se cache délibérément parmi les civils.
Notre guerre est contre le Hamas, pas contre les Gazaouis.
Nous prenons des mesures pour minimiser les dommages causés aux civils alors que le Hamas les utilise comme boucliers humains. pic.twitter.com/JS25KRq6q0
— Tsahal (@Tsahal_IDF) December 4, 2023
« Un nouvel ordre d’évacuation »
Dans la nuit de lundi à mardi, des témoins ont signalé à l’AFP des frappes aériennes et des tirs d’artillerie près de la ville de Khan Younès, nouvel épicentre de la guerre, sur la ville voisine de Rafah, à la pointe sud du territoire, ainsi qu’à Deir al-Balah, plus au nord.
Les bombardements israéliens ont été précédés « d’un nouvel ordre d’évacuation depuis Khan Younès vers Rafah », « qui a provoqué la panique, la peur et l’anxiété », a déclaré lundi le directeur de l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa), Philippe Lazzarini.
« Au moins 60.000 personnes supplémentaires ont été contraintes de se déplacer vers des abris de l’Unrwa déjà surpeuplés (…) dont beaucoup ont été déplacées plusieurs fois » depuis le début de la guerre, a-t-il ajouté, précisant que l’ordre d’évacuation israélien « pouss(ait) les gens à se masser dans moins d’un tiers du territoire de la bande de Gaza », soit une centaine de kilomètres carrés.
L’agence palestinienne Wafa a par ailleurs fait état tôt mardi de « plusieurs » morts dans une frappe sur la ville de Gaza, plus au nord. La branche armée du Hamas a annoncé de son côté avoir tiré une salve de roquettes vers Beersheva, une ville du désert du Néguev, dans le sud d’Israël.
« Un scénario encore plus infernal »
Des organisations internationales s’alarment des risques pour les civils à Gaza, où « tous les services de télécommunications » sont à l’arrêt, en raison « d’une coupure des principaux réseaux de fibre du côté israélien », selon le groupe de télécoms palestinien Paltel. « Un scénario encore plus infernal est sur le point de se réaliser, auquel les opérations humanitaires ne pourront peut-être pas répondre », a averti la Coordinatrice humanitaire de l’ONU pour les Territoires palestiniens, la Canadienne Lynn Hastings.
Lundi, des dizaines de chars, de transports de troupes et de bulldozers israéliens sont entrés dans le sud du territoire palestinien à proximité de Khan Younès. Les militaires ont de nouveau largué sur cette ville des tracts sur certains quartiers avertissant de l’imminence d’un bombardement et ordonnant aux habitants d’en partir.
La présidente du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), Mirjana Spoljaric, a dénoncé les souffrances « intolérables » de la population, lors d’une visite lundi dans la bande de Gaza. « Ce qui m’a le plus choqué, ce sont les enfants qui ont des blessures atroces et qui ont également perdu leurs parents et n’ont personne pour s’occuper d’eux », a-t-elle ajouté.
Mardi dès le matin, des scènes de chaos se sont répétées à l’hôpital Nasser de Khan Younès, le plus grand du sud de la bande de Gaza, après les bombardements de la nuit. Sous les sirènes des ambulances, des blessés étaient transportés sur des civières, allongés dans de simples remorques ou portés par leurs proches, selon des images de l’AFP. Selon l’Unrwa, l’hôpital submergé par l’afflux de blessés, qui manque de personnel et de fournitures, abrite plus de mille patients ainsi que 17.000 déplacés.
Environ deux civils ont été tués pour chaque combattant du Hamas mort dans la bande de Gaza, ont affirmé lundi de hauts responsables militaires israéliens, sous couvert d’anonymat. « Il faut espérer que ce ratio sera beaucoup plus bas dans la prochaine phase de la guerre », a indiqué un de ces responsables, ajoutant qu’un logiciel de cartographie de haute technologie avait été déployé pour tenter de réduire le nombre de morts parmi ceux qui ne combattent pas.
En Israël, l’attaque menée le 7 octobre par des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza a fait 1200 morts, en majorité des civils, selon les autorités. En représailles, Israël a déclaré la guerre au Hamas et promis de détruire le mouvement terroriste islamiste au pouvoir dans la bande de Gaza depuis 2007.
L’armée a annoncé mardi matin le décès de trois de ses soldats la veille, portant le bilan à 78 soldats tués depuis le début de l’offensive terrestre. D’après l’armée, 137 otages enlevés en Israël le 7 octobre sont toujours retenus à Gaza, après la libération pendant la trêve de 105 autres otages, dont 80 en échange de 240 prisonniers palestiniens détenus par Israël.
La prolongation de la trêve en échec
Les efforts pour prolonger la trêve ont échoué en partie parce que le Hamas ne voulait pas que des femmes otages révèlent ce qu’elles avaient subi, selon un responsable américain, des accusations rejetées par le mouvement islamiste. D’après l’ONU, 1,8 million de personnes, sur 2,4 millions d’habitants, ont déjà été déplacées par la guerre dans le territoire palestinien où les frappes ont détruit ou endommagé plus de la moitié des habitations.
Les Gazaouis ont reçu pour instruction de s’abstenir d’emprunter la route Salah al-Din et ont été redirigés vers d’autres itinéraires.
Une pause tactique locale prendra effet aujourd’hui dans la zone de Rafah jusqu’à 14h00, afin de permettre l’entrée d’aide humanitaire. https://t.co/gzX3efOaRv
— Tsahal (@Tsahal_IDF) December 5, 2023
Les besoins sont immenses dans le territoire soumis à un siège total par Israël depuis le 9 octobre, qui a provoqué de graves pénuries d’eau, de nourriture, de médicaments, d’électricité et de carburant. « Nous avons vu ce qui s’est passé dans le nord de Gaza. Cela ne peut pas servir de modèle pour le sud », a déclaré depuis Le Caire Ahmed Al-Mandhari, le directeur régional de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
L’armée israélienne a demandé aux organisations humanitaires internationales leur « soutien » pour « aider à la mise en place des infrastructures » à Al-Mawasi, zone côtière du sud de la bande de Gaza entre Khan Younès et Rafah, où Israël demande aux civils de se replier.
La guerre dans la bande de Gaza provoque aussi des violences en Cisjordanie occupée, à la frontière entre Israël et le Liban ainsi que des tensions dans différents endroits au Moyen-Orient, où les troupes américaines sont prises pour cibles.
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