Nouvelle-Zélande/mosquées: comparution pour meurtre d’un extrémiste de droite

16 mars 2019 03:08 Mis à jour: 16 mars 2019 03:11

Un extrémiste qui a fait un carnage dans deux mosquées de la ville néo-zélandaise de Christchurch durant la prière du vendredi, tuant 49 fidèles, dans une attaque qu’il a retransmise en direct sur les réseaux sociaux, a comparu pour meurtre samedi.

Brenton Tarrant, un Australien de 28 ans, est apparu menotté et vétu de la chemise blanche des prisonniers pour une brève audience à laquelle seule la presse pouvait assister, pour raisons de sécurité. L’ancien intructeur de fitness, qui se présente comme un militant d’extrême droite est resté impassible lorsque son inculpation lui a été signifiée. Il n’a pas demandé de libération sous caution et restera donc en prison jusqu’à la prochaine audience le 5 avril.

La Première ministre Jacinda Ardern a qualifié de « terroriste » cette double attaque, déplorant l’une des « journées les plus sombres » jamais vécues par ce pays du Pacifique Sud, réputé paisible. L’attentat, qui a soulevé une vague de condamnations à travers le monde, serait le plus meurtrier de l’époque contemporaine contre des musulmans dans un pays occidental.

Mme Ardern a précisé lors d’une conférence de presse que le suspect avait amassé un petit arsenal et disposait d’un permis de port d’armes, promettant des réformes. « Je peux vous garantir que nos lois sur les armes vont changer ». Les victimes venaient des quatre coins du monde musulman, a-t-elle souligné, en citant « le Pakistan, la Turquie, l’Arabie saoudite, le Bangladesh, l’Indonésie et la Malaisie ».

Les conditions de l’arrestation de Brenton Tarrant restaient floues, près de 24 heures après l’attaque. La police est avare d’informations sur les circonstances de son arrestation et ses éventuels complices.  Deux autres hommes sont en garde à vue, sans que l’on sache ce qui leur est reproché. Tarrant a diffusé en direct sur les réseaux sociaux les images du carnage, où on le voit passer de victime en victime, tirant sur les blessés à bout portant alors qu’ils tentent de fuir.

Les autorités bulgares ont également annoncé qu’elles enquêtaient sur un séjour du tireur en Bulgarie « du 9 au 15 novembre 2018 ». Avant de passer à l’action, l’homme, qui se présente comme un blanc de la classe ouvrière aux bas revenus, a publié sur Twitter un « manifeste » raciste de 74 pages. Il est intitulé « Le grand remplacement », en référence à une théorie complotiste concue par d’anciens nazis et populaire dans les milieux d’extrême droite selon laquelle les « peuples européens » seraient « remplacés » par des populations non-européennes immigrées.

Le document détaille deux années de radicalisation et de préparatifs. Il affirme que les facteurs déterminants dans sa radicalisation ont été la défaite à la présidentielle française de 2017 de la dirigeante d’extrême droite Marine Le Pen et la mort de la petite Ebba Åkerlund à 11 ans dans l’attaque au camion-bélier de 2017 à Stockholm. Il y rend aussi hommage au président américaine Donald Trump, lequel, interrogé vendredi soir à Washington, a estimé que l’idéologie de la suprématie blanche n’était pas une menace répandue.

Les comptes Twitter, Instagram et Facebook où ont été publiés la vidéo, les photos et le manifeste ont été suspendus. « Il est clair qu’on ne peut que décrire cela comme une attaque terroriste », a déclaré Jacinda Ardern. « Sur la base des éléments dont nous disposons, (l’attaque) semble avoir été bien planifiée ». Deux engins explosifs artisanaux ont ainsi été découverts dans une voiture et neutralisés, selon la police.

S’exprimant à Sydney, le Premier ministre australien Scott Morrison a décrit le tireur comme un « terroriste extrémiste, de droite et violent ». Les deux cibles du tireur étaient la mosquée al Nour dans le centre-ville, où 41 personnes ont péri, et une seconde en banlieue, à Linwood, où sept personnes sont mortes. Une 49e victime a succombé à l’hôpital. Parmi les morts figureraient des femmes et des enfants.   Environ 48 blessés par balles ont été hospitalisés à l’hôpital de Christchurch, dont de jeunes enfants avec des blessures allant de légères à graves.

Parmi les survivants figure un Palestinien qui a raconté avoir vu un homme être abattu d’une balle dans la tête. « J’ai entendu trois coups de feu rapides et après environ dix secondes, ça a recommencé. Cela devait être une arme automatique, personne ne pourrait appuyer sur la gâchette aussi vite », a expliqué cet homme à l’AFP. « Puis les gens ont commencé à sortir en courant. Certains étaient couverts de sang ».

Les images du tireur sont « extrêmement pénibles », a prévenu la police néo-zélandaise. Les autorités ont averti les internautes qu’ils pourraient encourir jusqu’à 10 ans de prison en cas de partage de cette vidéo, diffusée sur Facebook Live et réalisée avec une caméra apparemment fixée sur le corps du tireur. On y voit un homme blanc rasé de près aux cheveux courts conduisant sa voiture jusqu’à la mosquée al Nour. On le voit ensuite entrer dans l’édifice et tirer sur les fidèles en passant de pièce en pièce.

Outre la vidéo, dont l’AFP a vérifié l’authenticité mais qu’elle ne publiera pas, des photos liées au tireur ont été postées sur les réseaux sociaux montrant des armes semi-automatiques recouvertes des noms de personnages de l’histoire militaire, dont des Européens ayant combattu les forces ottomanes aux XVe et XVIe siècles.

Cette tragédie a provoqué une onde de choc en Nouvelle-Zélande, un pays de cinq millions d’habitants dont seuls 1% se disent musulmans. La Nouvelle-Zélande, qui s’enorgueillit d’être un endroit sûr et accueillant, ne recense qu’une cinquantaine de meurtres par an.

Les forces de l’ordre ont demandé aux fidèles d’éviter les mosquées « où que ce soit en Nouvelle-Zélande ». Le niveau d’alerte a été relevé de « bas » à « élevé ». La police s’est rendue sur une propriété à Dunedin (sud-est) ayant un rapport avec l’attaque et le voisinage a été évacué. Cette ville était citée dans le manifeste du suspect comme sa cible originelle.

Un témoin a raconté au site internet d’information Stuff.co.nz qu’il était en train de prier à la mosquée al Nour quand il a entendu des tirs. En prenant la fuite, il a vu sa femme morte devant l’édifice. Un autre homme a dit avoir vu des enfants se faire abattre. « Il y avait des corps partout ». Un témoin a expliqué à Radio New Zealand qu’il avait entendu des coups de feu et vu quatre personnes gisant au sol, « avec du sang partout ». 

Des actes d’héroïsme ont été rapportés à la mosquée de Linwood, où selon un témoin, Sayed Mazharouddine, un homme a réussi à arracher une arme à l’assaillant, qui a interrompu sa fusillade et a couru vers une voiture qui l’attendait.

D.C avec AFP

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