« Un mélange de peur et d’espoir » : la joueuse d’échecs franco-iranienne Mitra Hejazipour oscille entre ces sentiments contradictoires à la veille du premier anniversaire de la mort de Mahsa Amini, dès lors qu’elle pense à la contestation populaire iranienne.
Malgré « la peur de la violence » du régime qui « tente d’emprisonner les gens pour éviter les manifestations par avance », « tous les facteurs pour une révolution sont déjà arrivés » et « la volonté des gens est plus forte que la répression », témoigne à l’AFP la nouvelle championne de France d’échecs, naturalisée en mars, et qui a réussi lundi à se hisser à la troisième place des championnats du monde par équipes avec son nouveau pays.
Refus de porter le voile
En décembre 2019, se sentant « étouffée » par les règles de la République islamique, elle refuse de porter le voile et montre ses longs cheveux bruns lors de Mondiaux à Moscou, ce qui entraîne son exclusion de la sélection iranienne.
Elle devient alors la seconde pratiquante iranienne à être renvoyée pour cette raison, deux ans après Dorsa Derakhsani, qui concourt désormais pour les États-Unis. « Ce sont les échecs », qu’elle a démarré « à six ans avec (son) père », qui lui ont « permis cette liberté », admet, reconnaissante, cette prodige de la discipline. « J’ai eu cette chance parce que je voyageais beaucoup et parce que je parlais avec des gens de différentes cultures et religions. »
La première fois que Mitra Hejazipour s’est publiquement affichée sans son foulard, c’est sur une photo prise en Allemagne, publiée sur son compte Instagram en février 2018, raconte-t-elle. « Impressionnée » par le geste de la journaliste iranienne Vida Movahed quelques semaines plus tôt, dont la photo, son voile accroché au bout d’un bâton, est devenue un symbole de la résistance, elle souhaitait elle aussi « raconter ce sentiment de liberté quand on sent le vent souffler sur ses cheveux ». Elle affirme toutefois avoir dû retirer cette publication à la suite de messages de menaces envoyés par le régime.
« Aucune dictature n’a tenu et finit toujours par chuter »
« Contente » de vivre depuis début 2019 en France, d’abord à Brest où se situe son club, puis à Paris où elle a validé des études en informatique, Mitra Hejazipour, trente ans, confie toutefois sa « frustration » pour les Iraniennes restées au pays, dont elle suit la situation sur les réseaux sociaux, mais aussi en contactant parfois ses proches.
« On veut un changement de régime car on est vraiment fatigués. Cela fait 44 ans qu’ils tuent ou emprisonnent les gens, créent des polémiques internationales et ne pensent jamais au peuple », s’indigne-t-elle dans un français soutenu. La grande maître internationale d’échecs tente de se rassurer sur le fait que les mollahs « ne peuvent pas emprisonner tout le monde » et constate que le hijab, « la base du régime de la République islamique », est « de moins en moins porté » par les jeunes Iraniennes.
Depuis la France, elle cherche à « montrer aux Iraniennes qu’elles ne sont pas seules », en participant à des mobilisations et en racontant « la situation en Iran ». Sa manière à elle d’aider, qu’elle perçoit comme « la moindre des choses ». Et de lancer : « Il faut croire à un changement car les gens sur place résistent, et qu’historiquement, aucune dictature n’a tenu et finit toujours par chuter. »
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