Les groupes rivaux palestiniens ont reporté, à deux jours de l’échéance, un transfert de pouvoirs très attendu dans la bande de Gaza sans fournir le moindre plan pour sauver cette entreprise aux enjeux humains et politiques pourtant considérables.
Les deux principales organisations palestiniennes, le Fatah et le Hamas, ont annoncé mercredi soir remettre au 10 décembre la passation initialement prévue d’ici à vendredi, confortant les nombreux sceptiques qui prédisent depuis le départ l’échec de cette énième tentative de réconciliation entre frères ennemis.
Objet d’un accord signé le 21 octobre au Caire, le transfert a calé dès qu’il s’est agi de le mettre en œuvre sur le terrain, quand des fonctionnaires appelés à reprendre leur poste après des années d’inactivité se sont retrouvés bloqués à l’entrée des ministères de Gaza par les délégués syndicaux proches du Hamas.
Le mouvement islamiste Hamas avait accepté au Caire de rétrocéder à l’Autorité palestinienne la place dont il l’avait évincée par la force en 2007.
Le Hamas, considéré comme terroriste par l’Union européenne, les États-Unis et Israël, et ostracisé par une grande partie de la communauté internationale, gouvernait depuis sans partage l’enclave coincée entre Israël, Égypte et Méditerranée.
L’Autorité internationalement reconnue censée préfigurer un État palestinien indépendant ne gouvernait plus, avec les restrictions imposées par l’occupation israélienne qu’à des fragments de Cisjordanie, séparée de la bande de Gaza par le territoire israélien.
Le retour annoncé de l’Autorité à Gaza a fait naître l’espoir de jours meilleurs chez des Gazaouis éprouvés par les guerres, la pauvreté et l’enfermement causé par les blocus égyptien et israélien. L’ONU veut croire prudemment en une chance de ranimer le processus de paix moribond avec Israël.
Depuis le 12 octobre, le Hamas et l’Autorité –dominée par le Fatah laïc et modéré– se sont montrés incapables de surmonter les obstacles pourtant annoncés en travers de leur route, à commencer par le sort des fonctionnaires de l’un et l’autre dans l’enclave, et le contrôle de la sécurité.
Après plusieurs jours d’acrimonie à peine contenue, le ton est monté mercredi quand le syndicat de la fonction publique proche du Hamas a empêché les fonctionnaires de l’Autorité de reprendre leur service.
Après avoir chassé l’Autorité de Gaza, le Hamas a recruté des dizaines de milliers de fonctionnaires pour mettre sur pied son administration. Les dizaines de milliers de fonctionnaires employés jusqu’alors par l’Autorité ont continué à être payés par cette dernière, tout en restant chez eux dans leur grande majorité.
Mardi, l’Autorité avait appelé ces fonctionnaires à retourner au travail. Quand ils ont été bloqués, Fatah et Hamas se sont accusés de manquer à l’accord du Caire.
Le sujet est éminemment sensible, les fonctionnaires faisant vivre beaucoup de monde à Gaza dont l’économie est à genoux, avec plus de 40% de la population active au chômage et un taux de pauvreté du même ordre.
Dans la soirée, le Hamas a annoncé dans un communiqué le report du transfert de pouvoirs au 10 décembre. Le Fatah a expliqué que cet ajournement visait à « finaliser des dispositions afin que la réconciliation puisse être menée à terme ».
Ils n’ont donné aucun détail sur leurs intentions. Le Hamas veut voir ses fonctionnaires intégrés dans l’administration de l’Autorité. Mais le coût serait exorbitant pour une Autorité déjà à la peine financièrement.
Le sort des fonctionnaires n’est que l’un des écueils sur la voie de la réconciliation. L’Autorité exige un contrôle total de la sécurité dans le territoire. Le Hamas, dont le bras militaire est réputé fort de 25.000 hommes et de milliers de roquettes, refuse de rendre les armes.
Le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas n’a par ailleurs toujours pas levé les sanctions financières imposées en 2017 pour forcer la main du Hamas.
Le professeur d’université et ancien ministre de l’Autorité, Ghassan Khatib, doute que le Fatah et le Hamas parviennent en dix jours à régler ces différends.
L’annonce du report a été prise sous la pression de l’Égypte, soucieuse de préserver le processus et inquiète d’une possible détérioration de la situation à Gaza et de ses répercussions sur le Sinaï voisin, en proie à une insurrection jihadiste, dit-il.
« Ce qui est le plus probable, c’est que, dans dix jours, (les groupes palestiniens) annoncent des progrès partiels, ou bien qu’ils annoncent un nouveau report », dit-il.
Au moins les dix jours peuvent-ils permettre à l’Autorité de chercher de l’argent auprès de la communauté internationale pour sauver la réconciliation, ajoute M. Khatib.
R.B avec AFP
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