La fiction annonce parfois la réalité. Que serait-il passé si les dirigeants mondiaux avaient pris au sérieux Sir Arthur Conan Doyle (le créateur de Sherlock Holmes) et sa nouvelle Danger! publiée 18 mois avant le début de la Première Guerre mondiale?
Sir Arthur Conan Doyle avait écrit sur une guerre fictive où un pays imaginaire met la Grande-Bretagne en déroute grâce aux sous-marins. Peu après, les U-boat allemands sont devenus parmi les armes les plus efficaces de la Première et de la Seconde Guerres mondiales.
C’est maintenant qu’un roman au sujet d’une guerre fictive entre les États-Unis, la Chine et la Russie adopte une approche similaire. Cette fois, le livre reçoit une attention surprenante du Pentagone et de la communauté militaire.
Tout comme la mise en garde de Doyle, le roman Ghost Fleet: A Novel of the Next World War (Flotte fantôme: un roman sur la prochaine guerre mondiale) de P.W. Singer et d’August Cole n’est pas entièrement fictif. Se déroulant dans les années 2020, le roman prend en compte les armements, les compressions budgétaires et les stratégies qui apparaissent aujourd’hui et démontre ce qui pourrait très bien se produire dans cinq ans.
«Nous constatons l’émergence d’un étalage de technologies qui, jusqu’à récemment, appartenaient à la science-fiction», affirme M. Singer en entrevue téléphonique.
La guerre de demain
Ghost Fleet met en jeu certains armements actuellement en développement qui vont probablement influencer les guerres de demain, de la cyberguerre aux drones, et de l’intelligence artificielle à la réalité virtuelle. Tout comme la mise en garde de Sir Arthur Conan Doyle à la Grande-Bretagne, Ghost Fleet signale que les États-Unis pourraient ne pas être prêts.
Les auteurs connaissent bien le sujet. P.W. Singer est un stratège à la New American Foundation et écrit au sujet des nouvelles armes chinoises pour le blogue Eastern Arsenal du magazine Popular Science. August Cole est un ex-journaliste du Wall Street Journal spécialisé dans le domaine de la défense.
C’est en partie en raison de l’expertise des deux auteurs que l’intérêt pour le roman dépasse le pur divertissement.
Au cours de la tournée pour faire la promotion du livre, il y a eu une présentation devant 600 officiers terminant leur formation au Naval War College, des discussions à cercle restreint avec des gens du Pentagone ainsi que les événements habituels avec les médias.
Dans les textes de quatrième couverture, l’amiral Jonathan Greenert – commandant des opérations navales américaines – qualifie le roman de «livre captivant… réfléchi, stratégique et pertinent».
L’ex-commandant suprême des Forces alliées (OTAN), l’amiral James Stavridis, écrit: «Il s’agit d’un plan détaillé des guerres du futur et donc il doit être lu maintenant!»
Les auteurs soulèvent plusieurs questions importantes: que surviendra-t-il si le régime chinois réussit à établir le renminbi comme monnaie de réserve? Que surviendra-t-il s’il y a croissance du marché de l’énergie alternative et que le régime chinois contrôle le métal des terres rares? Que se passe-t-il lorsque sa marque de diplomatie continue de se propager?
Plus important encore, le livre démontre ce à quoi pourrait ressembler une guerre contre le régime chinois, avec ses stratégies conçues en fonction d’armements et une approche à la guerre qui demeure peu comprise en Occident.
C’est le genre de livre qui cherche à secouer les lecteurs – particulièrement ceux qui connaissent les stratégies préliminaires chinoises – avec l’évidence que oui, ils pourraient faire ça, et non, nous ne serions pas préparés.
Les auteurs ont également fait leurs recherches. Il y a 374 notes de bas de page dans le livre au sujet de technologies et tendances émergentes qui ancrent l’histoire dans la réalité.
P.W. Singer affirme que le livre est un «mélange de fiction et de non-fiction» qui «utilise la fiction pour explorer des technologies et des questions réelles».
«Les gens l’aiment, franchement comme roman à lire sur la plage – les critiques sont bonnes pour le côté roman», explique-t-il. «Mais beaucoup de responsables militaires l’ont trouvé utile, puissant et explicatif.»
Prédictions justes
Déjà, Ghost Fleet a vu certaines de ses prédictions se réaliser. Le livre débute avec un épisode où un avion de surveillance P-8 Poseidon américain est menacé par des soldats chinois sur les ondes radio. Le passage aurait été écrit il y a 18 mois, indique M. Singer.
En mars dernier, un événement semblable est survenu. Un P-8 Poseidon de la marine américaine a survolé le récif de Fiery Cross en mer de Chine méridionale. Un officier chinois, sur un ton furibond, a ordonné sur les ondes radio à l’avion de quitter les lieux.
M. Singer a des sentiments mitigés par rapport à sa prédiction juste. Après tout, August Cole et lui ne souhaitent pas que la tendance se maintienne avec ce roman qui aborde la Troisième Guerre mondiale.
Toutefois, c’est aussi une des raisons pour lesquelles Singer voulait écrire Ghost Fleet. D’un côté, c’est une œuvre pour divertir, de l’autre, c’est un avertissement aux dirigeants militaires américains au sujet des développements militaires en Chine visant à gagner une guerre contre les États-Unis.
Le programme chinois Massue de l’assassin est conçu pour combattre un adversaire supérieur sur le plan technologique. Il comprend la cyberguerre, la guerre spatiale et d’autres systèmes qui pourraient empêcher les forces armées américaines de combattre.
«Nous utilisons le terme “guerre asymétrique” pour parler des gens qui exploitent nos faiblesses», explique M. Singer. «La Massue de l’assassin transforme les forces en faiblesses.»
Il souligne qu’alors que plusieurs experts qualifient l’intrusion chinoise alléguée du Bureau de la gestion du personnel (qui s’occupe des cotes de sécurité des fonctionnaires fédéraux américains) de «Cyber Pearl Harbor», l’intrusion n’est rien si l’on compare à ce qu’une véritable cyberattaque militaire ressemblerait. Le roman dépeint de manière réaliste une telle attaque.
Une attaque du genre déborderait rapidement les frontières «comme jamais vu auparavant», estime P.W. Singer.
Leçons de l’histoire
L’accent n’est pas que sur le côté militaire. Le roman s’attaque aux notions communes que le commerce et la diplomatie entre les États-Unis et la Chine permettront d’éviter un conflit.
Alors que plusieurs experts affirment que Washington et Pékin sont en guerre froide, P. W. Singer fait remarquer qu’il y a plusieurs différences dans les relations que les États-Unis avaient avec l’Union soviétique.
«Les États-Unis n’avaient pas de relation commerciale avec l’Union soviétique», indique-t-il.
Cependant, si l’on tient compte de l’histoire, de telles relations pourraient ne pas être cruciales. «La France et l’Allemagne étaient les plus grands partenaires commerciaux, mais ils sont quand même entrés en guerre», souligne M. Singer.
Version originale: Why a Novel on War With China Has the Pentagon Talking
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