Homme à tout faire de la campagne en 2017 qui s’est rendu indispensable par son dévouement auprès du couple Macron, Alexandre Benalla a profité de sa position au plus près du sommet de l’État, jusqu’à la faute, qui le conduit vendredi de nouveau devant un tribunal.
Longtemps il n’a été que l’ombre portée d’Emmanuel Macron, sa silhouette trapue, sa courte barbe et ses yeux noirs relégués en arrière plan des photos, avant d’en devenir le sujet principal. À 31 ans, Alexandre Benalla a associé son patronyme à l’affaire la plus embarrassante du premier quinquennat Macron, dont les répliques ont enrayé la bonne marche du pouvoir.
Issu d’un quartier populaire d’Évreux, ce fils de professeurs titulaire d’une licence de droit s’est rapidement orienté vers les métiers de la sécurité, sa passion. En 2010, il intègre le service d’ordre du PS, formé par son chef emblématique Éric Plumer, qui se souvient d’un jeune homme « calme et posé », « très sérieux dans les missions » assignées.
Après avoir accompagné un temps Martine Aubry, M. Benalla travaille brièvement pour Arnaud Montebourg, alors ministre du Redressement productif : « Je m’en suis séparé au bout d’une semaine après une faute professionnelle d’une première gravité : il avait provoqué un accident de voiture en ma présence et voulait prendre la fuite », avait-il raconté.
M. Benalla débarque en macronie début juillet 2016, recruté par Ludovic Chaker, alors secrétaire général d’En Marche. D’abord bénévole, il est embauché à l’automne par le mouvement pour assurer la sécurité d’Emmanuel Macron et devient rapidement une figure connue et appréciée du premier cercle du candidat.
Un « couteau suisse » qui « voulait tous les gadgets »
« Il a été repéré comme quelqu’un qui réglait les problèmes pratico-pratiques de manière très efficace. Il pense à tout, c’est le couteau suisse », témoigne un pilier de la campagne. « Il était là tout le temps. Il venait ouvrir le bureau à 6h30 si personne n’avait pris le ‘slot’ de la permanence de sécurité. C’est lui qui faisait la nuit si personne d’autre ne le faisait », abonde un autre.
En campagne, dans certaines situations tendues comme à l’usine Whirlpool d’Amiens, M. Benalla est aussi celui qui dit au candidat « c’est possible » quand les policiers chargés de la protection de M. Macron renâclent. En cela, le chef de l’État lui restera reconnaissant : « Quoiqu’il advienne dans cette affaire, je n’ai pas à oublier cet engagement », lance M. Macron quand le scandale éclate.
Récompensé par un poste de chargé de mission à la chefferie de cabinet, dédié aux déplacements du président, M. Benalla s’immisce dans les failles du système : « il voulait tous les gadgets », soupire un conseiller du Palais. Passeports diplomatiques, badge d’accès à l’hémicycle de l’Assemblée, voiture de fonction…
Lieutenant-colonel en 2017 et des amitiés troubles
Réserviste dans la gendarmerie dans l’Eure, où il officia aux côtés du futur ministre des Armées Sébastien Lecornu, il obtient aussi en 2017 le grade élevé de lieutenant-colonel. Et un port d’arme lui est alloué, malgré un premier refus du ministère de l’Intérieur.
Il cultive, avec Vincent Crase, un ami de dix ans, lui aussi employé à la sécurité de la campagne et salarié d’En Marche, des amitiés troubles, comme avec l’homme d’affaires Alexandre Djouhri. Jusqu’à être soupçonné d’avoir conclu en juin 2018 un juteux contrat de protection pour la famille d’un sulfureux oligarque russe. Un « deal » désormais au cœur d’une enquête du Parquet national financier.
Un an de prison ferme
Dans le même temps, M. Benalla participe à une réflexion sur la refonte de la sécurité de l’Élysée. Projet qui a pu susciter des inimitiés, notamment au sein du ministère de l’Intérieur. Sa chute a commencé lorsqu’il a été identifié dans une vidéo, filmée lors des défilés du 1er mai 2018 et diffusée par Le Monde en juillet. Il y est identifié en train de violenter un manifestant.
Un scandale, qui lui vaut d’être rejugé vendredi en appel à Paris après avoir été condamné à un an de prison ferme en première instance. Mais aussi un véritable feuilleton, alimenté par des révélations de presse, notamment sur sa rencontre au Tchad en décembre 2018 avec le président Déby dans un rôle d’émissaire pour un homme d’affaires israélien.
À la tête d’une entreprise de services de sécurité et défense (Comya) et consultant pour une ONG genevoise, M. Benalla, qui vit en Suisse avec son épouse et ses deux enfants, se rend régulièrement en Afrique (Mozambique, Mali ou encore Soudan) pour ses activités, ou plus récemment en Ukraine. Lui qui s’emportait contre une « machine pour détruire sa réputation » affirme avoir coupé les ponts avec le monde politique. « Il a été lâché par tout le monde. Il est tout de même drôlement solide comme garçon », souffle un ami.
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