Dans ses vœux pour 2017, la Confédération générale des SCOP vise les 70 000 emplois. Avec l’engouement actuel pour les nouvelles formes d’économie collaborative, le secteur coopératif paraît avoir le vent en poupe. En 2015, 2 855 SCOP employaient 51 500 salariés. L’ampleur du phénomène ne peut donc être ignorée. Mais qu’en est-il des forces et faiblesses de ce domaine d’activité si particulier ?
Les spécificités des SCOP
La SCOP, Société coopérative et participative, est juridiquement une entreprise de type SA ou SARL (voire SAS mais rarement), dans laquelle les salariés sont également les associés de l’entreprise.
Les sociétés coopératives et participatives (SCOP) sont des sociétés commerciales qui vivent et se développent sur le secteur concurrentiel. Elles sont présentes dans tous les secteurs d’activité (commerce, artisanat, services…).
Leur originalité : les salariés sont associés majoritaires et détiennent au moins 51 % du capital et 65 % des droits de vote. En Assemblée générale, les salariés associés décident ensemble des orientations à prendre et élisent leurs dirigeants selon le principe 1 personne = 1 voix, quelle que soit la part de capital détenue par chacun.
En matière de répartition des bénéfices, le résultat est partagé entre :
- les salariés, sous forme de complément de salaire, d’intéressement ou de participation : au moins 25 % du bénéfice,
- les salariés associés, sous forme de dividendes : pour une part inférieure à celle des salariés,
- les réserves de l’entreprise (la dotation aux réserves alimente ses fonds propres) : 15 % minimum (réserve légale).
Les SCOP relèvent de l’économie sociale et solidaire et portent donc un double projet économique et social, qui peut recouvrir différents objectifs. On peut les qualifier de ce fait d’organisations hybrides (Juban, Charmettant, Magne, 2015).
L’originalité du statut des SCOP/statuts SA ou SARL
En droit des sociétés, il est d’usage d’évoquer la formation d’un contrat de société. Dans le cas d’une SCOP, ce contrat existe mais prend une forme originale. Un SCOP peut être soit une SARL, une SA, dans la majorité des cas. De même, une des conditions de formation spécifique au contrat de société est l’engagement de chaque associé à s’impliquer dans les affaires sociales (notion d’affectio societatis). Cela semble particulièrement le cas des SCOP.
Au sein des entreprises « classiques », le régime social des dirigeants dépend du statut juridique. Les gérants majoritaires de SARL sont considérés comme TNS (travailleurs non salariés). Cela signifie qu’ils relèvent du Régime social des indépendants (RSI). Il en est de même pour les entrepreneurs individuels et l’associé unique d’EURL.
Les gérants minoritaires ou égalitaires de SARL, les présidents et directeurs généraux de SA, les présidents de SAS sont quant à eux considérés comme des « assimilés-salariés » car ils bénéficient de la même protection sociale que les salariés, à l’exception de l’assurance chômage. Ils ne peuvent pas prétendre par ailleurs aux dispositions du droit du travail (par exemple des règles applicables en matière de licenciement ou des congés payés) au titre de leur mandat social.
Dans une Scop, tous les associés coopérateurs, y compris les dirigeants mandataires sociaux, ont la qualité de salarié (notamment au regard de l’assurance chômage), ce qui est un réel avantage.
Le nombre d’associés est de sept au minimum dans une SCOP SA et deux dans une SCOP SARL. Le capital est variable avec un minimum de 18 500 euros en SCOP SA alors qu’il n’est que de 30 euros (15 euros par associé) dans une SCOP SARL. Le Statut est donc très abordable pour les salariés. Les dirigeants sont élus pour quatre ans par les salariés. Il s’agit d’un fonctionnement atypique qui rappelle les règles de nomination des IRPs (instances représentatives du personnel) dans les entreprises « classiques ».
Des objectifs sociaux
Il convient de se poser la question sur l’objet financier propre à la formation des contrats de société, en ce qui concerne les SCOP. En effet, dans une entreprise classique, la volonté de s’associer rejoint le souhait d’un gain financier. Dans le cas des SCOP, le souhait de s’associer provient d’un souhait de maintenir l’activité, de partager une passion commune.
Parmi les objectifs de création des SCOP, on note l’insertion sociale comme celui de la SCOP Liesse en Normandie, la reprise d’entreprise par les salariés suite au départ en retraite du dirigeant comme pour Hisa Ingénierie, ou la reprise d’entreprise en difficulté par les salariés (ex : SCOP SIC à Bolbec).
Une nécessité de recruter des profils spécifiques : une difficulté
Compte tenu du double projet économique et social des SCOP, les difficultés de recrutement sont réelles. Dans le cas des SCOP, l’enjeu du recrutement est particulièrement important dans la mesure où il n’existe pas d’individus « hybrides » (Battilana et Lee, 2014).
Le succès du recrutement reposera sur la mise en relation (attractivité) entre candidats et employeurs et le mode de sélection. La cooptation semble jouer un rôle crucial (Juban,Charmattant,Magne, 2015). Développer un réseau, notamment entre dirigeants de SCOP, est donc vital.
Une autre solution est de recruter de jeunes diplômés sans expérience professionnelle antérieure dans une entreprise classique et leur faire ainsi découvrir l’environnement spécifique des SCOP. Enfin, la pratique du « couplage sélectif » (Pache et Santos, 2013) permet aussi, dans une SCOP avec une identité forte, de faire valoir tantôt la dimension sociale, tantôt la dimension des compétences professionnelles, en fonction de l’avancée dans le processus de recrutement.
Ainsi, on constate sur le terrain que les dirigeants de SCOP rencontrent des difficultés de recrutement. A contrario, plusieurs arguments peuvent être avancés par ces entreprises pour recruter des compétences :
- un statut privilégié pour le directeur ;
- un fonctionnement démocratique ;
- une participation équitable aux résultats ;
- une liberté de prise de décision ;
- un fonctionnement autonome, indépendant de toute maison mère ou fonds de pension.
Enfin, les salariés des SCOP sont acteurs de la gestion de l’entreprise. À ce titre, ils deviennent aussi acteurs du recrutement des nouveaux collaborateurs. C’est là que réside toute la difficulté : recruter ses futurs collègues n’est pas chose aisée. Les nouveaux arrivants devront adhérer à un projet d’entreprise hybride, partager d’emblée des valeurs communes. La sélection va donc bien au delà de critères de compétences habituels. Le savoir-être sera au cœur de la sélection ! Rejoindre une SCOP, c’est un peu adopter une nouvelle famille !
Virginie Hachard, Doyenne associée de la Faculté, Enseignant-chercheur en entrepreneuriat, Laboratoire Metis, École de Management de Normandie et Caroline Diard, Enseignant-Chercheur en Management des Ressources Humaines – Laboratoire Métis, École de Management de Normandie
La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.
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