Avec un rythme qui s’accélère en cette fin d’année, on prévoit la fermeture de plus de 300 pharmacies en 2023, c’est-à-dire presqu’une par jour. Le nombre d’officines ouvertes a baissé de 10% dans les dix dernières années. Cette tendance est continue depuis 2016.
En 2023, un total de 251 pharmacies avaient déjà fermé définitivement leurs portes entre le 1er janvier et début novembre, selon RTL, et le rythme s’accélère. Ces fermetures vont de pair avec le phénomène des déserts médicaux qui a poussé, il y a quelques jours, UFC-Que Choisir à attaquer l’État en justice pour « inaction ».
Par exemple, à Migennes dans l’Yonne, la commune de 7200 habitants a perdu la majorité de ses médecins en l’espace de trois ans, ainsi que deux pharmacies fin 2022, rapporte Alternatives économiques. « Sans médecin ni pharmacien, les gens se disent : puisque c’est comme ça, je ne prends plus mon traitement ! J’ai eu des patients qui ont fait des infarctus à cause de cela », a déclaré Maria Marot, gérante de la pharmacie de la Gare, une des deux dernières officines ouvertes à Migennes.
La tendance va crescendo. Déjà en 2016, l’Ordre des pharmaciens indiquait dans son rapport annuel qu’une pharmacie fermait tous les deux jours en France. Sur les 74.754 pharmaciens recensés au 1er janvier 2016, 2347 d’entre eux étaient âgés de 66 ans et plus, soit deux fois plus que 10 ans auparavant. En effet, ces derniers retardaient leur départ à la retraite.
Un manque de 15.000 pharmaciens
Les raisons de toutes ces fermetures est principalement due au fait qu’il y a de moins en moins de pharmaciens. En effet, la profession attire beaucoup moins de jeunes. Les horaires sont chargés, le métier est moins rémunérateur et les prix pour reprendre une officine sont exorbitants – cela reste de loin le fonds de commerce le plus cher et le plus long à rembourser. Résultat : des places vacantes dans les écoles alors qu’il manquait déjà 15.000 pharmaciens dans l’Hexagone en octobre 2022, indique TF1.
« On travaille le samedi, on travaille le soir jusqu’à 19 heures, jusqu’à 20 heures », explique l’un d’eux. Sans compter les gardes. La crise du Covid et la pénurie de médecins n’ont rien amélioré à la situation puisque les pharmaciens, déjà débordés pendant leurs longues journées de travail, ont vu d’autres fonctions leur être attribuées : vaccination, dépistage du virus, prescription de médicaments pour certaines pathologies ou encore coordination avec les autres professionnels de la santé.
« J’étais à 60 heures par semaine tout le temps, sans prendre de vacances. On avait l’impression que nos journées n’étaient jamais suffisantes », raconte Marie Zisman, soulagée d’être fraichement retraitée à l’âge de 68 ans après avoir, en vain, essayé de trouver un repreneur pendant six ans.
Les petites pharmacies sont les plus touchées
Les officines les plus touchées par ces fermetures sont les petites pharmacies de quartier ou de village. Celles qui sont rentables sont les gros établissements dans les grandes villes, en particulier celles qui ont développé la parapharmacie ou qui ont trouvé d’autres sources de revenus.
Dans les 25.550 villages de moins de 1000 habitants, seulement 1000 officines sont comptabilisées alors que l’ensemble de ces communes représentent près de 14% de la population nationale, indiquent les données gouvernementales.
Le maillage reste toutefois plutôt dense et homogène et la désertification pharmaceutique n’est pas à craindre à court terme puisqu’il y a encore 30 officines pour 100.000 habitants.
Des études longues et difficiles
Dans les écoles, les études de pharmacien relèvent d’un parcours du combattant. Très longues, elles durent une dizaine d’années en moyenne, avec un concours d’accès très sélectif.
À la rentrée 2022, il restait 1100 places vacantes sur environ 3200 places ouvertes en deuxième année de pharmacie, soit un tiers des places qui n’avaient pas trouvé preneur. En comparaison, il y avait 163 places vacantes en 2021. Cette année, ce nombre était de 471, ce qui est « insuffisant par rapport aux besoins des pharmaciens dans les territoires » selon l’Association nationale des étudiants de pharmacie de France (ANEPF).
Un vrai phénomène national
Dans certaines régions, il est encore plus difficile de trouver des candidats à la reprise d’une officine. « C’est un vrai phénomène national, un peu plus fort en Drôme et Ardèche, parce qu’on est loin des universités, donc c’est plus difficile d’attirer des stagiaires », explique à France Bleu Gilles Bonnefond, Drômois et porte-parole national des pharmaciens d’officine.
L’une des solutions trouvées par plusieurs pharmaciens est de fermer leur officine certains jours afin de pouvoir tenir le coup. « Je n’ai pas réussi à trouver de pharmacien pendant quatre mois, malgré mes offres. Je faisais des heures supplémentaires. À un moment donné, j’ai été forcée de fermer un samedi matin », précise Nadine Constantin, gérante d’une pharmacie à Valence.
D’autres pharmaciens trouvent des solutions originales pour ne pas fermer leur officine lorsqu’ils prennent leur retraite. Aux Hermites (Indre-et-Loire), Sylvie Drouet a décidé d’essayer de vendre la sienne pour un euro symbolique afin de sauver la vie de son village : « Petit à petit, on a baissé le prix. Et quand on s’est aperçu, au bout de quatre ans, que ça n’intéressait personne, on s’est dit : ‘On la donne’. »
À Marly-Gomont dans l’Aisne, ce sont les commerçants du village qui ont tourné un clip vidéo, sur l’air du célèbre rappeur Kamini, pour vanter les attraits de leur village et essayer d’attirer un nouveau pharmacien qui veuille bien reprendre l’officine.
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