En pleine saison estivale, la menace d’une interdiction des chaudières au gaz, un temps évoquée par le gouvernement au nom de la transition écologique, pourrait s’évanouir après une fronde des professionnels de la construction et des consommateurs, et des propositions de compromis.
Vendredi, s’achève une consultation lancée début juin par le gouvernement pour trouver des solutions permettant de réduire les émissions de gaz à effet de serre de la construction, secteur responsable de 18% des émissions de CO2 en France – dont une moitié vient du chauffage au gaz.
Le gouvernement n’a pas prévu de communiquer sur le sujet avant « l’automne », une fois que « toutes les contributions auront été étudiées et synthétisées », a déclaré à l’AFP le ministère de la Transition énergétique.
Un nouveau conseil de Transition écologique est toutefois prévu en septembre, a affirmé jeudi soir le quotidien Les Échos qui cite un « membre du gouvernement ». Selon ce dernier, les pouvoirs publics envisageraient désormais de supprimer toutes les aides existantes liées aux énergies fossiles, mais sans interdire le chauffage au gaz.
En juin, le gouvernement avait pourtant clairement envisagé d’interdire l’installation de nouvelles chaudières au gaz naturel ou au GPL. Son objectif : faire tomber à 30 millions de tonnes (Mt) les émissions de CO2 du bâtiment en 2030 contre 76 en 2022.
Des millions de chaudières à gaz à remplacer
La Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb) a jugé « intenable » la volonté de remplacer d’ici à 2026 des millions de chaudières à gaz, avancée par la Première ministre Élisabeth Borne le 22 mai devant les professionnels.
Côté consommateurs, l’association UFC Que Choisir juge « potentiellement très coûteux » le remplacement des chaudières au gaz par des pompes à chaleur électriques ou des chaudières biomasse.
Interdiction des #chaudières à gaz: @UFCquechoisir dénonce un projet lacunaire, au bilan environnemental incertain, et potentiellement très coûteux pour les consommateurs. Nous demandons donc au @gouvernementFR de prendre en compte la réalité du terrain ! https://t.co/QeiB7DGKEp
— UFC-Que Choisir (@UFCquechoisir) July 25, 2023
« Changer de mode de chauffage dans des logements mal isolés est une aberration » et pourrait conduire « soit à une insuffisance forte de chauffage, soit à une croissance trop forte de la pointe électrique en hiver », tacle l’association.
Depuis 2022, l’installation de chaudières au fioul est déjà bannie partout. Celles fonctionnant au gaz sont interdites dans les seuls bâtiments neufs.
La « guerre des chaudières », avec dans les premiers rôles, les énergéticiens, le secteur du bâtiment, la société civile et le gouvernement porte donc uniquement sur le parc existant : 11,2 millions de foyers chauffés au gaz, soit près de 40% des Français.
À un rythme de remplacement des chaudières en fin de vie de 400.000 à 450.000 par an, « environ 3 millions » seront à remplacer « d’ici 2030 », calcule Cécile Prévieu, directrice générale adjointe du groupe Engie, premier fournisseur de gaz naturel en France.
« S’appuyer sur des chaudières hybrides »
Après des mois de lobbying souterrain en faveur du gaz – et contre le tout-électrique – Engie est sorti du bois mardi, en apportant au débat sa propre proposition de compromis.
Le gazier dit désormais soutenir le développement de chaudières « hybrides », combinant pompes à chaleur électriques et gaz. Engie qui milite pour le gaz dit « vert » (biomethane…), plaide par ailleurs pour des solutions « d’incitation » plutôt que « d’interdiction ».
La ministre Agnès Pannier-Runacher a aussi laissé entendre mardi sur RMC que l’on allait « s’appuyer sur des chaudières hybrides », utilisant l’électricité pour l’eau chaude sanitaire et le chauffage des saisons intermédiaires, et le gaz pour les pointes de froid hivernal.
Cette solution couplant une chaudière gaz avec une pompe à chaleur électrique à régulation intelligente est encouragée dans des pays voisins comme l’Allemagne, l’Italie et les Pays-Bas, relève Engie.
Elle permettrait de réduire de 40% la consommation d’énergie et de 70% les émissions de CO2 du secteur, affirme l’énergéticien.
Les chaudières hybrides permettraient aussi selon Engie de « ne pas sur-contraindre » le système électrique français lors des coups de froid.
Engie demande des efforts financiers à l’État
Reste aux consommateurs à payer la facture. Pour cela, Engie demande des efforts financiers à l’État.
En premier lieu, le gazier souhaite une extension de la prime « coup de pouce chauffage » (ou dispositif CEE) pour les installations de pompes à chaleur ajoutées à des chaudières à gaz existantes afin d’hybrider le système.
Engie souhaite aussi le maintien d’un taux de TVA réduit sur l’installation de chaudières au gaz de haute performance dans les logements « non-compatibles avec les chaudières hybrides », et l’introduction d’une TVA réduite sur le biométhane, dès lors que ce gaz vert représenterait plus de 50% du gaz utilisé.
Le sujet est d’autant plus sensible que l’Élysée vient d’acquérir pour 100.000 euros une chaudière… au gaz, selon un rapport de la Cour des Comptes dévoilé mi-juillet qui a créé un émoi médiatique.
Pour s’engager dans la transition, le chauffage élyséen doit lui aussi s’hybrider, adossé à un projet de géothermie et de pompe à chaleur d’ici à 2024.
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