Les dirigeants des Vingt-Sept sont réunis vendredi à Grenade, dans le sud de l’Espagne, pour un sommet qui s’annonce dominé par le brûlant dossier migratoire, deux jours après un accord sur une réforme à laquelle s’opposent farouchement Varsovie et Budapest.
Le gouvernement nationaliste populiste polonais, à dix jours d’élections législatives qui s’annoncent serrées, a réaffirmé jeudi son désaccord avec le texte, fustigeant un « diktat de Bruxelles et Berlin ». Le sujet de l’immigration, l’un des plus épineux entre les Vingt-Sept, a été mis à l’agenda de ce sommet informel à la suite de l’afflux de migrants sur la petite île italienne de Lampedusa, qui a rappelé l’urgence d’une réponse européenne.
Mercredi, les ambassadeurs des pays de l’UE ont fini par se mettre d’accord sur un règlement mettant en place un mécanisme de solidarité obligatoire entre États membres dans le cas où l’un d’entre eux est confronté à une « situation exceptionnelle » liée à des arrivées « massives » de migrants à ses frontières.
« Vers une ligne plus pragmatique »
Le texte, qui prévoit aussi un régime dérogatoire aux procédures d’asile classiques, moins protecteur pour les migrants, a dû faire l’objet d’un compromis pour lever les réticences allemandes, puis italiennes. Ce règlement, dernière pièce du Pacte asile et migration de l’UE qui doit encore faire l’objet de négociations avec le Parlement européen, a été agréé par les États membres à la majorité qualifiée. Pologne et Hongrie ont voté contre, tandis que l’Autriche, la Slovaquie et la République tchèque se sont abstenues.
La Première ministre italienne Giorgia Meloni a pour sa part exprimé sa satisfaction. « La perception et les ambitions de l’Europe en matière migratoire sont en train d’évoluer vers une ligne plus pragmatique de légalité, de volonté de combattre les trafiquants, de vouloir stopper l’immigration illégale », a-t-elle estimé jeudi.
Le chef du gouvernement polonais, Mateusz Morawiecki, a promis de mettre son « veto » à cette réforme. Mais ni la Pologne ni la Hongrie ne peuvent opposer un tel « veto », puisque la procédure d’adoption de ces textes par les États membres se fait par un vote à la majorité qualifiée. Une procédure que ces deux pays n’ont de cesse de contester. Ils réclament, sans succès, que la déclaration finale du sommet de Grenade comporte une référence à la nécessité d’une unanimité pour adopter la réforme migratoire, a-t-on appris de sources diplomatiques.
Un protocole d’accord objet de controverses
Ce désaccord pourrait faire échec à une déclaration commune sur la migration. C’est ce qui s’était déjà passé lors d’un sommet à Bruxelles fin juin-début juillet, quand le duo polono-hongrois avait bloqué l’adoption de conclusions pour signifier son opposition à deux autres textes du pacte migratoire agréés par les États membres peu avant.
La déclaration sur la migration en discussion pour le sommet de vendredi a pourtant été durcie au fil de sa préparation. Le projet, vu par l’AFP, souligne notamment la nécessité de traiter l’immigration irrégulière « immédiatement et avec détermination » et d’« intensifier les renvois » de migrants irréguliers. Il affirme aussi la détermination de l’UE à nouer « des partenariats globaux mutuellement bénéfiques avec les pays d’origine et de transit », comme celui qui a été signé en juillet avec la Tunisie afin de faire baisser les arrivées de migrants en provenance de ce pays.
Ce protocole d’accord est pourtant l’objet de controverses, liées à des inquiétudes sur le respect des droits des migrants dans ce pays mais aussi à des critiques de certains États membres qui se sont plaints de ne pas avoir été assez impliqués dans sa négociation. Les récentes déclarations du président tunisien, Kais Saied, refusant et qualifiant de « dérisoires » les fonds européens ayant été alloués à son pays, ont encore alimenté les doutes sur ce partenariat.
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