Le lien entre le rire et la vie

Des histoires liant le rire à la longévité sont racontées depuis des milliers d’années. Démocrite, un philosophe de la Grèce antique connu sous le nom de « philosophe rieur », était réputé pour aborder la vie avec humour et rationalité, en dépit de ses absurdités et de ses difficultés. Démocrite aurait vécu une vie exceptionnellement longue, certaines sources rapportant qu’il aurait vécu jusqu’à 90 ans, tandis que d’autres suggèrent qu’il aurait atteint l’âge de 109 ans.

Ce récit ancien gagne en crédibilité lorsque les scientifiques modernes examinent les effets du rire sur l’organisme. La recherche suggère que le rire déclenche une série de changements dans l’organisme qui peuvent avoir des effets bénéfiques à long terme et peuvent également jouer un rôle dans l’allongement de la durée de vie.

La science derrière le rire

Le rire est un processus physiologique et psychologique qui fait travailler ensemble le cerveau, le corps et les émotions. La recherche montre que le rire stimule la libération d’endorphines et renforce les liens entre les personnes. En outre, rire régulièrement semble réduire le risque de décès et de maladie cardiaque, ce qui fait du rire un facteur important d’amélioration de la santé.

Une étude réalisée en 2020, publiée dans le Journal of Epidemiology, a suivi plus de 17.000 adultes japonais âgés de 40 ans et plus. Les résultats ont révélé que les personnes qui riaient moins d’une fois par mois avaient un risque de décès supérieur de 95 % à celui des personnes qui riaient au moins une fois par semaine. Les participants qui riaient moins d’une fois par semaine mais plus d’une fois par mois présentaient un risque élevé de problèmes cardiaques par rapport à ceux qui riaient toutes les semaines.

« Le rire peut contribuer à améliorer la circulation en dilatant la paroi interne des vaisseaux sanguins, ce qui permet d’acheminer davantage de sang et de nutriments vers les tissus et les organes. Il peut réduire les hormones de stress que sont le cortisol et l’épinéphrine, dont l’excès est lié aux maladies cardiaques », a déclaré à Epoch Times le Dr Trent Orfanos, directeur de service de cardiologie intégrative et fonctionnelle.

La dilatation des vaisseaux sanguins contribue à abaisser la pression artérielle et à améliorer le flux sanguin, réduisant ainsi la pression sur le cœur. Cela peut réduire le risque de maladies cardiovasculaires comme l’hypertension, les crises cardiaques et les accidents vasculaires cérébraux.

« En outre, l’amélioration du flux sanguin contribue à maintenir un rythme cardiaque plus souple et plus résistant, connu sous le nom de variabilité de la fréquence cardiaque, ce qui est le signe d’un cœur en bonne santé », a déclaré le Dr Orfanos.

En outre, la recherche indique que lorsque nous rions, notre cerveau libère des opioïdes dans les zones liées au plaisir et aux émotions, comme le thalamus, le noyau caudé et l’insula antérieure. Les opioïdes sont des substances chimiques naturelles de bien-être qui activent le système de récompense du cerveau, nous rendant heureux et détendus. Ils contribuent également à renforcer les liens sociaux en encourageant les interactions positives et les liens affectifs.

Gérer la douleur chronique par le rire

La thérapie par l’humour contribue à réduire la douleur chez les personnes de tous âges, y compris les enfants, les adultes et les personnes âgées, selon une revue de littérature portant sur six études analysant son efficacité dans le traitement de la douleur chronique.

La douleur chronique, comme elle est définie par les études, fait référence à une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable liée à des lésions tissulaires réelles ou potentielles. Elle se caractérise par une douleur qui dure plus de trois mois et dont l’intensité est modérée à sévère.

Cindy Perlin, assistante sociale clinique agréée, survivante de la douleur chronique et auteure de The Truth About Chronic Pain Treatments : The Best and Worst Strategies for Becoming Pain Free (La vérité sur les traitements de la douleur chronique : les meilleures et les pires stratégies pour se libérer de la douleur), a raconté à Epoch Times comment le rire l’a aidée à gérer une douleur dorsale chronique sévère.

Elle a découvert le pouvoir du rire en 1980 en lisant le livre Anatomy of an Illness (Anatomie d’une maladie) de Norman Cousins. Dans ce livre, Norman Cousins raconte comment il a guéri d’une maladie articulaire douloureuse, la spondylarthrite ankylosante, grâce à la thérapie par le rire.

« Lorsque j’ai lu le livre de Norman Cousins sur la façon dont le rire peut être un outil de guérison et de soulagement, cela faisait trois ans que j’étais handicapée par des douleurs dorsales chroniques, depuis l’âge de 25 ans. Les médecins n’avaient aucune réponse à me donner. Je regardais la mini-série sur l’Holocauste et lisais des romans sur la Seconde Guerre mondiale pour me distraire de la douleur. Je n’avais aucune idée que ce qui remplissait mon esprit contribuait à ma douleur », a déclaré Cindy Perlin à Epoch Times.

« La douleur était si terrible que j’aurais fait presque n’importe quoi pour m’en débarrasser. Et il est certain que l’humour est une option beaucoup plus agréable que la plupart des traitements de la douleur chronique. Au cours de périodes stressantes de ma vie, j’ai eu des poussées de douleur, mais jamais aussi graves que la première, parce que j’ai maintenant des outils que je peux utiliser pour les gérer, y compris l’humour ».

S’appuyant sur son expérience clinique, Cindy Perlin a souligné que les clients ouverts à une approche psychocorporelle de la guérison ont tendance à obtenir de meilleurs résultats, et que ceux qui intègrent l’humour jouissent d’une meilleure qualité de vie. En revanche, les clients qui restent dans un état d’esprit négatif et craintif ne s’améliorent guère.

« Je me souviens d’une cliente atteinte d’un cancer qui est venue me voir. Elle m’a dit qu’elle aimait regarder des films d’horreur pour se divertir. Je lui ai dit que le fait de rester dans un état de peur pendant qu’elle regardait ces films était préjudiciable à son système immunitaire, mais elle a insisté sur le fait qu’elle aimait ces films et qu’elle ne voulait pas arrêter. Elle est morte d’un cancer peu de temps après. Je ne sais pas quelle différence cela aurait fait, mais cela aurait pu prolonger sa vie et réduire sa douleur de passer plus de temps dans le rire plutôt que dans la peur », a déclaré Cindy Perlin.

Les observations de Cindy Perlin pourraient être mises en corrélation avec une étude de 2019, publiée dans le Journal of Bodywork and Movement Therapies, qui a vérifié si le fait de regarder quelque chose d’amusant pouvait aider à gérer la douleur. Les résultats ont montré que le fait de regarder une comédie améliorait l’humeur des participants et maintenait leur tolérance à la douleur, tandis que le fait de regarder un documentaire ennuyeux détériorait leur humeur et réduisait leur capacité à faire face à la douleur. L’étude a conclu que 30 minutes de rire peuvent aider les gens à mieux gérer la douleur.

« Le flux sanguin global augmente de près de 20 % après avoir regardé une comédie par rapport à un film stressant. Dans le scénario de la comédie, la pression artérielle diminue, les endorphines – hormones qui réduisent la douleur, améliorent l’humeur et augmentent le sentiment de bien-être – augmentent et l’oxyde nitrique, qui détend et dilate les vaisseaux sanguins, est libéré. Ces effets peuvent contribuer à une meilleure gestion de la douleur », a déclaré le Dr Orfanos.

Avantages pour la santé mentale

Comme le souligne aux États-Unis le National Institute of Child Health and Human Development (Institut national de la santé infantile et du développement humain), un stress prolongé peut augmenter le risque d’obésité, de maladies cardiaques, de cancer et de diverses autres maladies. Comme il a été démontré que le rire réduit le stress en abaissant les niveaux de cortisol – l’hormone du stress – dans l’organisme, il peut contribuer à diminuer le risque de ces problèmes de santé.

« Le rire est particulièrement bénéfique dans les moments difficiles de la vie, lorsque le corps devient trop tendu, commence à souffrir ou, pire, développe des maladies », a déclaré dans un courriel adressé à Epoch Times Gary Tucker, psychothérapeute agréé et chef de clinique.

« Une fois que nous nous sentons moins anxieux et que nous restons présents dans l’instant, notre bien-être mental et physique s’améliore, notre système immunitaire se renforce et notre espérance de vie augmente. C’est pourquoi beaucoup disent que le rire peut agir comme une véritable médecine et guérir nos esprits et nos corps », a déclaré Gary Tucker.

Le yoga du rire et la musicothérapie ont contribué à réduire la dépression et l’anxiété chez les participants à une étude comparative menée en 2024 auprès de personnes âgées. Les effets ont duré environ un mois et, pendant cette période, les participants au yoga du rire ont connu la réduction la plus significative du stress.

Le yoga du rire associe des exercices de rire à des techniques de respiration inspirées du yoga traditionnel. Il s’agit généralement de séances guidées au cours desquelles les participants s’adonnent à des activités ludiques, des applaudissements, des chants et des exercices de rire, que le rire se déclenche naturellement ou non.

Une autre étude sur la thérapie par le rire pendant la pandémie de COVID-19 a montré que les étudiants en soins infirmiers qui avaient participé à la thérapie étaient moins anxieux et se sentaient plus heureux et plus satisfaits de la vie que ceux qui n’y avaient pas participé.

L’étude a duré cinq semaines et comprenait 10 séances de thérapie par le rire en ligne, deux fois par semaine. Les participants du groupe d’intervention se sont inscrits à ces séances par l’intermédiaire d’une plateforme en ligne. Les chercheurs ont recueilli des données à distance à l’aide d’outils en ligne fiables pour mesurer l’anxiété, la satisfaction à l’égard de la vie et le bien-être psychologique des participants.

Le rire peut également aider à surmonter les traumatismes, a déclaré Cindy Perlin, qui a utilisé le rire comme outil thérapeutique pour ses clients, dont l’un a souffert de traumatismes pendant son enfance.

« Quelque chose l’a fait réagir et elle s’est mise en boule en position fœtale. Je travaille à domicile et mon chat était allongé sur le sol à côté d’elle, le ventre en l’air et les pattes écartées. À un moment donné, ma cliente a ouvert légèrement les yeux, a vu le chat faire exactement le contraire de ce qu’elle faisait et s’est mise à rire. Cela l’a sortie de son état traumatique », explique Cindy Perlin.

Aborder le scepticisme et les limites

Dans certaines situations et conditions, le rire peut être déconseillé ou nuisible. Par exemple, dans une étude portant sur des patients atteints de bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), les chercheurs ont constaté que si le fait d’avoir un bon sens de l’humour était lié à des niveaux moindres de dépression et d’anxiété, ainsi qu’à une meilleure qualité de vie, le rire provoqué par le visionnage d’une vidéo drôle aggravait temporairement la fonction pulmonaire et entraînait des difficultés respiratoires. Cela indique que le fait de rire fort pourrait avoir un effet négatif sur la fonction pulmonaire des personnes atteintes de BPCO.

Le rire doit également être évité dans certaines conditions médicales, par exemple après une intervention chirurgicale ou des blessures affectant la poitrine ou l’abdomen. Pour les personnes souffrant de troubles cardiaques comme une angine instable ou un infarctus récent, un rire excessif pourrait mettre le cœur à rude épreuve. En outre, les personnes souffrant de certaines maladies neurologiques comme les crises d’épilepsie doivent être prudentes car, bien que cela soit rare, le rire peut déclencher des symptômes ou une gêne.

« Je ne me fierais pas trop au rire seul pour la santé cardiaque et la longévité, même si je pense qu’il est complémentaire au régime alimentaire et à l’exercice, qui sont plus puissants. Parfois, le rire peut être induit par le stress, ce qui ne présente pas les mêmes avantages que le rire joyeux. Dans l’ensemble, je pense que les avantages du rire joyeux l’emportent largement sur les risques », a déclaré le Dr Orfanos.

Alors, rire à gorge déployée, s’esclaffer, regarder une comédie ou s’adonner à toute activité qui procure de la joie et fait sourire. Le changement peut faire chaud au cœur.