Venezuela : deux conceptions de la démocratie

17 octobre 2017 09:00 Mis à jour: 17 octobre 2017 08:38

Si lundi matin la Chine, allié de Caracas, a salué un processus électoral « en douceur », les États-Unis ont eux « condamné » des élections « ni libres ni justes ».

Les États-Unis cherchent seulement à « soutenir les appels au chaos, l’instabilité, la violence et l’extrémisme », a réagi le ministère des Affaires étrangères vénézuélien, qualifiant « d’agression » et « d’ingérence » le communiqué de Washington.

Le ministère a également critiqué l’Union européenne qui « met en doute la volonté du peuple vénézuélien ».

L’UE a déclaré que les résultats des élections ne modifiaient pas sa « ligne de conduite ». Les 28 États membres de l’UE ont récemment donné leur « accord de principe » à la mise en place de sanctions contre le régime du président Maduro en réponse à la répression contre l’opposition.L’opposition vénézuélienne a écarté tout dialogue avec le gouvernement sans un audit indépendant sur la validité des élections régionales vénézuéliennes, largement remportées par le camp du président Nicolas Maduro.

« Nous n’assisterons à aucun processus de discussion ou de négociation tant que cet audit n’aura pas été accepté et que n’auront pas eu lieu les changements requis pour l’exercice normal des droits politiques des Vénézuéliens », a annoncé lundi soir Angel Oropeza au nom de la coalition d’opposition, la Table de l’unité démocratique (MUD), lors d’une conférence de presse.

Concrètement, l’opposition demande « une vérification internationale fiable » du scrutin de dimanche, pour lequel aucun observateur international n’avait été autorisé.

« Nous appelons le peuple (vénézuélien) et le monde à se battre pour un nouveau système électoral et pour la convocation urgente d’élections libres et transparentes », a ajouté M. Oropeza en accusant le régime de « fraudes, violences, irrégularités, manipulations, extorsions et chantage pour nier la volonté des Vénézuéliens ».

La possibilité d’une sortie de crise rapide s’éloigne donc pour ce pays pétrolier rongé par de graves problèmes économiques et politiques, selon les analystes consultés par l’AFP.

Officiellement, le Parti socialiste uni du Venezuela (PSUV), au pouvoir, s’est imposé dans 17 des 23 États du pays, selon le Conseil national électoral (CNE). Au niveau national, le chavisme -du nom du défunt Hugo Chavez, président de 1999 à 2013 et mentor de M. Maduro- obtient 54% des votes, contre 45% a ses adversaires.

« Le chavisme est vivant, et il triomphe », s’est félicité le chef de l’État, Nicolas Maduro, aussitôt félicité par Raul Castro, le N.1 cubain, selon qui le Venezuela « a donné une leçon de paix et de démocratie ».

Les gouverneurs élus devraient prêter serment mardi devant la toute puissante Assemblée constituante. Une condition sine qua non imposée par le président mais rejetée par ses adversaires, qui ne reconnaissent pas cette instance, laissant augurer un nouveau bras de fer.

L’opposition, annoncé victorieuse dans 11 à 18 États par les sondages, n’en a remporté que cinq, un dernier siège restant encore indécis lundi soir. Elle qui avait fait de cette élection un référendum pour ou contre le chef de l’État semble donc n’avoir bénéficié ni de la forte participation (61%), ni du taux d’impopularité record de Maduro (80%).

« Il faut continuer à se battre », a lancé lundi matin Carlos Ocariz, un des candidats battus de la MUD.

Mais le coeur n’y est plus, comme en témoignaient les rues désertes à l’est de la capitale, un des bastions de l’opposition, dimanche soir et lundi matin. Un calme étonnant après les quatre mois de manifestations quasi-quotidiennes, d’avril à juillet, qui avaient fait descendre dans les rues des centaines de milliers de personnes, avec un bilan final de 125 morts.

 « Descendre dans la rue n’a servi à rien. Qu’est-ce que ça va changer d’aller voter à la présidentielle? On sait déjà ce qui va se passer », a déclaré à l’AFP Bianca, 33 ans, en référence à ce scrutin prévu fin 2018.

À l’appel de l’opposition, les manifestants exigeaient le départ du président. Après avoir boycotté l’élection des membres de l’Assemblée constituante fin juillet, les anti-Maduro avaient changé leur fusil d’épaule en appelant la population à voter dimanche. Toujours sans succès.

Et la voie de la négociation semble compromise. « Le dialogue, je n’y crois pas. On va tout droit vers davantage de confrontation », selon le politologue Luis Salamanca.

« Les divisions de la MUD sur la meilleure stratégie pour affronter le gouvernement (manifestations, élections ou dialogue) vont s’aggraver », prédit Diego Moya-Ocampos, analyste du cabinet britannique IHS, selon qui ce sont « les protestations dans la rue et la communauté internationale qui vont donner le ton ».

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