L’Europe, qui tente de rattraper un retard considérable dans la production de batteries électriques pour son industrie automobile, voit les projets d’usines fleurir sur son sol, mais est menacée par la concurrence agressive des États-Unis et de la Chine.
L’« Europe a les moyens d’être dans la compétition », constate Tobias Gehrke, chercheur en géoéconomie au European Council on Foreign Relations (ECFR). « Nous sommes dans une position acceptable, mais la pression monte ». Près de 50 usines de batteries lithium-ion doivent voir le jour en Europe d’ici 2030, alors qu’elles sont quasiment inexistantes aujourd’hui.
L’Allemagne est le pays le plus en pointe avec l’équivalent de 498 GWh de projets dans les cartons, suivie de la Hongrie (224 GWh) puis de la Norvège (136 GWh). La France n’arrive que quatrième avec 122 GWh, selon le suivi de l’ONG Transport and Environment. Un quatrième projet d’usine a été confirmé par le groupe taïwanais ProLogium à Dunkerque, où le président Emmanuel Macron se rendra vendredi. Mais d’après l’ONG, 68% de ces projets risquent d’être « revus à la baisse, retardés ou interrompus », en raison notamment de la concurrence américaine dopée par les subventions de l’Inflation Reduction Act (IRA).
Ce plan du gouvernement américain prévoit des crédits d’impôt colossaux pour l’industrie verte et la transition énergétique, afin de contrer la montée en puissance chinoise. « Le cœur de l’IRA, ce sont des baisses de taxe sur l’électricité pour financer l’électricité verte », précise Tobias Gehrke. L’hydrogène est par exemple devenu bien plus abordable grâce à cette législation.
Compétitivité en berne
L’Europe souffre d’un énorme problème de compétitivité : « nous payons le double pour l’électricité par rapport à la Chine », déplore M. Gehrke. Il faut « subventionner l’énergie pour ne pas être décroché. Les Américains ont très bien compris cela avec l’IRA », ajoute-t-il. En décembre, les batteries lithium-ion coûtaient 24% plus cher aux États-Unis qu’en Chine. En Europe, elles étaient 34% plus chères. Pour le chercheur, l’objectif de l’Europe de produire l’ensemble des batteries nécessaires à son industrie automobile sur son sol d’ici 2030 paraît à ce stade peu réaliste.
Autre handicap majeur : l’accès aux matériaux critiques – graphite, lithium, nickel, manganèse et cobalt – dont la chaîne d’approvisionnement est largement maîtrisée par la Chine. La Chine a notamment la main sur 75% du raffinage du lithium et 50% du cobalt et devrait conserver son leadership dans la production de batteries pour les cinq prochaines années, selon les prévisions de BloombergNEF.
Tout électrique en 2035
Pour autant, l’Europe a commencé à réagir « avec le Critical Raw Material Act qui définit l’objectif d’avoir des partenariats stratégiques et d’avoir une plateforme d’achat commun au niveau de l’Union européenne », explique Diane Strauss, directrice de Transport and Environment France. Si l’Europe ne développe pas « la même puissance de feu que l’IRA américain », elle a permis aux États membres de « débloquer des aides d’État beaucoup plus facilement », a-t-elle salué.
L’« Europe part de loin face à une Chine très en avance et des États-Unis à la puissance financière inégalable, mais elle peut compter sur son marché intérieur, un des premiers pour les véhicules électriques, même si la Chine la devance encore.L’« Europe est légèrement en avance par rapport aux États-Unis en terme d’adoption du véhicule électrique », affirme Gilles Normand, vice-président de ProLogium, qui veut ouvrir son usine de Dunkerque d’ici fin 2026.
L’« Europe a adopté une régulation supranationale très claire » avec l’obligation de vendre des véhicules neufs zéro émission à partir de 2035, poursuit-il. Cette législation clarifie la situation pour les industriels donc « quand nous avons décidé de nous développer, nous avons choisi l’Europe ».
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