TRADITIONS CHINOISES

La place du dragon dans la civilisation chinoise

mars 29, 2016 9:10, Last Updated: mai 3, 2016 12:03
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Chaque année à travers la Chine, une fête honore l’éveil du dragon, le seigneur de l’eau en mouvement. Appelée « longtaitou » ou « le dragon lève la tête », cette tradition de longue date marque l’arrivée de la pluie qui arrosera la prochaine récolte.

Cette année, les célébrations tombaient le 10 mars, c’est-à-dire le deuxième jour du mois lunaire selon le calendrier traditionnel chinois.

Les dragons ont fait partie de la culture chinoise avant même que la Chine ne voie le jour. Mais qu’est-ce qui fait du dragon une icône si capitale ?

Dans la culture traditionnelle chinoise, le dragon est une créature mystique dotée de caractéristiques célestes. C’est le plus noble des animaux et en sa qualité de gardien de l’eau, c’est lui qui régente le climat, si important pour la civilisation chinoise essentiellement agraire.

En même temps, c’est une créature mystique qui incarne l’apogée insondable de la force et de la liberté parfaites. Selon la dénomination chinoise des quatre directions, un Dragon d’Azur administre l’Est, c’est-à-dire la vaste étendue de l’océan Pacifique. Pour les anciens en Chine, c’était la source infinie et l’embouchure de tous les cours d’eau et fleuves du pays. Les dirigeants ont pris comme emblème exclusif de la majesté impériale la tête jaune du dragon à cinq pattes. Cet animal et cette couleur ont aussi représenté le centre, c’est-à-dire la Chine elle-même.

L’empereur Guangxu de la dynastie Qing portant le costume impérial. Il y a un dragon jaune sur sa poitrine (CC-PD-ART)

« Je sais que les oiseaux savent voler, les poissons savent nager et les bêtes savent courir » selon la fameuse déclaration de Confucius, le maître de la moralité séculière. « Mais les dragons ! Jamais, je ne saurai comment ils parviennent à chevaucher le vent et les nuages haut dans le ciel. »

Les paroles de Confucius en disent long sur la signification du dragon dans la culture chinoise ; parallèlement, sa déclaration était une reconnaissance directe du sage Lao-Tseu, l’un de ses contemporains dont la philosophie taoïste est l’une des œuvres intellectuelles les plus célèbres transmises en Chine.

Les théories chinoises des lois de la stratégie et des lois naturelles mettent l’accent sur la supériorité de l’informe. Alors que le tigre, connu pour être le roi des animaux, est sensé avoir du yin brut, ou des pouvoirs terrestres, cela se limite néanmoins à un niveau temporel. La force du dragon, c’est celle de l’énergie invisible, céleste du yang, qui jaillit de l’eau et du climat qu’il régit. De même, les principes diffus, abstraits du taoïsme demeurent dans le non-agir et la compréhension de l’essence des choses par opposition à l’attachement aux formes.

Au cours de deux entretiens avec Lao-Tseu, Confucius a appréhendé la profondeur du « vieux maître » (le sens littéral du nom de Lao-Tseu). Confucius savait que son propre enseignement, suffisant pour exposer les principes moraux de la vie séculière, resterait à tout jamais une fraction de la sagesse de ceux qui renoncent à tout pour aller cultiver le Tao ( la Voie).

 

L’âme d’un peuple

La plupart des villages chinois avaient leurs propres autels avec leurs dragons, servant à amener la pluie et donc les récoltes abondantes. On disait que, dans les cieux, les dragons volants gardaient les portes du ciel, ou bien conduisaient les chars divins.

À côté du Dragon d’Azur à l’Est, des dragons plus petits dirigeaient les autres directions. En somme, partout où il y avait le ciel et l’eau, il y avait des dragons.

Un dragon illuminé dans le Wiltshire, en Angleterre le 2 novembre 2015. (Matt Cardy/Getty Images for Longleat)

Avant même que la Chine ne constitue une culture cohérente, on trouvait le dragon dans les tribus néolithiques qui ont précédé la civilisation chinoise telle que nous la connaissons aujourd’hui.

On trouve les premiers exemples connus de ces créatures mystiques dans les objets en jade de la culture de Hongshan vieille de 7 000 ans qui existait aux confins du Nord-Est de la Chine et de la Mongolie. Beaucoup de symboles et de motifs religieux similaires, y compris la vénération du jade et des dragons existent dans d’autres communautés chinoises anciennes et se sont transmis à des empires chinois plus récents.

Un dragon en forme de C datant de la culture Hongshan au Musée National de Pékin. (STR/AFP/Getty Images)

Selon les légendes populaires, on raconte que les premiers souverains chinois étaient en fait des dragons devenus hommes qui avaient été envoyés pour régner sur l’humanité. On dit que la civilisation chinoise elle-même est issue du légendaire « Huang Di », ou Empereur Jaune et que ses descendants ont mené une tribu semi-nomade attaquer le peuple Yan pour finalement s’y intégrer. Le nom de ces tribus qui signifie « feu » se réfère à la culture sédentaire et agraire de la vallée du Fleuve Jaune.

À ce jour, de multiples appellations littéraires existent pour désigner le peuple chinois, comme « les descendants de Yan et de Huang », ou bien encore « la postérité du dragon ».

Selon une théorie populaire, l’ancienne culture Hongshan correspond aux légendes de l’Empereur Jaune. Quelle que soit la pertinence de cette conception particulière, le rôle du dragon dans le symbolisme de la Chine impériale correspond à la dynamique riche et cyclique qu’on retrouve dans l’histoire de la civilisation la plus ancienne du monde.

Version anglaise : The Dragon’s Place in Chinese Civilization

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