Annegret comment? A peine connue en Allemagne il y a deux ans, la Sarroise au nom quasi-imprononçable a décroché vendredi la présidence du parti conservateur malgré sa proximité avec une Angela Merkel contestée. Annegret Kramp-Karrenbauer est baptisée le plus souvent par ses initiales « AKK », mais aussi par ses détracteurs « Merkel 2 », « Merkel bis » voire un peu dédaigneusement « Mini-Merkel », en raison de sa fidélité à la chancelière, qu’elle remplace à ce poste.
Elle va désormais avoir fort à faire pour maintenir la cohésion des démocrates-chrétiens de la CDU, après n’avoir été élue à la tête du mouvement qu’avec une courte majorité de 51,7%, face à un opposant au cap centriste de la chancelière, Friedrich Merz, qui lui prônait un virage à droite. Avec cette catholique de 56 ans, les délégués de la CDU, un parti qui a gouverné l’Allemagne pendant un demi-siècle au cours des 70 ans écoulé, ont ils est vrai une certaine continuité: cette femme aux cheveux courts assume globalement l’héritage « merkelien ».
Mme Kramp-Karrenbauer a exclu de repositionner le mouvement du centre vers la droite dure, dans l’espoir de récupérer les électeurs conservateurs tombés dans l’escarcelle de l’extrême droite. Pour elle, il est plus pertinent d’« élargir le centre », d’autant plus que le parti perd aussi des voix en direction des écologistes. Dans le style, AKK et Angela Merkel se rejoignent aussi. La Sarroise n’a, comme Merkel, rien d’une oratrice brillante.
Mais elle est également « toujours soigneusement préparée, très vive et pleine de confiance en elle », souligne le journal berlinois Tagesspiegel. Et elle veut devenir chancelière, une voie que lui ouvre à terme son accession à la présidence du parti. Une biographie paru en octobre intitulée « Je peux, je veux et je serai » égrène les témoignages de caciques de la CDU qui la voient très bien dans cette fonction.
Au delà, celle qui est entrée au parti il y a près de 40 ans, a son propre parcours, et ses convictions pour certaines nettement plus radicales que celles de son modèle, sur les sujets de société et la politique migratoire.
Elle s’en est pris en particulier au mariage pour tous légalisé par le gouvernement Merkel, qu’elle considère comme une « erreur », car susceptible d’ouvrir la voie à « d’autres revendications comme un mariage entre proches parents ou plusieurs personnes ». Elle a aussi plaidé pour une expulsion immédiate de tout réfugié reconnus coupables d’actes criminels, y compris des Syriens.
Née le 9 août 1962 à Völklingen, elle est élevée dans une famille catholique traditionnelle de six enfants. Mariée depuis 34 ans, elle même en a trois. Quand Merkel est protestante, divorcée, remariée et sans enfants. Après des études de droit et de sciences politiques, AKK entre au gouvernement de Sarre où elle gravit rapidement les échelons, pendant que son mari s’occupe d’élever les enfants.
Elle devient ministre à partir de 2000, tour à tour de l’Intérieur, du Travail, de la Famille, des Sports, de la Justice. « Il n’y a pas de tâche qu’on ne puisse pas confier à Annegret », a loué le chef du gouvernement local Peter Müller. En 2011, elle prend la tête de ce petit Land à la frontière de la France, où elle est très populaire, également pour son sens de la l’auto-dérision.
Chaque année, cette fan de carnaval se produit sur scène sous le personnage de « Gretel, la femme de ménage » qui râle en dialecte sarrois contre la politique berlinoise. Pas du tout le style de Merkel. Elle acquiert une notoriété nationale seulement en mars 2017 quand elle remporte des élections locales très serrées contre les sociaux-démocrates.
Près d’un an plus tard, elle rejoint Berlin en tant que secrétaire générale du parti. Là aussi elle domine son sujet et surprend les plus sceptiques par ses qualités de dirigeante, affirmait récemment le journal Frankfurter Allgemeine Zeitung, avant de résumer: « Elle est plus générale que secrétaire ».
D.C avec AFP
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