L’interdiction des rassemblements sur la voie publique en France fait débat. Un projet de loi, qui a été présenté ce mercredi, prévoit le maintient de cette interdiction jusqu’au 10 novembre.
Le conseil scientifique a rendu un avis le 2 juin dans lequel il annonce que l’épidémie de coronavirus est « sous contrôle ». Toutefois, il recommande la « suppression des rassemblements non nécessaires », surtout dans les « grandes métropoles », relate 20 Minutes.
Au début de la crise du coronavirus, le gouvernement était entré en état d’urgence sanitaire, le mardi 24 mars 2020, après la publication d’une loi au journal officiel. Ce texte prévoyait, entre autres, de donner le droit au gouvernement français d’interdire les rassemblements.
L’exécutif a annoncé, ce mercredi 10 juin, que certaines interdictions seront toujours en vigueur, malgré la levée de ce régime juridique d’exception. Celle de manifester en fait partie. Mais nombreux sont celles et ceux qui s’opposent à de telles interdictions, c’est le cas notamment d’une partie de l’opposition, de plusieurs associations et de syndicats.
Une entrave à la vie démocratique ?
Une vingtaine d’organisations, dont la Ligue des droits de l’homme et la CGT, ont écrit dans un communiqué : « Nous exigeons du gouvernement le respect immédiat de ce droit, l’engagement à cesser toute poursuite contre les initiateur-trice-s des manifestations et les participant-e-s. » Elles pensent que « l’urgence sanitaire ne justifie en rien la confiscation de la démocratie, d’autant plus lorsque des choix sociétaux sont imposés par la période ».
Danièle Obono, députée de La France insoumise, ne comprend pas pourquoi « la vie démocratique continue d’être entravée ». Selon elle, cela est « incohérent » et elle pointe du doigt « la tendance autoritaire de ce pouvoir ». « Le gouvernement maintient les restrictions pour les manifestations, alors que presque tout le reste est permis et que la vie sociale et commerciale reprend », s’indigne-t-elle, estimant que « le contexte de crise sanitaire est une excuse pour continuer cette politique ». Elle déclare : « Le droit de manifester ne peut dépendre du bon vouloir de l’exécutif. »
Interdire mais tolérer…
Le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner, s’est exprimé sur BFMTV ce mardi, à propos des rassemblements contre le racisme. Il a expliqué que bien que les manifestations ne soient pas autorisées dans les faits, il considère que « l’émotion mondiale, qui est une émotion saine sur ce sujet, dépasse au fond les règles juridiques qui s’appliquent ». Le préfet de police de Paris avait pourtant interdit certaines de ces manifestations. Christophe Castaner a encore déclaré au média : « Nous ne souhaitons pas réaffirmer l’interdiction, qui est de droit, qui est de fait, et il n’y aura pas de sanctions et de procès-verbal pour la participation à cette manifestation. Il faut que cette émotion forte puisse être soutenue. »
Bruno Retailleau, sénateur vendéen et président du groupe des Républicains au Sénat, a réagi aux propos de Christophe Castaner sur son compte Twitter, en critiquant la nouvelle formule du ministre de l’Intérieur : « Après le ‘soupçon avéré’ voici ‘l’interdiction autorisée’ », s’est-il indigné.
Le président des Républicains, Christian Jacob, s’est également manifesté sur son compte Twitter. « En déclarant que l’émotion prédomine sur la loi, Christophe Castaner met gravement en danger l’ordre public. Ses propos sont indignes d’un ministre de l’Intérieur. En République, la force doit rester à la loi », a-t-il écrit.
Parce que le virus « continue à circuler »
Étant donné que « le virus continue à circuler, et il est donc nécessaire que nous soyons armés pour répondre à cette situation », a expliqué la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye, ainsi que le précise encore 20 Minutes. C’est pour cette raison que le nouveau projet de loi – qui a été présenté en Conseil des ministres – prévoit une transition de quatre mois. Sibeth Ndiaye évoque effectivement une « sortie en biseau de l’état d’urgence avec une période transitoire », qui devrait se prolonger jusqu’au 10 novembre.
Pour l’instant, tout rassemblement de plus de dix personnes est interdit. « le Premier ministre conservera la possibilité de réglementer les déplacements et l’accès aux moyens de transport, les établissements recevant du public, comme les discothèques, et de décider des jauges concernant les rassemblements sur la voie publique », a également souligné Sibeth Ndiaye.
Marie Guévenoux, députée LREM de l’Essonne et future rapporteuse du projet de loi à l’Assemblée, estime que « même si la situation sanitaire s’améliore, notre pays n’est pas sorti de l’épidémie de Covid-19 », rapporte 20 Minutes. C’est la raison pour laquelle elle soutient que « la sortie de l’état d’urgence sanitaire ne peut être sèche, il faut une réponse gradué [sic]. » Elle ne voudrait pas qu’ « après des semaines de confinement qui ont demandé beaucoup d’efforts aux Français et à l’État », tout soit réduit à néant par « manqu[e] de vigilance ».
Cette interdiction de rassemblement doit encore être votée par le Parlement. Le projet de loi doit par ailleurs être examiné à l’Assemblée dès lundi.
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